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Tribunal Russell sur la Palestine. Vers une intifada citoyenne

Au moment où le Tribunal Russell sur la Palestine (TRP) fut lancé, lors d’une conférence de presse en mars 2009 à Bruxelles, où de nombreuses personnalités, comme Ken Loach, Paul Laverty, Leila Shahid, Nurit Peled, Ken Coates, Jean Ziegler et Raji Sourani, étaient présentes, les objectifs du comité organisateur, présidé par Pierre Galand, étaient clairs : remettre le droit international au centre de la question palestinienne, renforcer les campagnes de la société civile par un aspect juridique et briser le mur du silence imposé par les médias de masse quand il s’agit de la Palestine.

Bien que n’ayant pas le pouvoir de changer à nous seuls les rapports de forces internationaux quant au conflit israélo-palestinien, nous pensons, plus de quatre ans plus tard, que le TRP a joué et continue à jouer un rôle important dans une lutte qui avant toute chose, appelle à l’égalité des hommes. Dans un contexte où les “négociations” et le “processus de paix” ne sont plus que des leurres agités par ceux qui ne veulent pas réellement d’accord et qui œuvrent avant tout pour que le statu quo reste en place (comprenez poursuite de la colonisation, du siège de Gaza...), recentrer le débat sur le droit international permet de prendre du recul et de revenir aux fondamentaux. Il est important de se rappeler qu’Israël et les États-Unis ont toujours tout fait pour que le droit international reste en dehors de toutes négociations. Ce qui en dit beaucoup quant à leur stratégie.

A travers la lunette du droit international, il (re)devient clair que la Palestine est occupée, mais aussi et surtout que le peuple palestinien dans son ensemble est soumis à une colonisation et à un régime d’apartheid sur lesquels la communauté internationale ferme les yeux alors qu’ils sont totalement prohibés et considérés comme crime de guerre et crime contre l’humanité dans le droit international. Il paraît indéniable que l’Europe et les Nations Unies ne jouent pas le rôle qui leur est attribué par leurs propres traités et lois, et que la passivité, voire le soutien actif qu’ils apportent au gouvernement israélien, sont répréhensibles. Enfin il apparaît clairement que les États-Unis sont un acteur central de la tragédie qui ne cesse de se dérouler, accordant à Israël une impunité totale un soutien politique, financier et militaire sans commune mesure.

Les faits étant établis, que pouvons-nous faire ? Le TRP appelle évidemment ces différents acteurs à se mettre en conformité avec leurs obligations légales. Les Nations Unies, à travers les rencontres organisées par le Comité pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien, ont bien relayé les travaux du TRP, mais il ne fait aucun doute qu’un véto des États-Unis au Conseil de sécurité frappera toute action allant dans le sens des conclusions du Tribunal. Il en va de même pour le Conseil des Droits de l’Homme où les conclusions des différentes sessions ont pu être présentées et ont donné lieu à d’importants débats.

L’Union Européenne a réagi via des courriers polis démontrant que la position de l’UE allait bien dans le sens du droit international mais chacun sait qu’aucune action significative ne sera convenue par les États membres pour faire appliquer cette position, qui est pourtant la seule possible. Soulignons quand même que les récentes “guidelines” de cette institution par rapport aux colonies sont les bienvenues mais ne sont pas encore suffisantes vu qu’elles n’abordent pas le commerce direct avec les colonies. Les États-Unis ont, quant à eux, préféré faire comme si le TRP n’avait jamais existé.

Quelques entreprises, plus sensibles à la manière dont elles sont perçues par le grand public, ont réagi à nos interpellations et certaines se sont même engagées à infléchir leurs politiques. Dans la lettre envoyée par le fonds de pension Hollandais PFZW au TRP, avant la session de Londres en 2010, il est en effet annoncé que “suite à un changement récent d’un des critères de référence utilisé par le fonds de pension pour réaliser ses investissements, le PFZW n’investit plus dans aucune des sociétés israéliennes mentionnées (dans la lettre envoyée par le TRP au PFZW)”. Depuis, PFZW s’est en effet complètement retiré des colonies. Attestant de la complexité et des polémiques autour de la construction du tramway de Jérusalem, le secrétaire général de Véolia annonça quant à lui que la compagnie comptait se désinvestir de ce projet.

Les réactions israéliennes ont évidemment été portées par les défenseurs de ce gouvernement et d’un système en place qui existe maintenant depuis des décennies, mais elles focalisaient bien davantage sur des questions de forme que sur des questions de fond. Nous avons été traités de “tribunal fantoche”, comparés au Ku Klux Klan ou à des tribunaux staliniens, d’être “unilatéraux” voire antisémites, mais aucune réaction n’a réelle- ment porté sur l’effectivité des violations du droit international commises par Israël et les complicités et manquements de la communauté internationale vis-à-vis de ces violations. L’accusation d’apartheid est celle qui a provoqué le plus de levées de boucliers mais, une fois de plus, en éludant le fond de la question. Les arguments en défense d’Israël étaient en effet axés sur le fait que le sort des Palestiniens n’est pas totalement comparable à celui des noirs d’Afrique du Sud. Or le travail du TRP écartait cette comparaison pour se concentrer sur le fait de savoir si Israël contrevient ou non à l’interdiction de l’apartheid tel qu’il est défini en droit international.

Face à ces réactions ou ces absences de réactions, nous savons bien que c’est à travers l’action citoyenne qu’il faudra continuer à agir. C’est bien celle-ci que nous avons contribué à renforcer. L’importance du relais de la société civile est d’ailleurs visible dans les modes d’actions soutenus par le TRP. Les individus, groupes et organisations sont invités à prendre toutes les mesures nécessaires afin d’amener les entités (Etats, entreprises, organisations internationales) responsables d’omissions ou de complicités à respecter leurs obligations légales vis-à-vis d’Israël et de la Palestine.

Les campagnes de Boycott Désinvestissement et Sanctions (BDS), celles dénonçant l’apartheid israélien, les mouvements palestiniens de résistance, les organisations agissant dans le sens de l’application du droit ont trouvé, dans les expertises présentées au TRP et dans les conclusions émises par le Jury, des arguments qui renforcent leurs positions et légitiment leurs actions.

Ces acteurs de la société civile auront aussi été galvanisés par le réseau impressionnant d’experts reconnus et de personnalités d’envergure qui s’est constitué autour du TRP. Ces derniers offrent en effet un gage de sérieux et de respectabilité qui permettent au TRP de toucher une audience plus large que celle qui suit habituellement les questions liées à la Palestine. Ainsi, quand Angela Davis s’engage à créer un comité d’anciens prisonniers politiques en soutien aux prisonniers politiques palestiniens, quand Roger Waters appelle d’autres stars de la musique à annuler des concerts en Israël, quand Michael Mansfield défend les conclusions du TRP sur le crime d’apartheid devant le Conseil des Droits de l’Homme ou quand Stéphane Hessel a parlé du TRP à une heure de grande écoute sur les plateaux de la télévision française, c’est un tout autre public qui est touché.

Il s’agit d’autant de preuves que la société civile peut et doit avoir une force d’indignation et d’action contre les injustices et que notre rôle à tous est primordial à une époque où les droits de l’homme, partout dans le monde, sont bafoués en toute impunité.

Les travaux du Tribunal Russell sur la Palestine, qui se sont terminés en mars 2013 à Bruxelles, auront contribué de manière radicale à renforcer le travail de tous ces citoyens, à travers le monde, qui se battent sans relâche, souvent dans l’ombre, pour que les Palestiniens puissent eux aussi, un jour, voir la justice faire son travail et enfin vivre en paix et en sécurité, comme tout être humain en a le droit.

Virginie Vanhaeverbeke et Franck Barat

»» http://issuu.com

Bruxelles - Mardi 22 - 20h. Débat : PALESTINE : POUR UNE INTIFADA LÉGALE ET CITOYENNE
Eng./traduction simultanée fr.

Comment mettre fin à l’impunité de l’État d’Israël et à la complicité de nos gouvernements par rapport aux violations avérées du droit international en Palestine ? Quel rôle pouvons-nous jouer en tant que citoyens ? Ce débat tentera de proposer différentes pistes d’actions pour venir à bout d’une injustice qui constitue un réel obstacle à une solution pacifique, équitable et durable au conflit israélo-palestinien.

Avec Frank Barat (coordinateur du Tribunal Russell sur la Palestine, éditeur e.a. de Palestine l’État de siège et Justice pour la Palestine), Nadia Farkh (coordinatrice de l’Association Belgo Palestinienne), Ilan Pappé (historien et activiste israélien, cofondateur du mouvement pour un seul Etat démocratique israélo-palestinien) et Rafeef Ziadah (activiste et poétesse palestinienne, membre du Boycott National Council à Ramallah). Modération : Benoît Feyt (journaliste).

Ponctuations artistiques avec Majid Bekkas (oud - Maroc), Manuel Hermia (bansuri, sax - Collectif Singing Palestine) et Rafeef Ziadah (poèmes).
Partenariat : Tribunal Russell sur la Palestine, Médecins du monde, Présence et Action Culturelles.

Débat organisé par Bruxelles Laïque asbl au Théâtre National et au KVS à 1000 Bruxelles [1]



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