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Auteur : Rosa LLORENS

Où en est le cinéma palestinien ?

Rosa LLORENS
Au cours des dernières décennies, le cinéma israélien a occulté le cinéma palestinien, au même rythme que les colonies juives empiétaient sur le territoire physique palestinien. On ne pouvait donc que se réjouir de voir, dans le cadre de la quinzaine du cinéma du Proche-Orient, aux 3 Luxembourg, 5 journées consacrées à Gaza, la Palestine, Jérusalem (même si cette dissociation pouvait déjà faire tiquer). Mais la journée du 10 décembre, sur la Palestine, a illustré une tendance ( qui se traduit, sur le terrain, par le fait que, pour accéder à la Palestine, il faut d'abord passer par Israël), à filtrer les voix et images palestiniennes à travers le canal d'organisations juives (de même, le film Des hommes libres faisait passer l'idée que le seul héroïsme possible, pour un Arabe, c'est de sauver des Juifs). La séance de 18 H incluait une série de courts-métrages chapeautés par une réalisatrice israélienne : sans aucun avis ni excuse, 2 courts palestiniens sur 3 ont été remplacés (…) Lire la suite »

Les Intouchables : une "métaphore sociale"

Rosa LLORENS
On reste perplexe devant les gros succès de films français, partagé entre : "c'est certainement un film démago" et : "si tant de gens aiment, il doit y avoir une bonne raison". Dans le cas d'Intouchables, la perplexité s'accroît devant les réactions des revues les plus libéralement correctes, Les 'Inrocks et Libé : curieusement, leurs critiques ont, à la vue de ce film, redécouvert la lutte des classes et se sont scandalisés de le voir occulter la violence des rapports de classe ! A vrai dire, il suffit de lire le sujet pour leur donner raison : un jeune des cités est embauché comme assistant à domicile par un millionnaire tétraplégique ; tous deux vont s'épanouir grâce à l'amitié qui naît entre eux. Il reste alors à se dire que Libé et les Inrocks, dans leur obsession anti-populiste, ont raté un niveau d'analyse : le film est sans doute naïf, et le grand public le reçoit naïvement, mais il y sent peut-être la présence des valeurs qui sont à la base même de la lutte des classes : (…) Lire la suite »
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Les Balkans comme métaphore : à propos de La Nuit morave de Peter Handke

Rosa LLORENS
A l'heure où l'Allemagne se prépare, dans l'effervescence, à célébrer le 300ème anniversaire de la naissance de Frédéric II, le roi qui a fait de la Prusse une grande puissance européenne, l'Europe du Sud et de l'Est, vassalisée, sombre dans l'angoisse et la précarité. La Nuit morave, de l'Autrichien P. Handke, nous donne un tableau de cette déliquescence en même temps qu'il tente de trouver la force morale d'y résister (en attendant peut-être des résistances plus concrètes). Inévitablement, lorsqu'on parle de Handke, les jugements politiques se mêlent aux appréciations esthétiques. L'article de L'Express du 10/4/2011, saluant la publication de la traduction française de La Nuit morave, commence ainsi :"S'il suscita la polémique en raison de son soutien à Slobodan Milosevic, Peter Handke reste, quoi qu'il en soit, une plume européenne de premier plan". Comme les autres intellectuels qui ont osé contester la version unique des médias, Handke porte en effet le poids de l'anathème (…) Lire la suite »

Vers un 11 novembre hollywoodien ?

Rosa LLORENS
Venant 10 jours après la Toussaint, le 11 novembre était maussade, vraiment peu ludique, ringard, même. Comme on a essayé, voici une dizaine d'années, de coloriser et regonfler la Toussaint par une injection de Halloween,Nicolas Sarkozy veut maintenant rajeunir et dynamiser le 11 novembre par des implants de guerres plus fraîches et joyeuses. Mais cette association ne peut que dénaturer les commémorations du 11 novembre et supprimer ce qui en fait une journée d'émotion et de consensus national. C'est en effet une célébration tout à fait particulière, comme la 1ère Guerre mondiale (sur son front Ouest) elle-même : personne ne peut ressentir la première comme une fête de la victoire, ni voir dans la deuxième une guerre du Bien contre le Mal. L'évoquer, c'est penser aussitôt aux souffrances des Poilus des deux bords, mais aussi à la révolte des soldats contre la bêtise et l'inhumanité de leurs généraux ; il faut savoir gré à L. Jospin d'avoir réhabilité la mémoire des mutins, (…) Lire la suite »

L’Occident et ses fantômes

Rosa LLORENS

la Justice poétique contre la barbarie

Une des réactions aux dernières informations sur la mort de Kadhafi (qu'on n'ose même pas désigner plus précisément) me frappe : Safiya nous dit quelle est la sourate qui lui sert de consolation, L'Aube, je crois, qui se termine par un merveilleux quatrain d'amour mystique : "Quant à toi, âme rassérénée reviens à ton seigneur, agréante, agréée, entre au nombre de Mes (proches) serviteurs entre dans Mon Jardin" (sourate 89, traduction de Jacques Berque). Qu'avons-nous, dans le "monde chrétien", pour nous aider à nous consoler face à la suite d'horreurs à laquelle nous assistons impuissants depuis 1990, depuis le déchaînement sans limites de l'Empire ? Notre équivalent de la religion, c'est bien sûr l'Art : Ainsi, Lars von Trier, dans le prodigieux finale de Melancholia, arrive à nous consoler de la fin du monde. Je pense aussi au livre d'Alexis Jenni, L'Art français de la guerre, qui, plutôt qu'un "roman national" (comme on l'a écrit dans un magazine) est une élégie sur (…) Lire la suite »

L’obsession rouge brun, contre-partie de l’aveuglement au fascisme : l’exemple de Metropolis

Rosa LLORENS
Les chasseurs de fascistes "rouge brun" (ou autres coloris) ne chassent que des fantômes depuis que le sens de la notion de "fascisme" s'est noyé dans l'amalgame du "totalitarisme". Pour reprendre l'image d'un commentateur du site LGS, ils seraient incapables de reconnaître un fasciste assis dans leur salon. Je n'en veux pour preuve que le traitement du film de F. Lang, Metropolis (1927) ; seul film inscrit sur la liste des chefs-d'oeuvre de l'humanité de l'UNESCO, en reconnaissance de "ses valeurs artistiques et humaines", il fait actuellement l'objet d'une réédition, et d'une exposition à la Cinémathèque, qui propose en outre une rétrospective de l'oeuvre de F. Lang. F. Lang, qui s'est expatrié aux Etats-Unis en 1933, est donc un auteur consacré, et le considérer comme un humaniste fait partie du credo du politiquement correct ; on le défend constamment contre le moindre soupçon (d'autant plus facilement que ces soupçons n'apparaissent qu'indirectement, les arguments à (…) Lire la suite »
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Je n’irai pas voir Le Cochon de Gaza

Rosa LLORENS
Dans son livre : Le Bombardement éthique (2000), le philosophe italien Costanzo Preve analyse l'idéologie néo-libérale, dont il considère le judéo-centrisme comme le noyau. Avant de commencer son travail critique, il veut cependant écarter une formation idéologique qui se présente comme la continuation des Lumières et se donne pour but de démasquer "l'imposture" : le laïcisme. Certes, jusqu'au XVIIIe siècle, la religion fonctionnait comme légitimation d'un système social inégal et injuste (le système féodal) ; mais aujourd'hui, elle est devenue marginale par rapport au système de légitimation, qui s'est déplacé du terrain religieux au terrain économique. Aujourd'hui, les croyances religieuses sont, idéologiquement, inoffensives (même si elles peuvent toujours être instrumentalisées pour des raisons politico-économiques). Démasquer "l'imposture", aujourd'hui, demande qu'on s'en prenne à la croyance au marché, à la liberté d'entreprise (cf Ken Loach : It's a free world), à la (…) Lire la suite »

Des Hommes et des dieux, à la lumière de l’Art français de la guerre

Rosa LLORENS
Les films français présentés et, souvent, primés à Cannes ces dernières années pourraient se résumer à un titre générique, "Entre les murs" : Entre les murs (du collège) en 2008, entre les murs de la prison (Un Prophète, 2009), entre les murs du monastère (Des Hommes et des dieux, 2010), entre les murs du bordel (L'Apollonide, souvenirs de la maison close, 2011). Qu'est-ce que cette psychose d'enfermement nous révèle sur notre société ? Certes, elle correspond bien à la forteresse Europe, ouverte à tous les vents pour les capitaux et les marchandises, fermée aux hommes (criminalisation de l'immigration). Mais, parmi ces films, l'un, Des Hommes et des dieux, est plus particulièrement révélateur de la société française : comment ce film médiocre et, même, artistiquement et idéologiquement exécrable, a-t-il pu recevoir un accueil aussi enthousiaste du public français (plus, même, que des critiques) ? La sortie du livre d'Alexis Jenni, l'Art français de la guerre, nous fournit (…) Lire la suite »

Balada triste, Pain noir, et la guerre civile espagnole

Rosa LLORENS
La guerre civile espagnole revient dans l'actualité avec deux films simultanément sur les écrans français : Balada triste, d'Alex de la Iglesia, et Pain noir, d'Agusti Villaronga, deux auteurs "périphériques", l'un basque, l'autre catalan des Baléares. Chacun présente des aspects intéressants : Balada triste rappelle la nature du Valle de los Caidos, que les circuits touristiques, y compris ceux destinés aux classes des lycées et collèges, incluent sans aucune précaution - c'est comme si on faisait visiter Auschwitz à des élèves en les invitant à en admirer l'architecture. Ce monument a été construit à la gloire des vainqueurs fascistes par des prisonniers républicains travaillant dans les mêmes conditions que dans les camps de concentration nazis ; des milliers d'entre eux y ont laissé la vie. Quant à Pain noir, c'est une chronique de la vie dans les campagnes catalanes dans l'immédiat après-guerre civile (nous sommes en 1944) : là , les représailles contre les Républicains (…) Lire la suite »

Melancholia et Lars von Trier

Rosa LLORENS
Melancholia poursuit l'analyse de l'idéologie de notre société américanisée, de façon toujours aussi cohérente, et formellement novatrice. Comme Manderley était la suite de Dogville, Melancholia est la suite d'Antichrist : la même problématique, sous un angle différent. Dogville analysait l'idéologie puritaine anglo-saxonne sous l'aspect religieux (le protestantisme comme renoncement au christianisme, religion d'amour, et retour au dieu vindicatif et violent de l'Ancien Testament), tandis que Manderlay se centrait sur la traduction politique du puritanisme (un droitdelhommisme formel, indifférent aux contextes et conséquences réels). De même, si Antichrist analysait le rationalisme libéral comme obstacle à la compréhension entre les êtres, Melancholia montre qu'il nous empêche de comprendre notre environnement. Cependant, entre les deux démonstrations, il y a de nombreux points d'intersection : ainsi ce flacon de médicaments qu'Elle utilisait pour calmer ses angoisses alors que (…) Lire la suite »