Qui sommes-nous, qui sont les autres ? – Le ciment social fissuré

Dans une société où le ciment social se fissure et où les relations deviennent des champs de bataille, cette tribune explore le miroir de notre humanité : qui sommes-nous pour les autres, et que faisons-nous des autres pour nous-mêmes ? Un texte pour réveiller les consciences et appeler à une révolution nécessaire.

Rares sont ceux qui échappent à cette interrogation : « Qui suis-je pour les autres ? »

Et à côté, il existe une seconde, plus brutale, que tout le monde s’est déjà posée : « Que sont les autres pour moi ? »

Ces questions ne sont pas de simples caprices de conscience. Elles révèlent une vérité intemporelle : l’homme est fondamentalement social. Ibn Khaldoun l’avait écrit : al-insân madanî bi-l-ṭab‘. Mais dans une société malade, cette dépendance devient un piège.

Parole d’architecte : le ciment social d’aujourd’hui est biaisé. Il ne solidarise plus, il cloisonne. Il ne relie pas, il sépare. Comme un mortier mal préparé, il craque à la première tension et menace de s’effondrer. La société est construite sur un mélange vicié : le sable de la méfiance, le ciment du chacun-pour-soi, l’eau sale de la corruption. Rien qui puisse tenir dans le temps.

La relation sociale ressemble désormais à un vieux refrain : « je t’aime, moi non plus ». Les liens s’inversent, s’attaquent à eux-mêmes. Comme un organisme malade, nous avons développé des anticorps qui détruisent leur propre corps. C’est le syndrome de l’auto-immunité. Le capitalisme a introduit ce cancer au cœur des relations humaines, et le socialisme comme thérapie n’a pas été mis à jour. Résultat : nous errons entre un capitalisme-cancer qui prolifère et une thérapie dépassée incapable de régénérer les solidarités.

La bataille sera dure. Mais elle est indispensable. Non pas pour le confort de quelques-uns, mais pour le bien de toute une société. Elle portera un nom simple et terrible : la Révolution.
Elle s’attaquera à la médiocrité — celle qui s’est infiltrée dans nos institutions, nos discours, nos élites — et surtout à une droite qui se prétend « libérale », peut-être plus perfide que l’extrême, car elle dissimule ses crocs derrière des sourires et des statistiques.

Si l’humanité veut survivre, il ne suffit plus de colmater les fissures : il faut réinventer la matière même du ciment social. Retrouver le sens du lien, non comme soumission ou folklore, mais comme solidarité active et consciente. C’est ce chantier qu’il nous faut ouvrir. C’est cette révolution qui est urgente, vitale, indispensable.

Ilyes Bellagha, Architecte et citoyen engagé

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