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« Liberté pour la blogueuse Amina ». Mais « Amina » n’existe pas. (Il Manifesto)

« Libertà per tutte le Amina » (« Liberté pour toutes les Amina »). C’est le slogan que scandaient hier (vendredi 10 juin 2011), avec leurs pancartes pendues au cou devant l’ambassade syrienne de Rome, Marco Pannella et autres Radicaux toujours prompts à dénoncer les crimes des dictateurs arabes mais qui sont muets sur le droit à la liberté (et tous les autres droits, NdT) pour les Palestiniens qui sont depuis des décennies (6 décennies, NdT) sous occupation israélienne. Un sit-in au nom d’Amina Arraf Abdallah, 35 ans, alors que les doutes se renforcent non seulement sur l’arrestation mais sur l’existence même de cette enseignante d’anglais syro-étasunienne, auteur du fameux blog « A gay girl in Damascus » et qui sera aujourd’hui célébrée à l’Europride (11 juin, Rome, NdT).

Que la blogueuse soit un fantôme, même la presse occidentale commence à le croire, presse qui a fait la plus grande publicité ces dernières semaines aux comptes-rendus de massacres attribués aux forces de sécurité du régime de Bachar al-Assad ; massacres référés par des cyberactivistes et, donc, aussi, par la « fille gay de Damas ». Lundi, la presse avait rapporté, dans le monde entier, la nouvelle de l’arrestation d’Amina, enlevée, selon sa (présumée) cousine Rania Ismail, par trois jeunes énergumènes du Baath , le parti au pouvoir. L’énorme couverture journalistique avait été accompagnée par une photo de la jeune femme. Mais il s’est ensuite avéré qu’en réalité la personne de la photo est une jeune femme croate, Elena Lecic, qui vit à Londres, et pas Amina que personne n’a jamais pu rencontrer, officiellement pour des raisons de sécurité. « Je ne l’ai jamais vue » dit au manifesto la journaliste italienne free-lance Martina Iannizzotto qui, comme les autres (rares) reporters étrangers présents en Syrie, n’a pu interviewer la blogueuse qu’en lui envoyant ses questions par email. Iannizzotto ajoute qu’un jeune Syrien appartenant à la communauté gay de Damas, qu’elle a rencontré, dit n’avoir jamais vu la jeune syro-étasunienne. En outre, Sandra Bagaria, habitant à Montréal, qui s’était d’abord présentée sur Internet comme la partenaire d’Amina, a finalement déclaré ne l’avoir jamais rencontrée et n’avoir même jamais entendu sa voix.

La « fille gay de Damas » est une fiction.

Michele Giorgio

Edition de samedi 11 juin 2011 de il manifesto

http://www.ilmanifesto.it/area-abbonati/in-edicola/manip2n1/20110611/manip2pg/08/manip2pz/304754/

Traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio

NdT : On appréciera le récit fait par la « cousine », et publié sur plusieurs sites (sans rectificatif à ce jour) : « Rania O. Ismail, une jeune fille se présentant comme sa cousine, raconte l’évènement le jour même sur le blog d’Amina. « Aujourd’hui, à environ 6 heures du soir heure de Damas, Amina (...) était allée rencontrer une personne qui faisait partie du Comité local de coordination (…) C’est à ce moment qu’un groupe d’hommes, âgés d’une vingtaine d’années, l’a enlevée (...). Selon le témoin (qui veut rester anonyme) ces hommes étaient armés (…) L’un des hommes a alors bâillonné Amina avec sa main et elle a été violemment poussée dans une Dacia Logan rouge arborant un autocollant de Basel Assed [frère aîné du président syrien Bachar al-Assad mort en 1994, NDLR] (surlignage en gras NdT) (…) Les hommes sont présumés faire partie d’un des groupes des services secrets ou de la milice du parti Baas. On ne sait pas où est Amina, si elle est en prison ou détenue ailleurs à Damas. »… « On ne sait pas » grand-chose, dans le fond, dans ces récits de « cyberactivistes »… Le lecteur admirera en tous cas la perspicacité de la cousine blogueuse qui ne néglige pas l’indice crucial (repéré par le « témoin qui veut rester anonyme ») et fatal aux (« présumés ») « services secrets syriens » : l’autocollant sur le pare-brise…Et la photo de DSK, tant qu’on y est, non ?

Article sur Jeuneafrique.com : Syrie : Amina Arraf, la blogueuse fantôme

Apostille de la traductrice.

Dimanche 12 juin :

« Syrie : la bloggeuse Amina n’existait pas »

Après une semaine de controverse, coup de théâtre dimanche soir : dans un post intitulé "Excuses aux lecteurs", Tom MacMaster a confessé dimanche soir être le seul auteur de tous les posts du blog A Gay girl in Damascus, présenté depuis des mois comme celui d’une opposante syrienne homosexuelle. Lundi, un post du blog avait semé la panique puis le trouble sur la toile. L’auteur se présentait comme la cousine de la blogueuse. D’après elle, la jeune femme avait été kidnappée en pleine rue quelques heures plus tôt par trois hommes armés, "des membres des forces de sécurité". Depuis, des doutes étaient nés sur l’identité de la blogueuse ».

http://www.lejdd.fr/International/Depeches/Syrie-la-bloggeuse-Amina-n-existait-pas-329253/

Lundi 13 juin 2011 :

Haaretz (reçu de Michele Giorgio, NdT) rapporte les « excuses » de Tom MacMaster déclarant (extrait) qu’ « il ne pense pas avoir fait de tort à qui que ce soit [… mais] avoir créé une voix importante pour des questions qu’il pense essentielles [… et] espère que les gens auront plus d’attention envers le peuple du Moyen-Orient et leurs luttes en cette année de révolutions ».

Commentaire du journal : « Le véritable auteur du blog "A gay Girl in Damascus", T. MacMaster, qui est basé en Turquie (mais adresse ses messages depuis Edimburg, d’après le Washington Posdt, NdT), a présenté ses excuses mais affirme que son récit fictif est une véritable réflexion sur la situation sur le terrain en Syrie ».

La véritable réflexion sur « la situation en Syrie » a des chemins « really », « truly » tortueux. L’essentiel étant, comme dit l’autre, de n’avoir fait de tort à personne. Et surtout pas à la réalité « sur le terrain ».


EN COMPLEMENT :

Le Monde | 13.06.11 | 11h44 - Mis à jour le 13.06.11 | 17h39

Le mystère entourant l’identité d’Amina A., auteure du blog "Gay Girl in Damascus", a été levé dimanche 12 juin avec la révélation de la mystification par son auteur. Depuis l’annonce de sa disparition sur son blog le 5 juin, les journalistes étrangers et les cybermilitants cherchaient à découvrir qui était la blogueuse. Derrière Amina Abdallah Araf Al-Omari se cachait en fait Tom MacMaster, un Américain domicilié en Ecosse de 40 ans.

Etudiant quadragénaire, militant pour les droits de l’homme au Moyen-Orient, il avait créé en février le personnage de cette Syro-Américaine de 35 ans, professeure d’anglais à Damas, pour raconter ce que cela fait d’être une lesbienne en Syrie. Amina A. publiait régulièrement sur son blog des poèmes et des textes sur la politique, la révolte syrienne ou son homosexualité.

DES EXCUSES AUX LECTEURS

Pour toute une communauté d’internautes et de blogueurs, Amina A. était devenue une des voix incontournables de la contestation contre le régime de Bachar Al-Assad. Notamment depuis mai et une note intitulée "Mon père, ce héros", dans laquelle elle racontait comment elle avait échappé à une arrestation par les forces de sécurité, grâce au courage de son père. Cette note avait éveillé de premiers doutes sur la réalité des faits rapportés par la blogueuse et sur son identité. Personne, au sein de la communauté gay Damascène, ne semblait par ailleurs la connaître.

L’annonce de son enlèvement par des hommes armés, sur son blog, par une personne se présentant comme sa cousine a renforcé les doutes. Et lancé les journalistes dans un jeu de piste pour découvrir la réelle identité de la blogueuse syrienne.

Dans ce qui devrait constituer la dernière note de son blog, Tom MacMaster fait ses excuses aux lecteurs. "Je n’avais jamais espéré recevoir ce niveau d’attention,explique-t-il. Les événements là -bas sont déterminés par les gens qui les vivent au quotidien. J’ai seulement essayé de les mettre en lumière pour un public occidental." Son canular pourrait pourtant nuire à toute la communauté de blogueurs syriens, qui rapportent les expériences qu’ils vivent au quotidien, cachés derrière des pseudonymes, dans l’unique but de se protéger de la répression du régime de Bachar Al-Assad.

Hélène Sallon

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