Déstabiliser les régimes progressistes en Amérique Latine fait partie du répertoire classique des ambassadeurs nord-américains accrédités dans ces pays. La Maison Blanche les met en place en fonction d’un principe de rotation « utile ». Début août 2010, l’administration d’Obama propose Larry Palmer au poste d’ambassadeur au Venezuela. Cet ancien diplômé de l’Académie Militaire West Point de New York, représenta déjà les États-Unis au Honduras (2002-2005), où il força l’ouverture totale du marché aux produits nord-américains. Ultérieurement il dirigea la Fondation interaméricaine (IAF), officine proche de la CIA.
Quelques jours avant d’être accrédité à Caracas, Palmer brossa un sombre tableau de ses prochains hôtes : les liaisons entre les membres du gouvernement de Chávez et les paramilitaires colombiens « sont très claires », l’influence de Cuba dans l’armée « inquiétante » et les travailleurs sociaux instruits par des « paramilitaires cubains. » Sa future tâche sera celle de « contrôler la démocratie et la liberté de la presse. »
Dans son émission « Aló, Presidente », Hugo Chávez demanda à son homologue étatsunien de chercher un autre candidat, Palmer n’ayant pas le profil approprié pour une fonction diplomatique. Philip Crowley, porte parole de la Maison Blanche, considère que Palmer dispose précisément de « l’expérience nécessaire » pour un ambassadeur de succès. Au profit de qui ?
Le cas de l’ambassadeur Larry Palmer ressemble étrangement à celui de Hugo Llorens, diplomate nord-américain d’origine cubaine dont la venue à Tegucigalpa, en mai 2006, n’avait pas reçu l’aval du président de l’époque Manuel Zelaya.
Dans un entretien incendiaire accordé à la radio locale « Radio internacional » de San Pedro Sula, son ancien ministre Roland Valenzuela (41 ans), révéla ce 30 avril des détails alors inconnus.
Le 10 juin 2009, Roberto Micheletti, Président du Congrès et futur dictateur du Honduras, envoya par un messager à l’ambassadeur étatsunien Hugo Llorens, l’ébauche d’un décret daté du 28 juin (jour du coup d’État) : « Ambassadeur Llorens, voici le décret que de la part de Micheletti. Il manque quelques corrections mais votre opinion est urgente ! »
En sappuyant sur ce décret, l
armée a renversé dix-huit jours plus tard Manuel Zelaya, président démocratiquement élu au Honduras (2006-2009).
Llorens répond : « Le paragraphe dans lequel le président Zelaya est accusé avoir violé l’Etat de droit, n’est pas bien argumenté, il a besoin d’une plus grande évidence. Appeler Marcàa Villeda pour qu’elle obtienne ces documents. » Marcàa Villeda, députée du parti libéral encore actuellement, appartient à l’une des plus riches familles honduriennes, propriétaire de grands médias. Ella a falsifié la signature du président Zelaya, le Congrès lui attribuant de manière frauduleuse une supposée « déclaration de renoncement. »
L’ambassadeur envoya plusieurs instructions dans lesquelles il précisait les arguments pour discréditer l’enquête publique mise en place par le gouvernement progressiste de Zelaya, demandant aux Honduriens le jour des élections (28 juin 2009) s’ils étaient d’accord pour voter aussi une nouvelle Assemblée Constituante avec une « quatrième urne ».
Durant cet entretien de 90 minutes à la radio locale, Valenzuela présente à ses interlocuteurs plusieurs documents. La preuve de la participation avérée de Washington et du Pentagone - qui possède une base militaire à Palmerola, à 100 km de Tegucigalpa - est complétée par ces documents. Ils dévoilent les activités sur place de l’ambassadeur Hugo Llorens.
« Jacqueline Foglia Sandoval a coordonné et organisé le coup d’État » relate le docteur Valenzuela, pédiatre et ancien ministre pour le développement rural du gouvernement de Zelaya. Valenzuela reçut du barman d’un hôtel de San Pedro Sula « ces documents oubliés là -bas par Sandoval. »
Diplômée de l’Académie militaire West Point de New York, attachée militaire à l’ambassade du Honduras à Washington et membre active des Forces Armées, Sandoval dirigea jusqu’en mars 2009 l’Université Zamorana de Tegucigalpa. Celle-ci est financée par l’USAID (United States Agency for International Development) dont les liens avec la CIA sont prouvés.
« Sandoval a la carrière typique d’un membre d’élite de la CIA » affirme pour Junge Welt (Berlin) le journaliste canadien Jean-Guy Allard, expert des services secrets et auteur.
« Le Président n’a jamais pu retourner dans son pays parce que les États-Unis nous ont trahis. Les États-Unis nous ont toujours trahis, » dit en conclusion l’ex-ministre.
Roland Valenzuela ne pourra plus déposer devant la Commission pour la vérité du Front National de Résistance Populaire (FNRP) du Honduras. Le 15 juin il a été tué d’une balle dans le dos, dans un restaurant de sa ville natale San Pedro Sula, par un soi-disant « homme d’affaires. »
Manola Romalo
SOURCE :
http://www.jungewelt.de/2010/08-16/025.php
Interview audio de Roland Valenzuela, cliquez ici : http://www.mediafire.com/?zix0nhkoyjd