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Quelle gauche contre la pensée d’extrême-droite ?

L’idée de base est que si l’extrême-droite se distingue toujours de la droite l’écart n’est pas si grand. Du coup, il semble bien revenir à la gauche et aux écologistes de repousser l’extrême-droite. Le propos ne distingue pas selon les partis politiques. Il reste non engagé de ce point de vue. Mais des exigences apparaissent. A chacun de se déterminer.

I - Comment repérer l’extrême-droite aujourd’hui ?

* Pointons d’abord une évolution

Que cette dernière est évoluée est un fait. Elle accepte le jeu démocratique (du moins en apparence) ; elle se montre moins sexiste que jadis car elle cultive moins qu’avant le culte de la virilité et les femmes ont fait leur apparition au FN. Pour autant le recours à la violence légitimée par l’Etat est un axe fort de son orientation. C’est plus un Etat policier et xénophobe qu’un Etat social et démocratique qui est plébiscité. La perte de ces caractères peut la rapprocher de la droite sarkozyste d’autant que la droite sarkozyste s’est aussi rapprochée de l’extrême-droite. Il faut donc aller plus loin.

* Soulignons des caractéristiques anciennes qui perdurent .

La pensée d’extrême-droite ne se caractérise pas simplement par sa critique des éléments allogènes de la nation. Sa spécificité est d’une part que cette critique est en général poussée très loin en terme de stigmatisation et d’exclusion mais aussi d’autre part qu’elle se fait du point de vue de la classe dominante qu’elle protège toujours. C’est pourquoi l’extrême-droite est nationaliste. L’extrême-droite ne saurait se présenter comme le bouclier politique des travailleurs salariés.

Ce n’est pas le cas de la gauche qui peut elle aussi se montrer critique de pratiques sociales ou religieuses mais d’une part il s’agit de critiques très ciblées (car les dominés reproduisent aussi de la domination) et non des critiques globalisantes et d’autre part, bien que ce ne soit pas toujours net, cette critique ne se fait pas au profit de la classe dominante et de son ordre injuste. Elle se fait du point de vue de ceux d’en bas, du peuple-classe et de l’émancipation humaine.

* Rapprochement avec la droite sarkozyste

Hors de l’extrême-droite, à droite, la tentative est grande évidemment de se rapprocher des thèses lepènistes car la droite est fondamentalement du côté des riches. Mais la droite libérale classique s’abstient en général de donner dans le racisme ouvert. Elle défend le libéralisme politique comme le libéralisme économique. A y regarder de plus près on peut lire tant chez De Gaulle que chez Chirac des positions racistes. Il lui arrive donc d’attribuer une nature ou une essence à des groupes jugés inassimilables.

La laïcité reformatée du FN n’est pas très éloignée de celle de N Sarkozy . Elle protège la subculture chrétienne et attaque uniquement les musulmans. C’est que cette laïcité s’articule plus à une vision d’un peuple ethnique qu’à l’idée de République et d’un peuple citoyen. Et la République, si elle vient à être invoquée, n’est pas comprise dans son esprit mais instrumentalisée pour l’exclusion.

II - Ce qui a fait le lit de l’extrême-droite

* Le champ économico-social sous l’effet du néolibéralisme.

Au sein du peuple-classe l’extrême-droite s’appuie beaucoup sur le capital national qui se moque de son origine pour se démarquer de l’Europe honnie des peuples. Mais les peuples critiquent surtout le défaut de législation sociale et le rabougrissement démocratique. Il s’appuie aussi sur le petit patronat et sur les professions libérales. Les salariés ne sont défendus que sous couvert de l’Entreprise et de ses dirigeants et :ou propriétaires. Jamais directement. Mais cela la droite le fait aussi. N Sarkozy s’appuie sur les entrepreneurs, soutien les riches et le MEDEF. Les impôts sont réduits dans leur fonction de justice et de répartition des richesses comme dans la fonction de ressource pour la constitution et le déploiement de services publics.

Plus gravement, ce sont les socialistes qui ont réhabilité l’Entreprise, comme entité fétiche au-dessus des rapports sociaux internes à l’image de la Nation unifiée par le mythe au moment même ou de multiples fractures sociales la clive. Ils ont aussi beaucoup privatisé et donc abandonné les services publics nationaux. La Sécurité sociale et la retraite par répartition est moins protectrice du peuple-classe car soumise aux exigences du capital financier.

* Les politiques d’accompagnement de ce cours néolibéral.

A ce cours économique néolibéral il importe d’ajouter les politiques discriminatoires et autoritaires. Ces dernières se comprennent fondamentalement comme accompagnement des premières de nature économico-sociale. Le temps des négociations pouvant profiter au monde du travail est révolu : " Il n’y a plus de grains à moudre ". La rentabilité du capital (cf Odile Castel) est devenu un impératif catégorique qui rabaisse la dignité humaine à un privilège pour une minorité et non plus à un universalisme possible.

Et ce qui vaut en interne vaut en externe : le soutien des dictateurs par les gouvernements de droite et de gauche a réhabilité un post-colonialisme au lieu d’affirmer une réelle auto-détermination des peuples à la suite des indépendances. L’impérialisme est toujours plus fort. Le franc CFA en est tout un symbole !

Enfin il y a la position par rapport à l’Union européenne qui peut aussi faire le lit de l’extrême-droite. Il faut compter avec les hésitations de la gauche par rapport à l’Union européenne. On la critique (1) mais on en sort pas ! Autre formule : On la critique et on veut la changer mais les vecteurs du changement sont faibles tant politiquement que syndicalement. Tout cela est très mauvais. La démocratie se manifeste rarement avec des élus très éloignés. Le social prend lui la figure de son inverse avec le concurrentialisme forcené.

III - Pour une gauche (et/ou des écologistes) anti-FN crédible !

2011 semble ouvrir une nouvelle période pour un nouveau pacte internationaliste au travers d’une triple rupture.

* Il va lui falloir d’abord initier une double rupture : l’une par rapport à N Sarkozy et l’autre par rapport à l’Union européenne.

Et tout cela n’est pas simple. Il va falloir remettre cette mauvaise politique néolibérale sur ses pieds avec plus de social et plus de démocratie et moins de discriminations racistes et moins de politique impériale.

Auparavant, notons qu’il existe dans la gauche et dans l’écologie une pensée campiste (pro Orient contre Occident donc inverse du "Choc des civilisations") et maximaliste qui à gauche défend les dominés bec et ongles, y compris ceux qui déploient des pratiques sexistes ou communautaristes voire racialistes (anti-blanc). Cet extrémisme du type Indigènes de la République est globalement repoussé par les organisations classiques de la gauche politique comme au sein de l’extrême gauche même si des débats y sont relancés constamment.

* La troisième rupture qui émerge : celle avec le pré-carré néocolonial.

Il s’agit bien pour la gauche de soutenir les peuples-classe du monde arabe. Nous espérons que ces peuples vont construire un Etat social, démocratique et laïque en capacité de conserver le meilleur de leur culture. Ce n’est pas à nous de dire de quel obscurantisme ils doivent se débarrasser. Nous ne leur ferons pas la leçon ! Pour autant, n’en déplaise à une certaine gauche campiste, nous ne soutiendrons pas les mouvements réactionnaires, ceux qui défendent au nom de l’islam la complémentarité des sexes et non l’égalité. Car au nom de a complémentarité les femmes doivent rester à la maison auprès des enfants et même ne sortir qu’accompagnées de leur mari (en plus d’être voilées). Les femmes célibataires et les femmes lesbiennes sont particulièrement stigmatisées et exclues. Ce sexo-séparatisme n’est pas défendable. Mais il existe contre lui un islam d’égalité et de justice sociale (2) qui peut servir d’appui au changement dans le monde arabe.

Christian DELARUE

Quelle gauche contre la pensée d’extrême-droite ?
Première contribution
http://amitie-entre-les-peuples.org/spip.php?article1590

1) Rappelons le fameux propos de Pierre Bourdieu : "L’Europe ne dit pas ce qu’elle fait ; elle ne fait pas ce qu’elle dit ; elle dit ce qu’elle ne fait pas ; elle fait ce qu’elle ne dit pas."

2) un fondement de la philosophie politique musulmane depuis plus d’un millénaire, depuis l’Epître sur la cité vertueuse d’al-Farabi, réapparu lors de la Renaissance de l’entre-deux-guerres au Liban et en Egypte

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