Dans une brève allocution diffusée par la télévision égyptienne mardi soir, la tête du CSFA Muhammad Tantaoui a accepté la démission de son gouvernement et fixé à juin prochain le dernier délai pour la tenue des élections présidentielles. Il a également appelé à la formation d’un gouvernement de salut national. Tantaoui a déclaré que les élections législatives fixées pour la semaine prochaine auront lieu comme prévu.
Avant son discours, M. Tantaoui aurait rencontré Mohammed Morsy, leader de Liberté et Justice (le bras politique des Frères musulmans), et avec l’ancien Secrétaire général de la Ligue arabe et actuel prétendant présidentiel, Amr Moussa.
Tantaoui a exprimé ses condoléances pour ceux qui sont morts pendant plusieurs jours de manifestations ayant donné lieu à une répression des forces de sécurité. Mais il coupa court à toute présentation d’excuses. L’établissement militaire, a-t-il soutenu, est une victime plutôt qu’un coupable dans la crise.
Les estimations de ceux qui sont morts dans les manifestations iraient de 30 à 70 personnes avec des centaines de blessés. Les manifestants appellent à la fin du régime militaire et à un transfert rapide à un gouvernement civil.
Le nombre élevé de décès a provoqué l’alarme sur l’excès de la force utilisée contre les manifestants.
Beaucoup d’Egyptiens craignent que les nouveaux gaz lacrymogènes utilisés par le ministère de l’Intérieur et les forces armées pour disperser les manifestants [puissent en être partiellement la cause]. Il semble que les manifestants n’aient pas tous été abattus par balles.
Certains manifestants ont étouffé après avoir inhalé du gaz lacrymogène récemment introduit qui a été importé depuis peu dans le cadre de l’accord d’échange pour la libération d’Ilan Grapel, qui a été accusé d’espionnage pour Israël.
Les gaz lacrymogènes provoquent une incapacité temporaire et, parfois, des convulsions. Le nouveau gaz lacrymogènes CR, élaboré par le ministère britannique de la Défense dès les années 1960, peut entraîner la mort. Il provoque de graves irritations cutanées, des crampes musculaires et des difficultés respiratoires. Il peut aussi entraîner une incapacité temporaire et des tremblements dans les bras et les jambes. L’exposition à de grandes quantités de gaz peut aussi être mortelle.
Les effets du gaz CR sont d’environ 6 à 10 fois plus puissants que ceux du gaz CS. L’armée d’occupation israélienne pourrait avoir utilisé le gaz CR contre les manifestants en Janvier 2011, conduisant à la mort de Jawaher Abu Rahma. Saddam Hussein a réussi à fabriquer du gaz CS dans les années 70. Il l’a développé et utilisé contre les Kurdes en Irak et contre l’Iran pendant la guerre Irak / Iran.
Les médecins ont averti que l’utilisation de l’eau pour le traitement du gaz CR entraîne des irritations de la peau, contrairement à d’autres gaz. Un médecin a déclaré que « les manifestants ne devraient pas utiliser de l’eau ou du vinaigre pour le traitement du gaz CR. Au lieu de cela, ils devraient prendre des antihistaminiques, des compléments de vitamines B associées et de potassium, et se laver le visage avec de l’eau glucosée. »
Un fabricant qui produit des armes similaires aux États-Unis stipule sur son site Internet, « En raison de l’effet persistant et à long terme du CR, peu d’organismes conscients de leurs responsabilités utilisent ce produit. »
Le Directeur régional du Réseau Euro-méditerranéen des droits de l’homme, Amani al-Sinwar, a indiqué que des témoignages récurrents provenant de manifestants égyptiens confirment que l’armée et les forces de sécurité ont utilisé des gaz CR. Al-Sinwar a ajouté que le Réseau a préalablement reçu des déclarations similaires concernant les symptômes causés par le gaz CR. Contrairement à d’autres gaz lacrymogènes, le gaz CR cause des vomissements intempestifs, une incapacité temporaire et la cécité.
Al-Sinwar note qu’il s’agit de la première fois que le Réseau documente l’utilisation de gaz CR contre des manifestants depuis le déclenchement de manifestations pacifiques en Egypte le 25 janvier. Le Réseau a obtenu des témoignages de militants à la place Tahrir, indiquant que les forces de sécurité avaient utilisé du gaz de type CR.
Le Réseau a condamné cette violation grave des droits civils. Il affirme que l’utilisation de ce gaz est internationalement prohibée et est la cause de cancers et, éventuellement, de mort si [les victimes] sont exposées pendant de longues périodes.
Muhammed Shuair
Al-Akhbar, le 23/11/2011.
Source : Tantawi : Muzzling the Revived Spirit of Tahrir
Traduction par un lecteur assidu du Grand Soir