En quoi le régime actuel dénature l’ensemble des principes politiques de 1789 ?

Points de vue alternatifs

Si on devait s’interroger sur les permanences politiques dans le système politique français depuis 1789 on pourrait répondre instinctivement : la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, la souveraineté nationale, le suffrage universel et la démocratie (si on partait plus avant dans le temps). Ces principes apparaissent comme immuables ou devant découler naturellement des précédents dans l’évolution « normale » des choses. Ils n’en sont pas moins potentiellement victimes de dénaturation comme nous allons tâcher de le montrer.

Aristote : « Il est démocratique que les magistratures soient attribuées par le sort, et oligarchique qu’elles soient électives"

Montesquieu : « Le suffrage par le sort est de la nature de la démocratie. Le suffrage par le choix est de celle de l’aristocratie. Le sort est une façon d’élire qui n’afflige personne ; il laisse à chaque citoyen une espérance raisonnable de servir sa patrie. »

Introduction historique :

* La Loi est depuis la Révolution Française la source principale du droit (nous nuancerons cette proposition plus tard). Cette tendance était largement entamée quand le Roi a incarné pleinement la souveraineté. "La Nation réside entièrement dans le corps du Roi". La Révolution Française n’a fait qu’opérer un transfert de la souveraineté du Roi à l’entité abstraite qu’est la Nation. Elle a donné un "corps" à cette Nation, mais un corps abstrait.

La Nation "révolutionnaire", théorisée par Sieyès durant la Révolution Française s’est construite sur l’assimilation pleine et entière de la Nation au Tiers-État par opposition aux anciens ordres privilégiés. Ces ordres détruits, la Nation reste la seule à même d’exprimer la souveraineté : (DDHC article 3 : "Le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la Nation. Nul corps, nul individu ne peut exercer d’autorité qui n’en émane expressément"). Mais comment arrive t-on de la Nation, corps abstrait, à la souveraineté : autorité suprême concrète, pouvoir absolu de commandement concret ? Comment en arrive t-on à la loi, manifestation par excellence de cette souveraineté ?

* Se pose la question des modalités d’expression de cette souveraineté nationale :

- Le courant favorable à une exaltation de la représentation permettant aux "citoyens" (compris comme ceux qui payaient le cens) de confier aux "meilleurs" le soin de la gestion des affaires publiques s’impose. L’influence de l’élite des Lumières, comme Montesquieu, favorable à une aristocratie ; les tensions populaires qui effrayent les députés de la Constituante ainsi que la haute idée qu’il se faisaient de régénérer l’homme impliquait sans doute nécessairement de recourir aux meilleurs tout en favorisant l’ordre.

- Il en résulte un abandon du système du mandat impératif et la formation d’une volonté générale "nationale" au sein de l’Assemblée Nationale. Les citoyens n’ont plus rien à dire à leurs représentants qui s’expriment au nom de la Nation.
Sieyès synthétise clairement cette position dans un discours de septembre 1789 : "Les citoyens qui se nomment des représentants renoncent et doivent renoncer à faire eux-mêmes la loi ; ils n’ont pas de volonté particulière à imposer. S’ils dictaient des volontés, la France ne serait plus cet État représentatif ; ce serait un État démocratique. Le peuple, je le répète, dans un pays qui n’est pas une démocratie, le peuple ne peut parler, ne peut agir que par ses représentants. »

Le schéma est alors le suivant : La masse du Tiers-État qui forme la nouvelle Nation est maîtrisée au moyen du suffrage censitaire garantissant l’élection des "meilleurs", des plus aptes à s’élever au delà de leurs volontés propres pour faire émerger au sein de l’Assemblée Nationale l’expression de la volonté générale.

Ceci est un schéma général, la corruption existe, les intérêts peuvent converger, le débat peut être tronqué mais il y a cette réelle conception philosophique et cette haute image de la politique derrière.

Devant ce schéma il est légitime que la production législative issue du travail des meilleurs et inspirée de cette volonté générale soit glorifiée. La volonté de régénérer l’homme, l’exaltation de la Nation, une conception de la représentation idéalisée ne pouvait qu’amener à un légicentrisme dont l’admiration n’a pu qu’ancrer la représentation (qui avait accoucher de la Loi) dans la tradition juridique française.

[Au fil du XIXeme siècle, malgré les changements politiques cette haute conception de la loi est restée même si le rôle du Parlement a pu être diminué à certaines périodes, l’idée de représentation est toujours restée]

Interrogeons nous sur les évolutions survenues pour en tirer des critiques sur les grands concepts évoqués.

I- Évolutions :

* De nombreuses évolutions, mutations sont à prendre en compte

1° Le développement industriel a fait émerger divers courants de pensée à la source d’idéologies parfois contradictoires qui accompagnèrent et renforcèrent la constitution de partis politiques au début du XXe siècle (à "gauche" notamment). Le rôle de ces partis est devenu déterminant dans toutes les élections. Il y a eu une tendance au bipartisme

2° La plupart des états occidentaux ont adhéré à un modèle de "démocratie libérale représentative" dont on tâchera de cerner la nature.

3° Le développement d’entités transnationales (économiques ou institutionnelles (notamment en Europe)) ont fait émerger un débat sur la "souveraineté nationale". Ne serait-elle pas affaiblie ? On peut penser que oui dans la mesure ou le "pouvoir absolu" de commandement, d’exercice du pouvoir législatif ou exécutif semble être de plus en plus soumis à des contraintes supra-nationales.

La Constitution du 4 octobre 1958 pose en résumé les principes suivants : le principe de la République est le gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple. Les partis et groupements politiques concourent à l’expression du suffrage (étrange formulation que celle d’une concurrence pour simplement faire "s’exprimer" un suffrage) dans le respect de la "démocratie" et de la souveraineté nationale : celle ci "appartient" au peuple qui l’exerce par l’intermédiaire de ses représentants (ou du référendum). Nous sommes donc clairement dans un système représentatif qui n’évoque plus que le référendum comme moyen d’intervention direct du peuple. Notons également qu’il n’est plus fait mention de la volonté générale. Le Préambule réaffirme son attachement aux principes de 1789.

L’ère de l’information et des médias de masse à bouleversé les méthodes de communication politique classiques et le temps politique de manière général. Le processus de conquête du pouvoir et la perception de la grille politique a également subi l’influence de "l’information".

6° Si le domaine de la loi n’est plus absolu (du fait des objectifs de renforcement de l’exécutif poursuivi par la Constitution de 1958), elle reste l’instrument politique incontournable de la Ve République de part sa symbolique, sa plus grande normativité et sa portée médiatique. L’inflation législative semble irréversible tant les habitudes semblent ancrées.

7° Le suffrage universel masculin puis le suffrage universel y compris pour le Président de la République donne en théorie sa pleine influence à la "démocratie" et à la "représentation" en supprimant les ambiguïtés éventuelles puisque les citoyens électeurs et représentés forment alors par fiction l’intégralité du corps social citoyen.

L’alignement des scrutins présidentiel et législatif "personnifie" le second par continuation du premier.

La discipline de vote est la norme depuis le début de la Ve République. Elle s’apparente à une forme d’"autodiscipline", c’est à dire une sorte de processus mental destiné à créer des habitudes de pensées, d’action et de langage pour atteindre des buts. Néanmoins elle ne peut se résoudre à une simple autodiscipline sans des instances supérieures ayant intérêt à harmoniser les divergences (partis, groupes parlementaires, gouvernement etc...). Une thèse récente évoque une comptabilité avec les principes du régime représentatif par une lecture renouvellée du régime parlementaire fondée sur la "fusion des pouvoirs". Cette nouvelle formulation pose question.

II- La dénaturation des concepts.

Tous ces éléments se mèlent pour bouleverser les représentations classiques des concepts fondateurs. Il convient donc de poser certaines définitions pour les nuancer dans un contexte renouvelé.

La démocratie : "Autorité du peuple", et kratos, pouvoir, autorité. La démocratie est le régime politique dans lequel le pouvoir est détenu ou contrôlé par le peuple (principe de souveraineté), sans qu’il y ait de distinctions dues la naissance, la richesse, la compétence... (principe d’égalité). Coexistent ainsi la souveraineté du peuple (ou de son émanation, la Nation) directe ou indirecte par des moyens de contrôles. "La démocratie consiste dans l’exercice, soit direct, soit indirect, du pouvoir par le peuple. Cette organisation politique implique un état social caractérisé par le fait que tous sont égaux devant la loi, que tous possèdent les mêmes droits. Les fonctions sont accessibles à tous, les citoyens devant être appelés à la vie intellectuelle et morale, et de plus en plus mis en état d’exercer, d’une façon efficace et raisonnée, la part de pouvoir qui leur est attribuée, l’État démocratique a l’obligation d’instituer des oeuvres d’instruction et d’éducation, et des oeuvres de solidarité. Le régime démocratique a pour instrument le suffrage universel et pour cadre plus particulièrement approprié la forme républicaine » (Définition de l’Encyclopédie Larousse 1929). Se croisent alors l’exercice du pouvoir par le peuple, l’égalité mais également la "mise en état" d’exercer la part du pouvoir. Cela passe principalement par le vote. On lui adjoint divers principes : Règle de la majorité, État de droit, présence d’un texte fondamental, pluralité des partis politiques etc...).

La démocratie est un concept instrumental dans la mesure où peut lui être attribué de très nombreux sens : (De l’exercice direct par le peuple à une simple compétition entre appareils politiques de quelques partis...).

- La démocratie libérale, construite par opposition aux "démocraties-populaires et autoritaires" durant la Guerre froide conserve une pertinence importante à mes yeux dans la mesure ou l’idéologie politique libérale est aujourd’hui omniprésente dans les États occidentaux. Le libéralisme politique dans sa dimension de protection des libertés individuelles peut s’opposer à au principe d’égalité présent dans la démocratie. Néanmoins le débat est somme toute assez théorique dans la mesure où la protection des libertés individuelles n’empêchent a priori pas tous les individus ou groupements de faire entendre leur voix. Cette protection peut néanmoins être source de frictions dans l’argumentaire qu’elle permet de développer face à une mesure considérée comme portant atteinte à une liberté.

- La démocratie représentative est une conception récente dans la mesure où démocratie et aristocratie étaient à l’origine clairement distinguées selon le processus de désignation. Ces anciennes barrières ayant sauté on désigne par démocratie représentative la forme de démocratie où les citoyens expriment leur volonté par l’intermédiaire de représentants élus à qui ils délèguent des pouvoirs et qui ont en charge de représenter l’intérêt général et éventuellement de contrôler le gouvernement (au nom du peuple).

Concernant la démocratie (représentative), on atteint très rapidement des limites conceptuelles dans la mesure où la démocratie résulte de l’acte de représentation, tandis qu’elle était le signe aristocratique par excellence dans le contexte de la Révolution. Le suffrage universel permet théoriquement de faire tomber cette barrière puisque l’intégralité du corps social peut normalement participer à l’élection, on présume ensuite que les représentants agissent dans l’intérêt général (ce qu’on peut légitimement nuancer (cf : III- Questions) alors que c’était le point fondamental de la représentation issue de la Révolution Française. On a ainsi un renversement net concernant la notion de démocratie représentative : la démocratie résulte d’une dimension processuelle qui fait normalement émerger "les meilleurs" ; tandis que la "représentativité" de l’ensemble du corps social et de la Nation n’est plus réellement garantie.

La souveraineté se distinguait classiquement entre souveraineté populaire (via des mécanismes d’intervention directe) et souveraineté nationale. Aujourd’hui on peut avancer que la distinction n’existe plus réellement, voire même que ses notions sont dépassées. En effet la souveraineté populaire est résiduelle car vaincue par la captation instrumentale de l’expression populaire à travers la représentation. Tandis que les représentés ne sont plus réellement les représentants de la Nation pour diverses raisons (technicité, manque de connaissances, incapacité à s’élever au dessus des querelles politiques, logique d’opposition favorisée par le bipartisme ou oppositions favorisant le bipartisme, intérêts politiques, existence médiatique, transferts de souveraineté, ambition personnelle, logique de parti, lobbying, corruption etc...).

La représentation : Dans la logique de la Révolution française, celle ci ne se concevait que dans un seul sens : la représentation de la Nation. Ce qui impliquait deux conséquences : la représentation du "voeu national" et la production d’une norme : la Loi qui soit l’expression de la volonté générale au sein de l’Assemblée.

Aujourd’hui, la représentation se confond avec la représentativité, c’est à dire le caractère de ce qui est représentatif, c’est-à -dire qui représente bien les choses ou les personnes d’un ensemble plus large, de la même catégorie, ayant les mêmes caractéristiques. Dans le système actuel, le parti au pouvoir bien que prétendant représenter l’ensemble des français, représente en réalité l’électorat qui l’a élu en choisissant un programme. Il y a un paradoxe à ce que la démocratie désigne l’élection des personnes en charge de mettre en oeuvre un projet déjà clairement défini sur lequel il n’y aura eu aucune influence populaire. C’est un peu comme élire les membres d’un jury en sachant le classement qu’ils feront. Alors qu’ils sont censés débattre, faire émaner ce qui leur apparaît comme étant une volonté générale, ou l’intérêt général, (la qualité dans le cadre d’un jury), ils sont la pour mettre en oeuvre un programme prédéfini.

Il ne peut y avoir aucune représentation de l’intérêt général au sens de la Révolution Française du terme dans un tel schéma (hormis sur des sujets consensuels). La question de la représentativité socio-économique dans les assemblées est un leurre symbolique dans la mesure ou ce n’est pas en mettant un décalque de la société française dans la majorité parlementaire que le programme sera différent.

On assiste à une dénaturation du système représentatif par l’effet des partis qui font du Parlement un simple espace de justification de projets déjà connus dans leurs lignes face à une opposition qui tâche d’exister (et de faire bruit) et non un espace de débats et d’émergence d’une volonté commune. Le "voeu national" révolutionnaire qui devait être construit, devient une simple alternative binaire (dans un système bipartisan). <=> (On entend souvent les politiques dire : J’applique cette mesure car les français ont voté pour) Celle-ci s’explique principalement par le système du bipartisme d’une part et est légitimé par le suffrage universel.

Le suffrage universel : C’est suffrage où le droit de vote est accordé à tous les citoyens qui ont la capacité électorale.Le suffrage universel cherche en théorie à associer le plus grand nombre possible de citoyens au fonctionnement du système politique et au choix de leurs dirigeants. Dans un régime démocratique, le suffrage universel est théoriquement le fondement de la souveraineté populaire dont il est le moyen d’expression, et de l’égalité entre tous les citoyens dont chacun détient une parcelle du pouvoir.

Néanmoins on peut penser que le suffrage universel participe de la dénaturation de la représentation, donc de la souveraineté et donc de la démocratie. En effet, le suffrage universel permet de justifier la fiction de la représentation au moment de l’élection et donc d’identifier le projet porté par la majorité des suffrages exprimés au "voeu national". L’expression de la volonté générale n’a donc plus lieu dans l’Assemblée mais au moment de l’élection ou le choix du projet est fait : l’Assemblée est l’endroit ou la discipline parlementaire s’exerce pour transformer un projet en normes juridiques.

En clair, la détermination de la volonté générale recule d’une étape, elle est faite en amont, hors de tout contrôle "démocratique" au sens de contrôle populaire. Choisir un architecte selon qu’il construira la maison en bois ou en pierre ne fait pas dessiner les plans et n’est pas non plus identique à élire un congrès d’architectes qui déterminera la meilleure solution.

Dans le système de l’Ancien Régime, le suffrage "restreint" était destiné à ce que les plus "éduqués" (mesuré par le critère de la richesse : rien de très étonnant dans un système libéral) choisissent ceux qu’ils considèrent comme meilleurs pour des affinités idéologiques, une proximité intellectuelle, mais rarement pour un vrai "programme". On peut trouver des vices à ce système : Toujours est-il que le choix d’un projet suffisamment détaillé en amont du processus législatif subvertit l’alchimie créatrice de la volonté générale qui doit normalement émaner des représentants. Cela est rendu possible par la dénaturation de la notion de majorité.

La majorité : La majorité qui désigne dans son sens général le plus grand nombre était normalement l’objectif à atteindre pour identifier un consensus de volonté politique. La volonté générale s’exprimait par la découverte raisonnée d’un consensus politique.

Aujourd’hui la majorité a une double nature :

- C’est le prétexte, dans le cadre du suffrage universel, à la dénaturation de la représentation par l’illusion que la majorité est déjà trouvé pour toutes les mesures ou orientations du projet choisi.

- C’est le moyen, à travers la majorité parlementaire, pour préparer sans réelle déviation du projet initial les normes juridiques en adéquation avec le projet choisi.

Conclusion partielle :

Bien qu’affirmant son attachement aux principes de 1789, la Constitution de la Veme République, en traduisant des réalités mouvantes, a en réalité dénaturé tous ses principes. En reconnaissant des acceptions différentes, en retournant les logiques anciennes...

On peut identifier le schéma suivant :

Le suffrage universel permet de remplir théoriquement la condition démocratique de la démocratie représentative.

En réalité, en mobilisant la double nature du concept de majorité pour confondre "voeu national" et choix d’un projet, le suffrage universel "démocratique" prive le peuple d’un réel contrôle sur le pouvoir. D’une part, le Parlement, qui devrait résulter d’une recherche de consensus se transforme de plus en plus en exécutant d’un projet législatif. D’autre part les mécanismes de contrôle du gouvernement sont laissés aux représentants dont on voit que le système politique les pousse à l’autodiscipline. En ce sens la souveraineté n’existe pas vraiment puisqu’à aucun moment le peuple n’a eu d’autres potentialités d’expression qu’une alternative. Une alternative de projet élaboré dans l’appareil d’un parti n’est pas un choix. On peut donc conclure que sur un plan purement politique nous ne sommes pas en démocratie au titre des éléments de définitions principaux*.

* Concernant les éléments secondaires :

- On peut remettre en question l’État de droit au titre de la manière dont la norme est produite.

- On peut remettre en question la liberté des individus au titre de leur liberté à exercer pleinement leurs droits politiques (Je garde pour plus tard la "liberté" de l’individu. Concept défensif face à la tentation égalitaire (signe de la démocratie libérale) plutôt que potentialité de réalisation).

- L’existence d’une Constitution et d’une juridiction associée est belle et bien présente (la critique porte alors sur la modalité de l’adoption de celle ci et de l’indépendance des juges constitutionnels)

- La séparation des pouvoirs n’existe que parce qu’ils sont encore appelés différemment : on pourrait en grossissant le trait considérer qu’il ya un pouvoir judiciaire prisonnier de l’État de Droit et de la hiérarchie des normes et un pouvoir normatif d’inspiration nationale ou supranationale (Cf : la thèse qui parle de fusion des pouvoirs).

- La consultation régulière du peuple impliquerait un choix et non une alternative. L’alternative est masquée derrière un pluralisme dénaturé par constructions médiatiques : La grille "extrême gauche - gauche - droite - extrême droite" revient clairement à catégoriser inconsciemment les partis qui en "relève" comme extrémistes. L’extrême fait toujours peur. La présentation gauche-droite marginalise le centre.

Avec une métaphore disons que le traitement médiatique de La grille politique française revient à dessiner un carrefour : Un mur devant, une place de parking juste à gauche, une place de parking juste à droite et une forêt sauvage et inconnue si on continue trop à gauche ou trop à droite. Mieux vaut se garer sagement alors.

- La pluralité des partis politiques : Le système des partis (financement, choix des candidats par le parti pour les élections etc...) verrouille tout pluralisme. Autant considérer qu’il y a un pluralisme sur le marché des systèmes d’exploitation PC.

- L’indépendance de la justice : Est elle indépendante quand elle est obligée de trancher à l’aide d’un référenciel hiérarchique de normes dont la production n’est pas optimal ?

Quelle pourrait être la nature du régime actuel au vu de ce que l’on a dit précédemment ?

Probablement un régime formellement "démocratique" fonctionnellement oligarchique et matériellement autoritaire (à nuances ploutocratique (notabilités), gérontocratique (Sénat !) ou timocratique (processus de conquête du pouvoir exaltée).

L’élection par le peuple donne l’apparence démocratique processuelle, le pouvoir se concentre alors entre les mains d’un petit groupe dont les conditions d’exercice permettent potentiellement une utilisation abusive de la souveraineté et de l’autorité.

Source : http://points-de-vue-alternatifs.over-blog.fr/article-la-loi-le-systeme-representatif-et-le-suffrage-universel-reflexions-sur-le-regime-politique-actue-116603373.html

COMMENTAIRES  

05/04/2013 08:01 par babelouest

Merci ! C’est là où l’on voit combien le minimum à exiger, et tenter de provoquer l’écriture d’une nouvelle Constitution faisant pratiquement table rase des principes évoqués (élections devenues de simples "choix" binaires, Pouvoirs assujettis aux Partis au lieu d’être indépendants, libéralisme) s’impose absolument. C’est à chaque citoyen femme ou homme de s’y atteler, ne serait-ce que pour sauvegarder sa vie de tous les jours.

Il y a du travail en perspective ! Fermons la télé (pour ceux qui l’ont), et passons à une reprise en main de notre destin.

05/04/2013 11:09 par Dwaabala

Il ne faut pas idéaliser ni tomber dans l’anachronisme.
La Déclaration de droits condamne implicitement la société aristocratique et les abus de la monarchie, elle est à ce titre « l’acte de décès de l’Ancien régime ».
Certes, en même temps, s’inspirant de la doctrine des Philosophes, elle exprime l’idéal de la bourgeoisie et pose les fondements d’un ordre social nouveau, applicable à l’humanité entière, mais parallèlement, craignant d’appeler les classes populaires à la vie politique et à l’administration des affaires publiques, la bourgeoisie se garda de tirer de ces affirmations solennelles les conséquences qui en découlaient naturellement.
Dès l’épisode thermidorien se précise une politique de compromis et de juste milieu.
A l’extérieur les Thermidoriens sont pour une paix d’annexions et de conquêtes, perpétuant ainsi la guerre initiée par leurs aînés les Girondins.
A l’intérieur, entente avec la droite : républicains modérés et monarchistes constitutionnels jettent les fondements du régime des notables, avec la Constitution de l’an III.
Ils abandonnent le fameux article 1er (« Les hommes naissent et demeurent.. »)pour affirmer dans l’article 3 :
« L’égalité consiste en ce que la loi est la même pour tous ».
Des droits sociaux reconnus par la Déclaration de 1793, il n’est plus question.
Par contre l’article 5 sur le droit de propriété, dont la Déclaration de 1789 n’avait donné aucune définition précise, consacre la liberté économique dans toute son ampleur. Il est même redéfini dans l’article 8.
Enfin, rétablissement du cens, quoique moins sévère qu’en 1791.

L’épisode thermidorien (après l’expérience de la Gironde), complété par celui qui s’ouvrit le 18 brumaire, sont captivants en ce qu’il révèlent en germe nombre des évolutions ultérieures.

Pour conclure, ce jugement de J. Jaurès : la Révolution française fut « largement bourgeoise et démocratique », au regard de celles des Etats-Unis et de l’Angleterre demeurées « étroitement bourgeoises et conservatrices. »

Ajoutons que le caractère démocratique s’imposa à la bourgeoisie sous la pression des évènements et la nécessité de faire appel au peuple pour abattre l’Ancien régime, et non comme un idéal politique.

05/04/2013 11:56 par Arthurin

Salut Bab,

Ainsi il ne s’agirait plus de simplement « persister à aller dans une direction alternative, pour que la transition en soit moins brutale » (vers un éventuel "monde d’après") ?

La démocratie serait donc une nécessité inhérente à la vie quotidienne des citoyens ?

05/04/2013 12:57 par erwin

@ babelouest :

Fermons la télé (pour ceux qui l’ont)

Cà existe encore ?!

05/04/2013 15:20 par Kiergaard

Il ne faut certes pas idéaliser où être anachronique oui. Évidemment que la démocratie n’a jamais réellement été telle qu’elle a été théorisée dans l’Antiquité. Néanmoins elle a tout de même été vendue comme telle et constitue un mythe collectif dont on puise la racine dans les Révolution Française, puis 1848, puis 1945.
Le gouvernement du peuple, pour le peuple, par le peuple, n’a jamais eu aucune réalité et n’en aura sans doute jamais réellement, néanmoins elle figure dans la Constitution française. Et 2 lignes plus loin on a la phrase sur le gouvernement représentatif etc...
Cela pose question.
En élargissant un peu c’est la question de la légitimité qui est importante, même si celle ci a une réalité très flou...Aujourd’hui on a une légitimité formelle qui est censée justifiée des mesures de fond. Les choses vont empirer avec les volontés d’intégration européenne. Il suffit de lire les déclarations de Pierre Moscovici pour le sentir... Bientôt on tirera la légitimité de mesures prises au niveau européen par des "représentants de représentants"...

05/04/2013 15:35 par babelouest

Ainsi il ne s’agirait plus de simplement « persister à aller dans une direction alternative, pour que la transition en soit moins brutale » (vers un éventuel "monde d’après") ?

La démocratie serait donc une nécessité inhérente à la vie quotidienne des citoyens ?

Au minimum, oui. Rappelons que nous ne sommes pas en démocratie.

 ? ? ? Télévision ? ? ? aux dernières nouvelles, il paraît que certains s’en servent encore.... pas moi, évidemment.

06/04/2013 02:30 par ADSkippy

1789 ? Le Roi est mort, vive les Rois de la grande bourgeoisie et ses alliées du "capital".
Avant, il y avait l’élite de "nobles" Monarchistes. Apres et depuis, on a la règne de l’élite "nobles de la bougeoisie".
A quand la règne du citoyen ?

06/04/2013 04:03 par erwin

Il y a quelques temps, j’ai fait connaissance (grâce à Franck Lepage) avec la définition que donne Paul Ricoeur de la démocratie. Depuis, c’est mon principal aiguillon pour juger du degré de démocratie dans une société, car ce qu’elle dit explicitement induit tout le reste :

"Est démocratique, une société qui se reconnaît divisée, c’est-à -dire traversée par des contradictions d’intérêt et qui se fixe comme modalité, d’associer à parts égales, chaque citoyen dans l’expression de ces contradictions, l’analyse de ces contradictions et la mise en délibération de ces contradictions, en vue d’arriver à un arbitrage".

Dans le cas qui nous intéresse, je dirais qu’aujourd’hui on en est très loin, et que pendant la Révolution...on en était très loin aussi !

Bien évidemment la définition de Ricoeur exclut catégoriquement le système représentatif, dont l’auteur de l’article rappelle à juste titre qu’il s’assimile à l’aristocratie. La représentation est pourtant au coeur des institutions révolutionnaires et elle est largement évoquée par la DDHC.

J’ai donc du mal à rejoindre l’auteur sur une dénaturation des principes politiques de 1789, qui à mon sens portent en germe -à dessein bien entendu- la confiscation de la souveraineté par la nouvelle élite.

Pour être démocratique, une représentation politique doit être assurée par des citoyens dont la politique n’est pas le métier, mandatés pour accomplir une tâche précise, possédant une autonomie décisionnelle très limitée et clairement délimitée, le tout sous le contrôle étroit des autres citoyens, et moyennant une indemnité correspondant aux besoins d’un citoyen qui prend en charge une partie des affaires de la cité pendant un temps limité avant de revenir à sa vie "normale" (vraiment normale, hein...) et non à ceux d’un aristocrate rentier.

Bien sûr, tout çà doit s’accompagner de la suppression de 90% de la représentation politique, ce qui veut dire que les citoyens doivent prendre les choses en mains, exercer réellement leur souveraineté. Autrement dit, gérer directement la cité.
Dans l’Athènes antique, cela fut possible au prix d’une exclusion du corps civique de l’écrasante majorité de la population : pendant que les citoyens sont en train de débattre sur la Pnyx, il faut bien que les autres fassent "tourner" la cité.
Aujourd’hui nous avons collectivement les moyens, notamment techniques, de nous émanciper en grande partie du travail (moi je dis qu’on peut passer les doigts dans le nez à la semaine de 25h aujourd’hui et beaucoup moins demain, mais çà se discute). Il devient donc tout à fait envisageable que chaque citoyen qui le souhaite puisse consacrer une partie importante de son temps à la gestion de la cité.

Bon bah voilà , y’a plus qu’à pendre les aristocrates à la lanterne !
Et cette fois-ci évitons d’en mettre d’autres à la place.

07/04/2013 11:46 par babelouest

Merci Erwin, pour ce commentaire très juste ! Avec ta permission, je le reprends sur mon blog....

La démocratie, c’est bien du travail pour tous, mais aussi bien des satisfactions d’avoir oeuvré au bien commun.

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