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Les leçons d’un ouragan

« Selon que vous serez puissant ou misérable ». On connaît la fable de Jean de Lafontaine. Il avait vu juste en son temps et cette phrase, d’apparence anodine, trouve dans les événements récents de sinistres échos. Tenez, par exemple, le traitement de Sandy.

Pendant plus de deux semaines, l’ouragan a dévasté des régions entières d’Haïti et de Cuba avant de s’abattre sur New York et plusieurs Etats US. Les grands médias européens, particulièrement français, ont réservé l’essentiel de leur temps d’antenne et de lignes imprimées aux retombées du déluge d’eau et de vents sur les Etats-Unis laissant volontairement de côté les deux premiers pays cités.

La discrétion sur Haïti, légèrement modifiée ces derniers jours, s’explique aisément : l’ouragan a ajouté un peu plus de misère à l’effroyable dénuement. Un million d’habitants totalement abandonnés et menacés de famine dans un pays ravagé qui attend toujours l’argent de la solidarité internationale recueillie après le tremblement de terre de 2010, cela n’intéresse pas le cynique rouleau compresseur médiatique.

Le silence entretenu sur les effets de Sandy à Cuba mérite une autre explication : la peur de dire la vérité. Face à la désespérante situation en Haïti, un des pays les plus pauvres du monde où travaillent des centaines de médecins cubains et à l’incapacité de la plus grande puissance économique mondiale de limiter les dégâts, Cuba apparaît comme un pays capable d’organiser la prévention (55.000 personnes évacuées) puis le retour à la vie en comptant sur ses propres forces dans le calme et la solidarité. Santiago de Cuba dévasté, des champs entiers de canne à sucre et d’autres cultures anéantis, des milliers d’habitations détruites mais pas d’alerte à la famine, pas de foules désespérées. Les « dissidents » officiels ayant disparu des radars, Cuba ne fait pas recette et Sandy semble nous dire que lors du passage d’un ouragan mieux vaut être Cubain que new-yorkais ou haïtien.

José Fort

L’Humanité, Cactus 8/11

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