Ainsi donc, à la question « voulez-vous que la Grande-Bretagne sorte de l’UE ? », une majorité de Britanniques a répondu « oui ». Aussitôt, les commentaires prévus et prévisibles se sont répandus dans les médias. Première préoccupation exprimée : cela ne risque-t-il point d’encourager d’autres peuples à suivre cette voie ? Deuxième préoccupation exprimée : que vont devenir les Britanniques, abandonnés à leur sort au milieu du jungle de la mondialisation libérale ? Pourront-ils trouver le chemin sans une directive de la Commission européenne ? Comment feront-ils pour manger si Jean-Claude Juncker n’est pas là pour leur expliquer comment qu’il faut faire ? Sauront-ils encore exploiter leurs néo-colonies si Cohn-Bendit n’est plus joignable au téléphone ? Oseront-ils aller bombarder en catimini un pays du tiers-monde sans inviter leurs anciens potes de l’UE ? Bref : Doux Jésus, Marie, Joseph... qu’allons-nous devenir sans eux ?
Oui, ça va être dur. Dur dans quelques années lorsque les Britanniques tenteront de traverser la Manche sur des embarcations de fortune pour rejoindre le Paradis perdu, leurs yeux implorants quelques miettes du festin que nous nous taperons lorsque ça ira mieux.
Mais tout n’est pas perdu. Ce soir, à la radio, un quelconque spécialiste a calmé le jeu en expliquant que les Britanniques ont simplement voulu exprimer leur colère et qu’ils finiront par se calmer et, bien-entendu, revenir à de meilleurs sentiments. Sinon, a-t-il encore expliqué, on attendra qu’une nouvelle génération de Britanniques entre en scène pour redresser cette erreur historique. De la vision à long terme, on peut dire qu’il en a, le spécialiste. Et de la détermination. Et de la constance. Et aussi pas mal de mépris.
Ce qui m’amène directement à la question suivante : pourquoi la volonté exprimée par une majorité de Britanniques pour sortir de l’UE serait-elle mieux respectée que la volonté exprimée par les Français qui ont refusé un projet de Constitution européenne ?
Il paraît qu’aujourd’hui, ce sont la xénophobes, les racistes et les populistes qui ont gagné. Oui, au cas où vous ne l’auriez pas remarqué, l’Europe est une grande fraternité antiraciste, anti-impérialiste, soucieuse du bien-être des peuples. Demandez aux Lobbies de la Pharmacie, de la Chimie. Demandez aussi aux Grecs, aux Libyens, aux Syriens, à nos amis néonazis Ukrainiens. Demandez aux 10000 réfugiés noyés en Méditerranée depuis 2014.
A l’instar de l’esprit « Je Suis Charlie » qui sert d’alibi à une constante érosion de la démocratie, de la liberté d’expression, de la liberté syndicale et qui a été plus efficace que tous les fachos en herbe du continent, le côté « antiraciste », « anti-xénophobe » et « fraternel » affichée par les Européistes et l’UE a fait plus de victimes que tous les racistes, xénophobes et populistes européens réunis. Ca, c’est du concret.
Dans ce monde qui marche sur la tête, il suffit d’ânonner « je suis de gauche » pour imposer à coups de 49.3 une politique de droite extrême contre la volonté d’une écrasante majorité de la population.
L’Europe qu’on nous présente comme un « contre-poids » et qui détourne l’avion de président Bolivien Evo Morales pour complaire au maître d’outre-Atlantique. L’Europe qui réagit aux écoutes de ses « amis » avec sa détermination politique habituelle. L’Europe, qui ne connaît comme remède à tous les maux que le nivellement et la déréglementation. L’Europe qui s’est plantée, se plante et se plantera mais qui persiste.
Alors, amis progressistes Européistes, en réalité, je vous le dis : votre projet de « changer l’Europe de l’intérieur » est voué au même échec que celui de « changer le PS de l’intérieur ». Dit comme ça, ça devrait être clair.
Et tout ça pour quoi exactement ? Pour quoi, concrètement ? Juste pour avoir la possibilité de traverser une frontière sans passer par un guichet de change ? Et à part ça ?
Autour de moi, le constat est cruel : aucun « pro-Européen » n’est capable de me donner un seul élément positif et concret apporté par l’UE.
« Est-ce que cela en valait le prix ? » leur demanderons-nous. « C’est un choix difficile », répondront-ils, « mais nous pensons que le prix... oui, cela en valait le prix ».
Et si cette dernière référence leur échappe, c’est qu’il est temps, grand temps, de sortir de cette maison de fous.
V. Dedaj