Ce que nous retenons en fait est que, après la mise sous tutelle du programme nucléaire iranien, les Etats-Unis veulent dans la foulée interdire toute recherche liée à la défense et à la sécurité de la République islamique. L’Iran menacerait-il la sécurité mondiale plus que ne le font les Etats-Unis et Israël qui échappent à tout contrôle indépendant ? On comprendrait, à la limite, que les Nations unies [nous entendons l’Assemblée générale de l’ONU, représentative de l’ensemble des pays du monde, non pas le Conseil de sécurité sous tutelle des cinq permanents] s’émeuvent d’un possible écart de la part de l’Iran des règles édictées en la matière par l’ONU dans le cadre de la Charte qui régit son fonctionnement.
On ne comprend pas qu’un Etat, aussi puissant soit-il, se substitue à l’institution mondiale et puisse interdire à un autre Etat ce qu’il se permet à profusion. Or, s’il y a bien un pays incontrôlable du point de vue de l’armement - toutes catégories confondues de l’arme conventionnelle aux armes atomiques et spatiales – c’est bien les Etats-Unis auquel vient s’associer... Israël. De fait, les Etats-Unis qui n’adhèrent pas aux principales conventions internationales sur les armes – telles que les armes à sous-munition, les bombes à fragmentation... – et disposent toujours d’un impressionnant arsenal d’armes chimiques et biologiques incitent en revanche les autres Etats à les parapher et/ou à s’en débarrasser.
Aussi, se pose la question devenue nodale : à quoi sert l’ONU ? En effet, à quoi sert l’ONU dont le rôle, pour ne citer que cet exemple, a été marginal dans les négociations avec l’Iran sur son programme nucléaire. Or, l’une des raisons d’être de l’ONU est d’assurer la paix et la sécurité du monde, des pays et de leurs peuples. Lors de la cérémonie de remise du prix Nobel de la paix en 2001, l’ancien secrétaire général de l’ONU, Kofi Annan, assurait : « Une instance a été créée – l’Organisation des Nations unies – au sein de laquelle les nations pouvaient oeuvrer ensemble pour affirmer la dignité et la valeur de chaque être humain et assurer la paix et le développement à tous les peuples de la terre. À l’ONU, les États pouvaient s’unir pour renforcer l’Etat de droit, mettre en lumière les besoins des pauvres et tenter d’y répondre, mettre un frein à la brutalité et à l’avidité de l’homme, protéger les ressources naturelles et la beauté de la nature, garantir des droits égaux aux hommes et aux femmes et assurer la sécurité des générations à venir », fin de citation. Certes ! Mais qu’en est-il dans la réalité ? On est loin, très loin, de cette vision idyllique d’un monde gouverné sous le sceau de la dignité et de la valeur humaines. Ce qui se passe en Syrie contredit ces propos marqués par un utopisme béat si l’on excipe du fait que l’ONU, outre d’avoir été incapable de mettre un terme à la spirale meurtrière au pays de Cham [tant en mettant Damas face à ses responsabilités mais aussi – sans doute surtout – en condamnant ceux qui ont armé, financé et incité à la rébellion (les Etats-Unis, l’Arabie saoudite, le Qatar, la Turquie...] n’a, en fait, aucun pouvoir sur ses pays membres et encore moins sur les cinq permanents du Conseil de sécurité (Chine, Etats-Unis, France, Grande-Bretagne, Russie) pour que son existence ait un sens. La réalité est donc tout autre si l’on infère du fait que l’ONU n’a aucune emprise sur Israël qui échappe à tout contrôle de ses agences spécialisées. L’ONU a ainsi suivi sans précaution ni réserve les maîtres d’oeuvres de la mise au ban des nations de l’Iran soupçonné d’avoir un programme nucléaire militaire, quand est ignoré l’arsenal nucléaire israélien, autrement plus dangereux pour la sécurité et la paix dans le monde.
La même ONU a été bafouée en 2003 – deux ans après la réception par l’ONU du prix Nobel de la paix – par les Etats-Unis qui ont envahi l’Irak, détruit ce pays et fait assassiner son chef d’Etat, ne tenant aucun compte du « niet » du Conseil de sécurité dont ils sont les membres les plus illustres. Aussi, malgré sa légitimité – ne serait-ce que du fait qu’elle représente l’ensemble des Etats du monde – nonobstant sa dimension intrinsèque d’organisation unique dans son genre, l’ONU n’est qu’un géant aux pieds d’argile. Tout le monde voyait dans l’ONU un gouvernement mondial. Il n’en est rien, bien entendu et la réalité est tout autre. Phagocyté par les grandes puissances – le terrorisme qui menace la sécurité du monde est avant tout une des armes de domination et d’hégémonie des Etats-Unis sur le monde – l’ONU n’est actuellement au mieux qu’un exécutant des desiderata des puissants, au pire un paravent pour tout ce qui depuis 1945 avait déstabilisé notre planète.
19 Janvier 2016