RSS SyndicationTwitterFacebookFeedBurnerNetVibes
Rechercher
22 

Martinez et Mailly doivent déjouer le piège tendu par Hollande et Valls

La seule stratégie possible pour éviter le pourrissement comme en 2010, c’est de concentrer les explications sur le caractère totalement inacceptable de l’inversion de la hiérarchie des normes ouvrant la porte au dumping social généralisé, d’organiser le soutien financier massif aux grévistes de quelques secteurs stratégiques susceptibles de paralyser l’économie, d’éviter de déclencher des grèves dans des secteurs qui, parce qu’elles exaspèreraient rapidement les citoyens, tomberaient dans le piège tendu par Hollande et Valls.

Il est plus que probable que Hollande et Valls ont choisi la stratégie du pourrissement du conflit sur la loi travail. Tout en faisant des concessions aux cheminots, aux aiguilleurs du ciel etc ..., sur des revendications sans lien avec la loi travail. Ils auraient tort de s’en priver, s’il devait se confirmer que la CGT et FO sont incapables d’éviter ce piège du pourrissement, comme cela a été le cas en octobre 2010, quand Sarkozy a réussi à imposer sa réforme des retraites contre l’avis de 75 % des Français.

En 2010 à Marseille, quand les éboueurs sont partis en grève reconductible, 90 % des Marseillais les soutenaient. Deux semaines plus tard, devant les montagnes d’immondices, 90 % des Marseillais avaient basculé dans l’opposition aux grévistes. Il en ira de même en 2016 pour les Français, si la CGT et FO font les mêmes erreurs qu’en 2010. Depuis 10 jours les Français soutiennent majoritairement les grévistes, mais ça va très vite s’inverser et pas seulement à cause de la pluie et de l’Euro de football. Le fait que la multiplication des actions, des blocages et des manifestations soit due à l’autisme de Hollande, Valls, Gattaz et Berger ne changent rien à l’affaire. Il appartient aux dirigeants de la CGT et de FO de choisir la bonne stratégie pour déjouer le piège du pourrissement. En trouvant les solutions pour concilier 2 objectifs un peu contradictoires. D’une part, se préparer à poursuivre la grève, dans quelques secteurs stratégiques bien délimités (comme les raffineries), aussi longtemps que Hollande et Valls n’auront pas renoncé à l’inversion de la hiérarchie des normes. D’autre part, en évitant des grèves qui pénaliseraient inutilement les Français, par exemple la collecte des ordures ménagères. Les citoyens sont prêts à soutenir dans la durée la grève dans quelques secteurs (1), comme je l’explique dans « La grève par procuration est probablement la seule solution pour faire reculer un pouvoir anti démocratique ».

Allons à l’essentiel : malgré le degré élevé de la mobilisation depuis 4 mois, Mailly, et maintenant Martinez, ont estimé que l’heure n’était plus à exiger le retrait du projet de loi. Par contre, il apparaît tout à fait possible d’exiger et d’obtenir le retrait de l’article 2. Les citoyens, les politiques et même les journalistes honnêtes ont maintenant compris que le plus grave danger c’est l’inversion de la hiérarchie des normes qui ouvrirait la voie au dumping social généralisé. Même la direction de la CFE-CGC vient de déclarer dans une interview aux Echos « Je ne vois pas ce que la loi travail apporte de positif pour l’emploi » et demande la renégociation du projet de loi. La direction de la CFDT est donc de plus en plus seule à tenter de justifier l’injustifiable. Ainsi, sur France Inter le 2 juin à 8 heures 20, Laurent Berger a été totalement incapable de contester la démonstration de Benoît Hamon du 30 mai, que Patrick Cohen lui a fait réécouter. Des spécialistes en droit du travail ont expliqué pourquoi l’inversion de la hiérarchie des normes constituerait un recul historique sans précédent (2).

Résumons : ce projet de loi de 588 pages (!), par lequel le gouvernement prétend « simplifier » le code du travail et dont la version initiale a été rédigée sans négociation avec les syndicats, est un pur scandale. Sans même parler du recours au 49-3. A lui seule, le droit donné à chaque entreprise de majorer les heures supplémentaires de seulement de 10 %, au lieu de 25 %,

• conduirait à la généralisation de cette régression, puisque toutes les entreprises en concurrence seraient obligées de s’aligner sur ce moins-disant
• conduirait les employeurs à privilégier l’augmentation du temps de travail au détriment des embauches, donc de la création d’emplois
• entraînerait l’abolition définitive de ce qui reste des 35 heures.

L’inversion de la hiérarchie des normes, c’est la porte ouverte à la généralisation du chantage à l’emploi et au dumping social généralisé sur les salaires et les conditions de travail, comme le répètent les nombreux députés du PS qui n’ont pas l’intention de voter un tel recul historique.

Si l’on veut éviter un nouvel échec retentissant des grèves comme en 2010, la seule solution c’est d’organiser immédiatement la solidarité financière avec les grévistes des secteurs stratégiques, avec l’appui de Solidaires, de la FSU, de l’UNEF et de toutes les associations progressistes (comme Attac). Un appel national unitaire permettrait de recueillir plusieurs dizaines de millions d’euros (3). A condition d’avoir une organisation rigoureuse et transparente des collectes de soutien dans un maximum d’entreprises, de réunions, de lieux publics et via internet.

André Martin

Notes

(1) Il semble que des grèves de la collecte des ordures ménagères se préparent à Toulouse, Paris et dans d’autres villes.

(2) Voir la vidéo de 1 minute 30 de Gérard Filoche. Lire l’analyse très documentée de Sophie Béroud « Imposture de la démocratie d’entreprise »

(3) Les 2/3 des 48 millions de Français de plus de 20 ans sont opposés à la loi travail, soit 32 millions. Si seulement 10 % d’entre eux versaient en moyenne 10 euros (certains sont prêts à verser beaucoup plus), cela ferait un fond de soutien aux grévistes de 32 millions d’euros. C’est juste un calcul d’ordre de grandeur pour montrer que c’est tout à fait réaliste, avec de l’imagination et l’aide d’internet. Et 30 millions d’euros ça permet de compenser intégralement la perte de salaire pendant 2 semaines pour 30 000 grévistes, ou pendant 4 semaines pour 15 000 grévistes. Très largement suffisant pour bloquer bien plus que les raffineries (pas besoin de 100 % de salariés en grève pour empêcher la production).

Il est incompréhensible et démoralisant de constater qu’aucune collecte de soutien aux grévistes ne soit organisée à la fin des défilés. Faudra-t-il lancer une pétition pour exiger de Martinez et Mailly qu’ils soutiennent véritablement les grévistes dans les secteurs stratégiques, par des actes et pas seulement par des paroles ? A chacun de nous de les interpeller par tous les moyens à notre disposition.


URL de cet article 30460
  
AGENDA

RIEN A SIGNALER

Le calme règne en ce moment
sur le front du Grand Soir.

Pour créer une agitation
CLIQUEZ-ICI

Même Thème
Georges Séguy. Résister, de Mauthausen à Mai 68.
Bernard GENSANE
Il n’a jamais été le chouchou des médias. Trop syndicaliste, trop communiste, trop intransigeant à leur goût. Et puis, on ne connaissait même pas l’adresse de son coiffeur ! Seulement, à sept ans, il participe à sa première grève pour obtenir la libération de son professeur qui a pris part aux manifestations antifascistes de Février 34. Huit ans plus tard, à l’âge de quinze ans, il rejoint les rangs de la Résistance comme agent de liaison. Lui et les siens organisent de nombreuses évasions de militants (...)
Agrandir | voir bibliographie

 

Ce n’est pas la conscience des hommes qui détermine leur existence, c’est au contraire leur existence sociale qui détermine leur conscience.

Karl Marx

Le fascisme reviendra sous couvert d’antifascisme - ou de Charlie Hebdo, ça dépend.
Le 8 août 2012, nous avons eu la surprise de découvrir dans Charlie Hebdo, sous la signature d’un de ses journalistes réguliers traitant de l’international, un article signalé en « une » sous le titre « Cette extrême droite qui soutient Damas », dans lequel (page 11) Le Grand Soir et deux de ses administrateurs sont qualifiés de « bruns » et « rouges bruns ». Pour qui connaît l’histoire des sinistres SA hitlériennes (« les chemises brunes »), c’est une accusation de nazisme et d’antisémitisme qui est ainsi (...)
124 
L’UNESCO et le «  symposium international sur la liberté d’expression » : entre instrumentalisation et nouvelle croisade (il fallait le voir pour le croire)
Le 26 janvier 2011, la presse Cubaine a annoncé l’homologation du premier vaccin thérapeutique au monde contre les stades avancés du cancer du poumon. Vous n’en avez pas entendu parler. Soit la presse cubaine ment, soit notre presse, jouissant de sa liberté d’expression légendaire, a décidé de ne pas vous en parler. (1) Le même jour, à l’initiative de la délégation suédoise à l’UNESCO, s’est tenu au siège de l’organisation à Paris un colloque international intitulé « Symposium international sur la liberté (...)
19 
La crise européenne et l’Empire du Capital : leçons à partir de l’expérience latinoaméricaine
Je vous transmets le bonjour très affectueux de plus de 15 millions d’Équatoriennes et d’Équatoriens et une accolade aussi chaleureuse que la lumière du soleil équinoxial dont les rayons nous inondent là où nous vivons, à la Moitié du monde. Nos liens avec la France sont historiques et étroits : depuis les grandes idées libertaires qui se sont propagées à travers le monde portant en elles des fruits décisifs, jusqu’aux accords signés aujourd’hui par le Gouvernement de la Révolution Citoyenne d’Équateur (...)
Vos dons sont vitaux pour soutenir notre combat contre cette attaque ainsi que les autres formes de censures, pour les projets de Wikileaks, l'équipe, les serveurs, et les infrastructures de protection. Nous sommes entièrement soutenus par le grand public.
CLIQUEZ ICI
© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.