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Acharnement islamophobe de l’État français

Les derniers hommes de Guantanamo Rayan Freschi · 29 février Plus de deux décennies après leur arrivée, ils sont toujours là, abandonnés du monde entier ou presque. « Ils », ce sont les trente prisonniers à Cuba que les États-Unis laissent enfermés dans le camp d’emprisonnement et de torture qu’ils dirigent

Pessac, cas d’école de l’acharnement islamophobe de l’État

Au nom de la sécurité des Jeux olympiques et de la lutte contre l’antisémitisme, le ministère de l’intérieur s’est lancé dans une vague de contrôles administratifs, d’assignations à résidence et d’expulsions, bouleversant la vie de centaines de personnes, dont certaines n’ont jamais été condamnées. Parmi elles se trouvent plusieurs religieux musulmans dont les propos rétrogrades peuvent déplaire ; mais ils n’ont jamais été sanctionnés par la justice. Le président de la mosquée de Pessac, Abdourahmane Ridouane, a été quant à lui arrêté. Menacé d’expulsion après des années de harcèlement, son casier judiciaire est vide.

En plein génocide à Gaza, et alors que les sondages annoncent l’arrivée de l’extrême droite au pouvoir avec les élections législatives anticipées, le ministre de l’intérieur Gérald Darmanin décide d’instrumentaliser la question légitime de la sécurité pendant les Jeux Olympiques. Cinq mille cent musulmans sont placés sous surveillance.

Abdourahmane Ridouane, ressortissant nigérien vivant en France depuis plus de 35 ans, président de la mosquée de Pessac (Gironde) fait partie des personnes ciblées. L’État engage une procédure d’expulsion à son encontre, alors même que son casier judiciaire est parfaitement vierge. Son titre de séjour n’est pas renouvelé. Le 21 mai il est soumis à une mesure individuelle de contrôle administratif et de surveillance. Il est assigné à résidence avec obligation de pointer au commissariat tous les jours, sous peine d’emprisonnement. Le 4 août, le ministère prononce son expulsion du territoire français « en urgence absolue », et ce malgré l’avis négatif de la Commission d’expulsion. Quatre jours plus tard, Abdourahmane Ridouane est interpellé et placé en centre de rétention administrative (CRA) dans l’attente de son expulsion vers le Niger.

Parmi les accusations, une citation de De Gaulle

Les autorités l’accusent d’afficher « de manière constante, un mépris virulent vis-à-vis de l’État décrit comme raciste, islamophobe et colonialiste » et de véhiculer « une idéologie hostile aux valeurs et institutions de la République » à travers des publications qui « participent à la diffusion de messages à teneur antisémite et haineuse à l’encontre d’Israël et des Juifs ».

Le ministère pointe également la « publication de messages présentant le Hamas comme un mouvement de résistance ». Parmi ces messages se trouve une citation du général de Gaulle assurant qu’Israël a suscité contre lui « une résistance, qu’à son tour il qualifie de terroriste ». On y découvre aussi une déclaration définissant « le peuple palestinien [comme] des combattants, des résistants, dont fait partie le Hamas », prononcée lors d’un rassemblement de l’association Comité Action Palestine. Un autre message saluant la mémoire d’Ismaïl Haniyeh, chef du bureau politique du Hamas, qualifié de mouvement de « résistance », est également mis en cause.

Plus encore, le ministère reproche « de nombreuses ambiguïtés [car Ridouane] use d’une langue très soignée, emploie régulièrement les termes de "martyr", de "champ de bataille", ou de "bourreau" ».

Au nom de l’augmentation des actes antisémites depuis octobre 2023, l’État estime que ces propos « sont de nature à attiser les tensions traversant la société française ». Ridouane « pourrait inciter ses auditeurs au passage à des actes de violence physique ou verbale », à travers l’emploi volontaire d’« un vocabulaire guerrier ».

Un acharnement sans relâche

La mosquée de Pessac représente un triste cas d’école en raison du harcèlement raciste et de l’acharnement administratif qu’elle subit. Depuis 2015, des tags islamophobes ont été retrouvés sur les murs de la mosquée à plus de sept reprises. Des plaintes ont été déposées, en vain.

En octobre 2020, à la suite de l’assassinat de Samuel Paty, des perquisitions sont menées au siège de la mosquée et au domicile de son président, mais aucune poursuite ne sera engagée.

En 2022, elle avait fait l’objet d’une tentative de fermeture par la préfecture, dans le cadre de la politique dite d’« entrave systématique » mise en place par le gouvernement en février 2018 et qui a conduit à la fermeture abusive de plus de 1 200 établissements musulmans.

Les autorités lui reprochaient de promouvoir un « islam radical » et une « idéologie salafiste ».
La procédure échouera par deux fois devant les tribunaux, notamment devant le Conseil d’État qui mettra un point final à cette offensive le 26 avril 2022. Selon la plus haute juridiction administrative, la fermeture portait une « atteinte grave et manifestement illégale à la liberté de culte ».

Mais cette pression constante a récemment atteint un seuil critique inédit, l’État décidant d’évincer Ridouane en l’incluant dans son programme d’épuration du territoire des « extrémistes religieux ». Depuis l’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron en 2017, 734 musulmans ont ainsi été expulsés, accusés de porter des convictions politiques et religieuses dangereusement antirépublicaines. De nombreux imams étrangers en ont fait les frais. Mmadi Ahmada en 2018, Hassan Iquioussen en 2022 ou Mahjoub Mahjoubi en 2024 ne sont que quelques exemples de ce maccarthysme islamophobe capable de punir la citation d’une sourate coranique par l’expulsion.

Assujettir, museler, prévenir

Ainsi, l’expulsion d’Abdourahmane Ridouane n’est pas un épiphénomène. Elle s’inscrit dans les rouages d’un système né bien avant le 7 octobre 2023 et dont l’activité persécutoire se maintient malgré la crise politique actuelle. Le pouvoir fait flèche de tout bois et trouve dans l’actualité politique de nouvelles justifications, que cela soit la sécurité des JO ou la lutte contre l’antisémitisme – toutes deux légitimes. Mais les attaques du 7 octobre, volontairement décontextualisées, sont instrumentalisées afin de museler toute parole pro-palestinienne exprimée par des musulmans, transformés en « ennemis intérieurs » dont la prétendue ambiguïté discursive cache nécessairement un projet mortifère.

Cela permet à l’État de garantir le succès d’offensives administratives dont une partie avait été déboutée par le passé. Ridouane et la mosquée de Pessac eux-mêmes n’avaient jamais perdu devant les tribunaux. Cette période semble désormais révolue. Confondant à dessein le soutien à la résistance palestinienne avec l’antisémitisme et l’appel à la violence, le pouvoir réussit à catalyser une réaction punitive désormais quasiment systématiquement validée par le pouvoir judiciaire. Bafouant les droits de la défense, le ministère de l’intérieur a même exigé que des poursuites disciplinaires et pénales soient engagées contre l’avocat de Ridouane, maître Sefen Guez Guez, injustement accusé d’avoir entravé l’exécution de l’arrêté d’expulsion – ce qui a suscité une protestation du Syndicat des avocats de France.

Ici comme souvent, une mesure administrative vient punir un musulman dont on présume la dangerosité future du fait de ses convictions. Cette démarche préventive, typique de la législation antiterroriste et islamophobe, est souvent qualifiée de « pré-crime » en référence à l’œuvre de Philip K. Dick Minority Report.

Abdourahmane Ridouane se considère comme un prisonnier politique entre les mains d’une police administrative prédictive.

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