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Il nous faut quelque chose de plus radical que des émeutes.

Grande-Bretagne : il est grand temps de faire une révolution (The Guardian)

"Les britanniques ? Ils ne sont pas faits pour travailler"

Le nom de mon incomparable et sclérosé professeur d’histoire était simplement McGuire, et ce n’est que bien plus tard nous avons découvert qu’il avait aussi un prénom.

J’ai toujours eu l’impression que ses périodes préférées de l’histoire étaient celles marquées par des soulèvements populaires, parce qu’il semblait prendre un plaisir presque lascif en décrivant les brutalités occasionnelles qui précédaient et suivaient des événements tels que les révolutions russe et française.

Quand il arrivait finalement au moment de la chute des anciens régimes dans ces pays, McGuire était au maximum de son dédain. L’ironie insouciante avec laquelle il racontait toujours les décapitations et éviscérations rendaient ces grands moments d’autant plus glaçants.

Au moins les Russes et les Français sont arrivés à leurs fins. En Grande-Bretagne, comme nous l’avons appris des sarcasmes sulfureux de McGuire, tout ce que nous avons réussi à faire sont quelques émeutes désordonnées et quelques comportements bougons dans des endroits tels que Spa Fields, Bristol et Manchester. Et, comme l’historien John E. Archer l’a souligné, beaucoup de ces émeutes avaient été menées à bien par des gens qui voulaient maintenir le statu quo, et non le renverser.

Les maux sociaux qui prévalaient en Grande-Bretagne au cours des 80 ans environ qui ont précédé la Grande Loi de la Réforme en 1832 étaient universels : pas de droit de vote, des aventures militaires interminables outre-mer uniquement destinées à enrichir l’aristocratie, des châtiments cruels et exceptionnels pour des infractions mineures, des salaires bas, des maladies très répandues et une faible espérance de vie. Tout cela à une époque où la Grande-Bretagne était la force géopolitique prééminente dans le monde et où la révolution industrielle rendait de nombreux propriétaires d’usines scandaleusement riches.

Les historiens en Russie et en France, et plus tard en Espagne, au Portugal et en Italie, peuvent tous remplir des étagères entières d’analyses et d’interprétations des révolutions et guerres civiles importantes qui ont changé le cours de l’histoire de leurs pays. Quant aux historiens en Grande-Bretagne, leurs seules querelles se limitent à quelques échanges grommelés et imbibés de brandy sur le niveau de danger que représentent les différents types de troubles dans le voisinage.

Les vraies questions auxquelles il faut apporter des réponses sont celles-ci : pourquoi n’y a-t-il jamais eu une vraie révolution en Grande-Bretagne ? Pourquoi, en effet, les pauvres de la Grande-Bretagne ont-ils simplement brandi leur pancartes : « A bas tout ça » ?

J’ai ma théorie à ce sujet. La Grande-Bretagne, le pays le plus belliqueux du monde, était dans un état de guerre presque constant au cours de 18e et 19e siècles. Lorsque nous n’avions pas nos propres guerres à mener, nous trouvions rapidement celle de quelqu’un d’autre dans laquelle nous embourber. La classe ouvrière n’avait donc tout simplement pas le temps de s’organiser correctement. Pour faire la guerre, il faut de l’argent et des pauvres. La Grande-Bretagne a toujours eu les deux en abondance. L’argent provenait de l’augmentation des impôts sur les pauvres qui voyaient la guerre comme une occasion pendant quelques années d’être nourris, logés et toucher un salaire, ce qui était plus que ce qu’ils pouvaient espérer en Grande-Bretagne.

Certains d’entre nous se posent les mêmes questions en 2013 : pourquoi, face à tant d’inégalités, de malhonnêteté de la part des entreprises, de brutalités policières et de corruption politique, nous contentons-nous de grogner et de faire de bonnes petites manifs bien ordonnées accompagnées de sandwichs bio et de poussettes ? Pourquoi continuons-nous à nous faire embobiner avec des jubilés royaux interminables, des JO inutiles et la militarisation rampante d’un pays dont les soldats sont traités comme des héros pour avoir combattu des guerres contre des pays du tiers-monde ?

D’autre événements de la semaine dernière - certains grands et nationaux, d’autres petits et locaux - ont illustré la profondeur des racines de l’inégalité sociale dans ce pays. Stephen Hester, le directeur général de (la banque) RBS, fut le dernier banquier en date à repartir avec une enveloppe nettement supérieure à ce qu’il a accompli. En effet, ce type a reçu un bonus de £6 millions simplement pour avoir collecté ces frais bancaires insidieux et corrompus autorisés par le gouvernement.

Au même moment, l’Institute for Fiscal Studies nous a dit que les travailleurs britanniques ont subi des réductions de salaire de l’ordre de 6% au cours des cinq dernières années. Il s’agit de la plus grande réduction jamais observée sur une telle période, et cela montre que pendant que la force du syndicalisme a diminué, le militantisme de gestion a augmenté.

Alors que Vodafone, Google, Rangers FC et des centaines d’autres grandes entreprises ont été autorisées à priver le trésor public de milliards en recettes fiscales, le gouvernement de Westminster reste concentré sur ce que les conservateurs ont toujours fait depuis des centaines d’années : pénaliser les pauvres.

Dans l’Ecosse du 21ème siècle, un nombre croissant de banques alimentaires sont mises en place. Vous avez bien lu, il y a encore des milliers de personnes qui n’ont pas de quoi à la fois se nourrir et nourrir leurs enfants, et le gouvernement écossais la semaine dernière a révélé que 150.000 enfants écossais vivaient dans la misère.

Beaucoup de ceux qui viennent chercher leurs boîtes de conserves ou paquets de pâtes ne sont pas les junkies-alcoolos fainéants que décrit la mythologie populaire de la droite. Selon un responsable d’une association caritative dans l’East End de Glasgow, avec qui j’ai parlé la semaine dernière, ce sont des gens qui doivent souvent accepter un salaire outrageusement bas simplement parce qu’ils ne veulent pas toucher les aides sociales. En hiver, ils seront à nouveau pénalisés lorsque le cartel des sociétés d’énergie entrera en action et qu’ils ne pourront se permettre de chauffer chez eux qu’une seule pièce.

Il n’y a pas si longtemps, ces personnes auraient pu se tourner vers le parti travailliste et les syndicats pour mener un combat, mais ces jours-là sont bien révolus. Aujourd’hui, la grève se résume à des arrêts de travail corporatistes d’une journée. Si les gens commencent à proférer des insultes ou à faire des gestes obscènes à des policiers qui seront deux fois plus nombreux qu’eux, ils se verront rassemblés et embarqués par des paramilitaires officiellement mandatés par le gouvernement.

Le parti travailliste, quant à lui, est tombé entre les mains d’une ribambelle d’arrivistes sans scrupules d’Oxbridge et leurs concubines écossaises parfaitement inutiles.

Le véritable surprise de l’édition 2011 des émeutes en Angleterre et au Pays de Galles n’est pas qu’elles aient eu lieu, mais qu’elles n’aient pas été plus nombreuses, qu’elles n’aient pas duré plus longtemps et qu’elles aient été si peu violentes. Oui, il est grand temps de faire une révolution en Grande-Bretagne.... mais peut-être que nous ne le méritons pas, tout simplement.

Kevin McKenna

Traduction "ah mince, il parlait de la Grande-Bretagne ? J’aurais pourtant juré que..." par Viktor Dedaj pour le Grand Soir avec probablement toutes les fautes et coquilles habituelles

http://m.guardian.co.uk/commentisfree/2013/jun/16/britain-needs-a-revolution

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