Les soixante-deux auteur(-e)s remémorent catastrophes et drames : la première marée noire d’ampleur suite au naufrage, le 18 mars 1967, du « Torrey Canyon » (3) entre les îles Scilly dans la Manche et la côte britannique ; l’accident de niveau 5 intervenu le 28 mars 1979 dans la centrale nucléaire de Three Mile Island près d’Harrisburg en Pennsylvanie ; celui de Tchernobyl, le 26 avril 1986 ; l’explosion, le 3 décembre 1984, dans l’usine chimique d’Union Carbide (4) à Bhopal en Inde (3500 décès sur le coup, 30 000 des suites des expositions à l’isocyanate de méthyle) ; l’attentat contre le « Rainbow Warrior », le bateau-phare de Greenpeace, le 10 juillet 1985, dans le port d’Auckland en Nouvelle-Zélande (le photographe portugais Fernando Pereira y périt) ou encore le trépas de Vital Michalon, le 31 juillet 1977, lors du rassemblement contre la construction du surgénérateur « Superphénix » sur le site de Creys-Malville dans l’Isère.
En septembre 1791, Olympe de Gouges lança sa « Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne ». En 1866, le biologiste allemand Ernst Haeckel forgea le concept « d’écologie », désignant, selon lui, « la science des conditions d’existence ». Le célèbre soleil rouge souriant sur fond jaune, l’emblème du mouvement antinucléaire, conçu par Anne Lund et Soren Lisberg, darda ses premiers rayons, le 1er mai 1975 à Aarhus (Danemark. En juin 1924, l’anthroposophe autrichien Rudolf Steiner jeta les bases de ce qui portera plus tard l’appellation « d’agriculture et de viticulture bio-dynamiques ». Prairial, la première coopérative de distribution et de vente de denrées alimentaires issues d’une production biologique, fut créée le 3 décembre 1971.
Parmi la multitude de livres mentionnés, le très subversif « Discours de la servitude volontaire » (5), concocté en 1548 par un garçon de dix-huit ans, Étienne de la Boétie, « Silent spring » de Rachel Carson (1962), une alerte très argumentée sur les dangers des pesticides qui entraîna en 1972 l’interdiction du DDT aux Etats-Unis, ainsi que « Limits to growth » (6) de Donella Meadows, Dennis Meadows et Jorgen Randers à la demande du Club de Rome, en mars 1972. Le Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat publia son premier rapport d’évaluation en octobre 1990, suite à l’Aperçu général, adopté le 30 août précédent, à Sundsvall (Suède).
Le numéro 1 de Silence, tiré à 700 exemplaires, sortit le 4 octobre 1982, avec notamment un dossier sur la biomasse. Le titre se réfère à la bande dessinée éponyme de Didier Comès et en contre-pied avec La gueule ouverte (7). Ses rédacteur(-trice)s placèrent le mensuel sous l’égide de l’écologie, des alternatives et de la non-violence. En accentuant l’évocation d’expériences et de projets résolument innovants, ils(elles) confortent leur engagement militant en faveur d’une écologie radicale et sociale, très éloignée des positions plutôt conformistes des Verts. Bannissant les notions de hiérarchie rigide, ils(elles) privilégient une approche « horizontale », alors que les partis et la plupart des mouvements, tenus par des leaders, s’articulent autour d’un programme figé et de structures ne laissant guère d’espaces à la créativité, à la diversité d’opinions. Réfutant toute prétention à l’objectivité, cette vertu faisandée dont se parent les grands médias, ils(elles) espèrent tisser des liens entre celles et ceux qui aspirent à vivre autrement en se muant en des insoumis(-ses) conscient(-e)s que le bonheur se trouve parfois à portée de main, que la « crise » est celle des places boursières, et non celle des sentiments.
René HAMM
Bischoffsheim (Bas-Rhin)
EN COMPLEMENT : Site de la revue Silence http://www.revuesilence.net/