Chaque fois que le dénommé « premier monde » déverse quelque part sur une côte africaine ses résidus hautement toxiques, en plus des morts et des dégâts qu’il provoque et qu’il laisse en attente pour plus tard, il invite ceux qu’il tue et ceux qu’il contamine à émigrer vers l’Europe et les États-Unis.
Chaque fois qu’après avoir épuisé les ressources de leurs propres fonds marins les grandes puissances expédient leurs flottes de chalutiers épuiser celles des zones de pêche de la Somalie et d’autres pays, elles invitent les populations qu’elles ruinent et affament à émigrer vers leurs modernes et démocratiques nations.
Chaque fois que les intérêts du marché additionnent ou soustraient des profits, font sauter ou mettent en place des gouvernements, redessinent ou déplacent des frontières, ils invitent ceux qu’ils divisent ou tuent à émigrer vers leurs énormes et populeuses cités.
Chaque fois qu’au nom du progrès, par notre indifférence ou notre bulletin de vote, nous ruinons leurs campagnes, pillons leurs ressources minières, volons leurs richesses, nous invitons les populations que nous spolions de leurs biens et de leurs droits à émigrer vers l’appartement laissé inoccupé tout près du nôtre.
Que cela nous plaise ou non, ces personnes sont vos invités. Et comme à tout invité respectable, puisqu’ils viennent et s’assoient à notre table, je leur demande seulement d’avoir la sagesse qu’ici nous n’avons plus, d’avoir la dignité que nous avons perdue, la raison que nous continuons à dénier, peut-être l’amour capable de contrebalancer cette haine qui nous habite. Je demande seulement leur aide pour mettre à bas l’hypocrisie, juguler l’avarice, bannir la fraude, retrouver la morale, réinstaurer l’éthique ; je leur demande de nous apprendre à partager, à être nature… et surtout, imaginons que cela soit possible, je leur demande de ne pas venir chez nous tuer des éléphants. (1)
Koldo Campos Sagaseta
Cronopiando
Rebelión
http://www.rebelion.org/noticia.php?id=148170
(1) Évidente allusion à l’information récente suivante : Juan Carlos de Bourbon, Roi d’Espagne, s’est fracturé la hanche alors qu’il participait à un safari en Afrique et chassait l’éléphant. Coût minimum du dit safari : 36 000 euros. Pendant ce temps, l’Espagne est plongée dans une des pires crises sociales et économiques de son histoire.
Traduit par Manuel Colinas Balbona pour Le Grand Soir