RSS SyndicationTwitterFacebook
Rechercher
31 

Pour des négociations publiques et filmées... (qui sera pour, qui sera contre ?)

Je rebondis sur un incident récent autour d’un « représentant » des Gilets Jaunes, convié à Matignon, et qui est aussitôt reparti faute d’avoir obtenu que l’entretien soit « retransmis en direct à la télévision ». En voilà une idée qu’elle est bonne. En effet, depuis quelques temps déjà, il m’arrive d’animer des ateliers pour – en particulier – des syndicalistes. Ces ateliers portent plus précisément sur la bataille des idées et les médias en général. Et parmi les modestes suggestions que j’offre à des militants généralement plus aguerris que moi, est celle de refuser de participer à des négociations à huis-clos. Ceci pour plusieurs raisons.

La première est le constat que la « base » n’a le plus souvent aucune idée précise de ce qui se passe lors de ces mythiques « négociations ». Encore moins des rapports que les « négociateurs » d’en face, qu’ils représentent le gouvernement ou le patronat, tentent d’instaurer lors de ces séances loin des yeux et des oreilles de la population. Des séances qui feront ensuite l’objet de « comptes-rendus » présentés par les participants et répercutés par les médias. Des médias par ailleurs très majoritairement acquis au(x) pouvoir(s), lorsqu’ils n’en sont pas la propriété.

Car, dans les coulisses de ces pièces de théâtre sur-jouées avec toutes les variations, la réalité est plus crue.

Prenez par exemple une grande entreprise. Un conflit social éclate. Les représentants du personnel et les représentants de la direction se retrouvent face-à-face pour des « négociations ». Derrière ce terme de « négociation » se cache un ballet chorégraphié d’avance. Vous avez d’un côté des travailleurs engagés, le plus souvent avec des cœurs « gros comme ça », avec plusieurs années d’ancienneté et une représentativité - et donc légitimité - certaines, qui se retrouvent face à... quoi, exactement ? Pas compliqué (et corrigez moi si je me trompe) : en face d’eux, on trouvera des « connards de HEC (ou l’équivalent) », fraîchement débarqués, entre deux promotions, sans pouvoir de décision et pour qui l’enjeu réel n’est qu’une ligne de plus sur leur CV. Ils ne sont pas là pour faire avancer quoi que ce soit mais pour faire de la figuration.

Ils ont aussi eu tout le temps et moyens nécessaires pour préparer leur dossier. Ils usent et abusent de codes de langage et de techniques de communication apprises dans leurs écoles ou lors de séminaires. Ils savent faire semblant d’écouter. Ils savent comment faire enliser une réunion. Ils savent comment faire se dresser le représentant de telle organisation contre celui de telle autre.

Le déséquilibre dans ce face-à-face est flagrant. Le non-sens aussi. La réalité crue est qu’il ne s’agit que très rarement de « négociations », au sens où vous et moi l’entendons. Alors pourquoi se fatiguer à faire semblant ?

La deuxième est que l’écrasante majorité des travailleurs n’ont pas vraiment une idée de ce qui se passe en coulisses, ni de ce que subissent leurs représentants lors de ces réunions, sans parler de l’attitude de ceux d’en face. Présenté autrement : on ne sait à qui on a réellement affaire que lorsqu’on le voit réellement à l’oeuvre.

Et c’est suite à ces constats que l’idée a germé : exiger que les séances soient filmées et accessibles au public (réseaux sociaux ou autre). Les travailleurs n’ont rien à perdre et tout à gagner.

On verra bien qui s’opposera à une telle mesure, et en quels termes. Il est à parier que d’aucuns crieront à la démagogie, voire au populisme.

Et c’est à leurs protestations contre la transparence que l’on reconnaîtra ceux qui ont quelque chose à (nous) cacher.

Viktor DEDAJ
"allumez les projecteurs"

URL de cet article 34168
   
Même Auteur
Cuba sous embargo - paroles cubaines sur le blocus
Viktor DEDAJ
Instauré depuis 1962 par les États-Unis après un échec de l’invasion de l’île, le blocus non seulement pourrit la vie des Cubains mais constitue également une véritable insulte à la communauté internationale, laquelle, dans sa quasi totalité, le condamne chaque année à l’ONU depuis près de trente ans. Cette négation de la souveraineté des États et cette sanctification du droit d’ingérence par l’asphyxie constitue l’un des plus grands scandales de tous les temps. Dans le carnet de bord qu’il (…)
Agrandir | voir bibliographie

 

Croire que la révolution sociale soit concevable... sans explosions révolutionnaires d’une partie de la petite bourgeoisie avec tous ses préjugés, sans mouvement des masses prolétariennes et semi-prolétariennes politiquement inconscientes contre le joug seigneurial, clérical, monarchique, national, etc., c’est répudier la révolution sociale. C’est s’imaginer qu’une armée prendra position en un lieu donné et dira "Nous sommes pour le socialisme", et qu’une autre, en un autre lieu, dira "Nous sommes pour l’impérialisme", et que ce sera alors la révolution sociale !

Quiconque attend une révolution sociale “pure” ne vivra jamais assez longtemps pour la voir. Il n’est qu’un révolutionnaire en paroles qui ne comprend rien à ce qu’est une véritable révolution.

Lénine
dans "Bilan d’une discussion sur le droit des nations", 1916,
Oeuvres tome 22

© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.