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"Vous sentez-vous plus arabe ou plus américaine ?" : l’histoire de deux femmes détenues et interrogées à Ben-Gourion

Je suis citoyenne américaine. J’ai fréquenté des écoles américaines toute ma vie, je suis diplômée d’une université américaine et je travaille comme architecte à New-York. Pourquoi ceci m’est-il arrivé ? Tout a commencé par une simple question. "Quel est le nom de votre père ?"

"Bassam."

"Ok, attendez quelques instants dans la salle d’attente, là -bas, s’il vous plaît."

Je ne savais pas que le nom arabe de mon père ferait de moi une coupable jusqu’à preuve du contraire. "Quelques instants" se sont transformés en 14 heures de cauchemar à l’aéroport Ben Gourion, à Tel Aviv.

J’espérais qu’ils ne me sépareraient pas de mon amie Sasha, avec qui je voyageais. Nous avions été prévenues qu’il pourrait y avoir quelques interrogatoires et contrôles de sécurité mais on nous avait rassurées, nous étions jeunes, travaillant à New-York, nous avions des passeports américains, l’entrée en Israël ne devrait pas poser de problème. C’était ma troisième visite, et la première pour Sasha.

Sasha a été appelée pour être interrogée par une employée blonde décolorée et enceinte et a été conduite dans un petit bureau à gauche de notre salle d’attente. Vingt minutes ont passé avant que Sasha ne sorte, revenant rapidement à son siège.

Elle a essayé de me rassurer. "Ca va aller. Ils veulent juste voir si nous mentons sur quelque chose." Mais elle était à l’évidence troublée.

Maintenant c’était mon tour.

"Najwa, venez."

(...)

"Vous sentez-vous plus arabe ou plus américaine ?" m’a-t-elle demandé. J’avais répondu aux dix questions précédentes très calmement, mais à cette question, j’ai regardé l’agent de sécurité avec trouble et irritation. Elle ne devait pas être beaucoup plus âgée que moi - son tailleur et son expression sévère ne masquaient pas sa jeunesse.

- Je ne sais pas, je me sens les deux. Pourquoi ? Est-ce que ça a une incidence sur ma possibilité d’entrer ?

Elle a ignoré ma question. "Vous vous sentez sûrement un petit peu plus arabe, vous avez vécu dans beaucoup de pays du Moyen-Orient."

Je n’ai pas vu le lien. Je n’ai jamais éprouvé le besoin de choisir. "Oui bien sûr, mais j’ai aussi vécu aux États-Unis ces sept dernières années, et j’y suis née, alors je me sens les deux." Ma réponse n’a rien fait pour la convaincre.

"Hmm. Irez-vous à Al-Aqsa ?"

"Oui, peut-être."

"Irez-vous aussi voir des sites juifs ?"

"Oui, pourquoi pas ? Nous voulons tout voir."

"Mais vous êtes déjà venue ici deux fois. Pourquoi venez-vous maintenant pour la troisième fois ? Vous pouvez aller au Vénézuela, au Mexique, au Canada. C’est bien plus près de New-York, et bien moins cher !"

J’ai réalisé que la conversation ne menait nulle part. "C’est vrai, mais je voulais revenir ici. N’avez-vous pas des touristes qui reviennent plus d’une fois ?"

"Ici c’est moi qui pose les questions," a-t-elle répondu mécontente.

"D’accord, nous allons maintenant faire quelque chose de très intéressant !" Son visage est passé d’un regard sévère à un petit sourire. Elle s’est mise à taper "www.gmail.com" sur son ordinateur et a tourné le clavier vers moi. "Connectez-vous", a-t-elle demandé.

"Quoi ? Vraiment ?" J’étais choquée.

"Connectez-vous."

J’ai tapé mon nom d’utilisateur et mon mot de passe, complètement incrédule. Elle a commencé sa recherche intrusive : "Israël", "Palestine", "Cisjordanie", "International Solidarity Movement".

En y réfléchissant maintenant, je me rends compte que je n’aurais pas dû me connecter. J’aurais dû savoir que quoique je fasse à ce moment-là , rien ne pouvait changer ma situation, et que c’était une intrusion dans ma privée. Pourtant, toutes les questions, le sentiment que je devais me défendre parce que je voulais simplement entrer dans le pays, et le regard imperturbable des agents de sécurité m’ont donné l’impression que je n’avais pas le choix. J’étais inquiète, je laisserais Sasha tomber si je refusais et ce serait la raison de nos deux dénis d’entrer dans le pays.

Elle a passé ma boîte de réception au crible, lisant chacun des e-mails avec ces mots-clés. Il a lu des phrases à haute voix à sa collègue, rejouant de façon ironique et se moquant de vieilles conversations sur Google entre Sasha et moi sur notre futur voyage à Jérusalem. Je me tortillais sur mon siège.

Les autorités israéliennes ont une réputation notoire de déni d’entrée aux Palestiniens de toutes citoyennetés, et j’avais reçu toutes sortes d’avis, sollicités ou non, sur la façon de gérer le problème. L’agent de sécurité a ouvert l’e-mail d’un ami qui vit à Jérusalem, qui m’avait conseillé de me retirer des recherches sur internet. "Ils se sont mis récemment à googleliser les noms à l’aéroport," avait-il écrit. "Vois si tu peux t’enlever, c’est pas essentiel mais ça peut être utile."

Elle a trouvé ça particulièrement hilarant. En riant, elle a appelé sa collègue blonde et a relu la phrase d’un ton narquois. "Vous pouvez dire à votre ami que non seulement on vous googlelise, mais on lit aussi vos e-mails !"

J’étais on ne peut plus mal à l’aise, me demandant de quelle autre façon ils essaieraient de m’humilier. "Ok, je pense que vous avez assez lu !" ai-je dit. "Est-ce que vous faites est seulement légal ? Pouvez-vous s’il vous plait vous déconnecter maintenant ?"

L’agent de sécurité est devenue encore plus défensive. "Vous pouvez me demander de me déconnecter, mais vous savez ce que ça veut dire, d’accord ? Dites-moi de me déconnecter," m’a-t-elle nargué.

J’étais sans voix. Je me sentais complètement impuissante, furieuse et épuisée ; j’étais alors dans ma quatrième heure d’interrogatoire.

Après avoir lu plusieurs autres courriels, ils ont noté tous les noms de contacts, e-mails et numéros de téléphone qu’ils pouvaient trouver. Enfin, l’enquêtrice a dit, "Ok, vous pouvez sortir." Mais avant que j’ai pu éprouvé le plus petit sentiment de soulagement, elle a ajouté, "Bonne chance pour votre entrée en Israël."

Trois autres heures ont passé. Un homme grand et chauve s’est finalement approché de nous, tenant nos passeports. "Venez avec moi," a-t-il ordonné. Nous avons traversé le hall pour une autre salle d’attente, en face de deux petits bureaux.

"Là immédiatement, votre entrée en Israël est refusée." Malgré le pressentiment que j’avais en sortant de la pièce d’interrogatoire que mes heures dans ce pays étaient comptées, les mots m’ont quand même atteinte, avec déception, frustration et colère.

Sasha elle aussi. "D’accord, je veux un avocat," a-t-elle dit. "Et je veux appeler l’ambassade américaine, maintenant."

Nos demandes n’ont pas ébranlé le garde. "Oui, oui, appelez qui vous voulez, après la procédure." Et il est parti.

Nous avons observé ce qui se passait dans le bureau. Une grosse femme en uniforme, d’environ cinquante ans, prenaient des photos et les empreintes digitales d’un homme assis en face d’elle. Sasha a ensuite été appelée. La femme lui a dit de s’asseoir en face de l’appareil de photo.

"Attendez, avant que vous preniez ma photo, pouvez-vous me dire pourquoi vous le faites ?" a demandé Sasha.

"C’est la procédure. C’est comme ça que nous faisons en Israël", a répondu la femme, se retournant vers l’appareil photo.

"Vous me traitez comme une criminelle ! Je ne veux pas que vous preniez la photo," a dit Sasha. "On nous a déjà interdites d’entrée. Pourquoi faites-vous ça ?"

"Nous faisons la photo et ensuite vous attendrez dans un établissement jusqu’à votre vol."

Sasha insiste. "Quel établissement ? Notre vol est dans neuf jours ! Pourquoi nous interdit-on d’entrer ? Il faut que nous appelions l’ambassade maintenant !"

"Vous appellerez après la photo. Je ne sais pas pourquoi l’entrée vous est refusée. Mon boulot, c’est juste de faire la procédure. Quand je vais en Amérique, la même chose m’arrive. On me refuse l’entrée en Amérique," affirme la femme.

"Non," a répondu Sasha, "on ne vous la refuse pas."

Après qu’elle ait pris nos photos, nous nous sommes senties officiellement comme des criminelles. Et le fait que deux nouvelles gardiennes aient été maintenant affectées à notre surveillance constante n’a pas vraiment aidé à dissiper ce sentiment. Le plus humiliant était que chaque gardienne n’avait pas plus de vingt ans. Où que nous allions, elles étaient derrière nous. Même lorsque Sasha est allée aux toilettes, la garde de sécurité y est allée avec elle. Environ 30 minutes après, six autres gardes de sécurité nous ont entourées pour nous accompagner jusqu’à une autre pièce dans l’aéroport. C’était comme si tous les bergers étaient venus chercher deux petites brebis.

Nous n’avions commis aucun crime. Notre seul pêché était d’être nées de parents arabes. C’est alors que nous avons réalisé quelle vie protégée nous avions vécue. Nous avions bien sûr lu sur le profilage racial et entendu des témoignages de membres de nos familles et d’amis au collège, mais nous ne l’avions jamais vécu nous-mêmes.

Sasha et moi allions et venions anxieusement pendant qu’on nous faisait attendre dans le couloir. A un moment donné, j’ai tourné la tête et j’ai remarqué que les gardiennes montraient nos vêtements et admiraient le pantalon de Sasha. Et ça m’a frappé alors, pour la première fois, que ces gardes étaient en fait des filles jeunes, intéressées par la mode, comme nous. Dans d’autres circonstances, aurions-nous pu être amies ?

Elles nous ont conduit dans une autre pièce, peinte en blanc et avec une grosse machine de "détection des explosifs" intimidante. Les gardes ont commencé à ouvrir nos bagages et ont tout sorti, chaque vêtement, chaque tube de maquillage. Elles ont inspecté mon ordinateur portable et l’Ipad de Sasha, ont essuyé chaque élément avec un chiffon et les ont mis dans la machine. Tout a été passé aux rayons X et scanné, deux fois.

Après qu’elles se soient occupées de chaque élément de nos affaires, la fouille au corps a commencé. J’ai été emmenée à l’arrière de la pièce avec trois officiers de sécurité, un homme et deux femmes. La pièce était plus petite et fermée par un rideau. La femme plus âgée semblait former la plus jeune. Elle murmurait des instructions en hébreu tandis que la plus jeune me palpait. L’homme est resté juste devant le rideau à moitié ouvert. Elles ont scanné mon corps avec un détecteur de métal, et les boutons de mon jeans ont fait bipper l’appareil. "Enlevez votre pantalon," m’a dit immédiatement la plus âgée.

J’ai perdu ce qui me restait de sang-froid. "NON," ai-je répondu. "Nous sommes déjà interdites. Vous avez tout fouillé. Pourquoi faut-il que j’enlève mon pantalon après que vous m’ayez interdite d’entrée ? Je ne l’enlèverai pas."

"C’est comme ça que nous faisons en Israël," a répondu la femme sèchement. "Vous devez l’enlever."

"Et si je ne le fais pas ?"

"Alors quelqu’un le fera pour vous." Et ils sont tous sortis de la pièce.

Je me suis mise à pleurer et à trembler, un million de cauchemars différents me passant à l’esprit. Est-ce qu’ils allaient chercher davantage de gens pour me maîtriser ? Qu’est-ce qui allait bien pouvoir nous arriver ? Je voulais voir Sasha et ne pas rester seule une minute de plus, mais j’avais trop peur des conséquences si je quittais la pièce.

Les gardiennes sont revenues quelques minutes après avec un short pris dans ma valise. "Très bien," ont-elles dit, "Mettez ça."

Je l’ai enfilé, le visage plein de larmes. J’étais honteuse et mortifiée pendant qu’elle me palpait à nouveau tout le corps. Je ne me suis jamais sentie aussi humiliée, aussi avilie et aussi violée.

A la fin de la "fouille de sécurité", j’ai remis mon jeans et je suis revenue dans la pièce blanche. Ce fut au tour de Sasha d’être fouillée.

Lorsque ce fut fini, deux hommes des services de l’immigration sont arrivés, portant nos passeports.

"Maintenant on va vous emmener dans un établissement."

"Un établissement ? Vous voulez dire une prison ? Vous nous arrêtez ? Combien de temps allons-nous y rester ?"

"Ce n’est pas une prison. C’est un établissement. C’est là que vont les gens dont l’entrée dans l’État d’Israël est refusée."

Ils ont pris tous nos bagages et nos téléphones et nous ont conduit à environ 5 minutes de l’aéroport, dans un immeuble blanc avec une barrière. Toutes les fenêtres avaient des doubles barreaux et aucune des portes n’avait de loquet. Nous avons traversé les couloirs sombres et nous sommes passées devant des pièces ouvertes avec des lits superposés.

"Vous pouvez appeler vos parents depuis mon téléphone, pas les vôtres. Laissez vos téléphones ici. Mais si c’est un appel international, utilisez les vôtres. Votre vol de retour est à 8h demain matin," nous a dit le gardien.

Nous avons appelé nos parents, puis il nous a emmenées au deuxième étage dans une pièce où il y avait dix lits superposés, quatre femmes endormies, un évier, une salle de bains et une douche.

Nous avons fixé les lits pendant une minute avant de nous étendre. Les matelas semblaient faits de ruban adhésif, la pièce sentait l’urine et il y avait un drap gris et rêche sur chaque lit. Nous avons plié mon pull en deux pour en faire un oreiller et nous nous sommes allongées ensemble sur le lit de 90cm de large, regardant le fond de la couchette au-dessus de nous. "PALESTINE LIBRE, je reviendrai. Maryam, 2006" et "21 activistes pacifiques de Gaza détenus" étaient gribouillés sur le bois. Lire et relire ces phrase m’a donné un étrange sentiment de paix, et nous avons dérivé dans un sommeil agité.

Vers 5h du matin, le gardien est venu réveiller une Espagnole, dans le lit à côté du nôtre. "Lavez-vous la figure," lui a-t-il dit. Elle s’est levée d’un bon, s’est aspergée le visage d’eau et a attendu qu’il revienne et déverrouille la porte. Nous nous sommes assises avec anxiété sur le lit, en attendant que ce soit notre tour de partir.

A 6h15, un gardien est arrivé et nous a dit que l’ambassade des États-Unis nous appelait au téléphone. Mes parents les avaient appelés depuis la Virginie après nos deux minutes de conversation pour les informer de ce qui nous arrivait. Sasha a répondu. "Oh, Dieu merci, vous avez essayé d’entrer en contact avec nous ! C’est Sasha. Nous en avons vu des vertes et des pas mûres, ces dernières heures."

"Comme je l’ai dit hier aux parents de votre amie, nous ne pouvons pratiquement rien faire. Je suis quand même contente que vous puissiez prendre le prochain vol," a dit la femme tranquillement.

"C’est ridicule. Ils ont ouvert les courriels de mon amie. C’est légal ?"

"Eh bien, ils font ce qu’ils veulent. Nous ne pouvons rien faire. Ils sont dans leur pays, et ils ont leurs propres règles."

"Si seulement vous pouviez voir dans quelles conditions nous sommes. J’aimerais que vous veniez et que vous sentiez la pièce."

"Oh, je suis vraiment désolée, mais au moins vous allez prendre le prochain vol," d’une voix fâcheusement monocorde.

"Je n’arrive pas à croire que vous financiez ce système. Je comprends la relation spéciale qu’il y a entre l’Amérique et Israël, mais il y a clairement quelque chose qui ne va pas dans la manière dont nous sommes traitées."

"Eh bien, il y a beaucoup de choses qui ne vont pas dans beaucoup de systèmes." Il était clair qu’elle n’allait pas nous aider.

"Vous avez raison. Nous devrions tous juste nous asseoir ici et faire preuve de complaisance, comme vous. Bon, merci de nous avoir appelées." Et Sasha a raccroché.

Nous avions attendu cet appel désespérément, et la somme de frustration que nous avons éprouvée après l’avoir reçu était massive. Nous avions exigé plusieurs fois de pouvoir parler à l’ambassade américaine, espérant que le fait d’être Américaines nous donnerait une sorte de protection ou un peu de sécurité. Il n’y a pas de différence entre les citoyens en Amérique, pensions-nous naïvement. Certainement que l’ambassade des États-Unis allait venir à notre secours et exiger que nous soyons traitées comme des êtres humains. Certainement qu’ils vont chapitrer les Israéliens pour leurs pratiques révoltantes et exiger qu’ils agissent comme une démocratie qu’ils prétendent être.

Si nous avions été deux citoyennes américaines dans un "établissement" syrien ou iranien, la réaction de l’ambassade américaine aurait-elle été la même ? Obama lui-même n’aurait-il pas fait immédiatement une déclaration exigeant notre libération ? Si nous avions été des Américaines d’origine polonaise ou chinoise, aurions-nous été traitées de cette manière ? Les citoyens américains obtiennent habituellement un visa de trois mois dès leur arrivée. Pourquoi avons-nous été une exception ? Beaucoup de choses ne vont pas bien dans beaucoup de systèmes, mais quand nous finançons quelqu’un avec des milliards de dollars de nos impôts, cela veut dire que nous le soutenons.

Une heure après, qui nous a semblé une éternité, le gardien s’est montré. Il était maintenant 7h30, seulement 30 minutes avant notre vol. Cela n’a posé aucun problème puisque nous avons été conduites directement à la passerelle de l’avion. Nos passeports ont été remis au commandant du vol Air France. Lorsque nous sommes arrivées en France, trois policiers nous attendaient à la porte de l’avion, le commandant leur a donné nos passeports, et nous a conduites directement de l’avion à leur voiture de police.

"Est-ce que ça arrive souvent ?" a demandé Sasha.

"Tous les jours," a répliqué l’officier.

Najwa Doughman, Sasha Al-Sarabi

Source : Mondoweiss http://mondoweiss.net/2012/06/do-you-feel-more-arab-or-more-american-two-arab-american-womens-story-of-being-detained-and-interrogated-at-ben-gurion.html

Traduction : MR pour ISM http://www.ism-france.org/temoignages/-Vous-sentez-vous-plus-arabe-ou-plus-americaine-l-histoire-de-deux-femmes-detenues-et-interroges-a-Ben-Gourion-article-17056

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