Les Carnets de Badia Benjelloun
Fautes graves
L’urgence commandait cette modalité. Il s’est trouvé en France des communicants (vite élus experts d’un domaine relativement nouveau) qui se sont moqués de ce procédé généreux et altruiste, reçu inconfortablement par des sociétés baignées dans le culte de l’individualisme et dans un sentiment injustifié de supériorité intellectuelle. Il n’est d’ailleurs altruiste qu’en première acception. Maîtriser l’épidémie qui allait de façon certaine se mondialiser au rythme des échanges matériels d’une économie globalisée est un devoir qui incombe à chacun et à tous. Se protéger soi, c’est aussi protéger les autres avec une symétrie parfaite pour la réciprocité. Aider les autres à se protéger, c’est égoïstement aussi se protéger.
On savait donc au 29 février que la propagation se faisait selon une progression géométrique qui donnait aux courbes représentant les personnes porteuses du virus une allure exponentielle impressionnante d’autant que dans 80% des cas, les personnes contaminées sont asymptomatiques. Le communiqué de l’Élysée ce dernier jour de février a annoncé des mesures inappropriées, celle d’isoler sans la rigueur nécessaire les foyers déjà déclarés de l’Oise et de Haute-Savoie. Il n’a pas tenu compte du fait que les malades ne sont pris en charge que 6,5 à 8 jours après le début des symptômes et que pendant la période d’incubation de 4 jours en moyenne (2 à 7 jours), les porteurs asymptomatiques peuvent être transmetteurs. La stratégie adoptée, consciemment ou involontairement par le groupe aux commandes à l’Élysée, a consisté à étaler sur une plus grande période la contamination de la majorité de la population française. Cette prise en charge contraste avec la politique du gouvernement chinois qui avait choisi d’interrompre les chaînes de contamination interhumaine, en laissant vierge de tout contact la majorité du sous-continent chinois tant que remèdes et vaccins efficaces ne sont pas au point.
Le gouvernement français avec à sa tête le Président de la République avait d’autres préoccupations plus éminentes. L’exécutif a choisi d’interrompre discussions et amendements autour de la contre-réforme des retraites, c’est-à-dire confier aux fonds de pension et aux assurances privés l’épargne des travailleurs par le procédé autoritaire du 49-3. Une telle décision est une indication majeure du type de priorité dont se sentent investis les politiciens au pouvoir et la majorité écrasante de ceux en position confortable d’opposition formelle. C’est clairement la privatisation d’une épargne jusque-là construite sur la garantie de l’épargne par la collectivité, la solidarité et le non-profit. Cette clique affiche ainsi sa corruption, son incompétence et son irresponsabilité.
Une ministre de la Santé, transformée en un tour de passe-passe bien commode en candidate à un poste d’édile, a soutenu quelque temps avant la catastrophe largement prévisible que le pays est immun et qu’il a les moyens de combattre l’infection. Dans un sursaut de bêtise incontrôlée, elle a envoyé le stock disponible de masques chirurgicaux aux Chinois qui ne les ont pas demandés créant une pénurie nationale préjudiciable et un facteur de propagation incontestable. Les commandes de cette protection relative, fabriquée essentiellement en Chine, ne seront livrées qu’à la mi-avril.
Un trépied
Corruption, Incompétence et Irresponsabilité sont donc bien le trépied du système représentatif adopté par le capitalisme occidental à la française.
La fermeture des cafés, des lieux d’enseignement et de culte, des commerces excluant ceux de bouche n’est pas précisément une véritable mesure de confinement. L’encouragement au travail à distance n’est pas une réduction efficace de risque quand ne sont pas interdits les brassages humains favorisés par les transports en commun toujours ouverts. Les épidémiologistes chinois ont mis en évidence la possible persistance virale pendant 4 jours sur une surface inerte et le transport à plus de 4 mètres d’aérosols de particules ultrafines contaminantes.
Les médecins de ville sont en première ligne dans le diagnostic et le triage, ils n’ont pas de masque pour se protéger et protéger les patients qui les consultent, en dépit de la circulaire ministérielle qui impose aux pharmaciens de ville de leur en délivrer en priorité. La rupture des stocks est générale sur le territoire national.
Les autorités en charge de la protection de la santé publique n’ont cure du principe de précaution ni de celui de non-contradiction.
La précaution a été récusée par les aventuriers du capitalisme déréglementé et a disparu comme boussole de gouvernement. Attali, conseiller et mentor des princes français qui se succèdent à l’Elysée depuis 30 ans, recommandait en 2007 d’abandonner ces idées rétrogrades de protection des populations et se prononçait pour la libération du travail de ses contraintes. Le guru patenté de la secte ultra-libérale est revenu à la charge en 2013 en décrétant que ce principe inscrit dans la Constitution est suicidaire. Il s’agissait pas moins de déformer la vieille maxime ‘gouverner, c’est prévoir’ en une doctrine à appliquer par les valets du Capital, gouverner, c’est ‘laisser faire les forces de l’argent sans retenue’.
Les autorités doivent être mises en demeure d’exhiber les épidémiologistes qui leur auraient inspiré l’idée saugrenue que la fréquentation de cafés ou de commerces des articles de plomberie est douée d’un effet plus contagieux que la fréquentation d’un bureau de vote. Devant tant d’incertitudes et de risques, le Royaume Uni qui ne bénéficie pourtant pas d’un exécutif aligné sur des idées d’extrême gauche, a pour sa part sagement reporté les élections prévues pour mai 2020. Les enjeux ne sont sans doute pas les mêmes de part et d’autre de la Manche. La République portant initiales de Jupiter ‘EM’ veut profiter de la panique instillée par l’exécutif depuis deux jours pour déstabiliser l’électeur qui rejette selon tous les sondages réalisés depuis de nombreux mois la politique de Monarch Premier.
La peur est un moyen éprouvé depuis toujours pour orienter les masses mais une fois passé le moment de sidération et de période réfractaire, de plus en plus bref, la pensée rationnelle revient aux commandes d’un troupeau instruit des manipulations antérieures. Hollande n’a tiré aucun profit des mises en scène et de l’état d’urgence instauré après les attentats de novembre 2015. De même que les attentats en Espagne du 11 mars 2004 n’ont pas secouru Aznar aux élections suivantes.
Prétention et mensonges
L’exécutif prétend que la France a formé les meilleurs épidémiologistes et virologues. En quel nombre ? Une société qui paie un sportif qui pousse du pied un ballon un million d’euros par mois va peiner à former un Bac + 5 à 10 années d’études supérieures austères avec concours à la clé pour une reconnaissance sociale non gratifiante. Les disciplines qui ne conduisent pas à des travaux immédiatement convertibles en profit ne sont guère estimables et peu fréquentées par les étudiants. A niveau de formation égale, un médecin formaté par une société où est cultivé le mythe d’une réussite par l’argent est encouragé à préférer plutôt la chirurgie ou la médecine esthétique, très rémunératrices, pour ne pas encourir l’indignité d’être un Rien Qui n’a pas Réussi dans une Gare en octroyant des soins primaires dans des zones rurales.
Les moyens alloués à la recherche fondamentale ne cessent de s’amoindrir. Plus du tiers des chercheurs sont de vacataires en situation précaire. Les financements sont accordés aux sujets qui intéressent au premier chef les ‘partenaires’ privés transformés en donneurs d’ordre. Sous le règne de Sarkozy déjà, les manifestations des chercheurs ont été traités avec mépris et considérées comme un phénomène exotique et corporatiste. Les deux quinquennats suivants ont aggravé la situation. Bientôt, nous n’aurons plus de recherche indépendante du privé et les précaires constitueront la moitié des travailleurs du secteur (s’il en reste). Comment un destructeur patenté du secteur public peut-il avoir l’outrecuidance de s’enorgueillir du travail de virologues auxquels on soustrait les moyens de faire fonctionner leurs laboratoires ?
Le diagnostic de la présence du virus chez les patients est réservé aux patients graves que l’on destine aux lits de réanimation, respiratoire, en particulier. Ceci constitue une preuve indirecte indiscutable de l’absence d’efforts en direction de la recherche fondamentale qui aurait pu mettre en œuvre très rapidement des techniques fiables, rapides, non coûteuses et généralisables du diagnostic biologique de la maladie. Il aurait été bien utile pour établir les conduites à tenir vis-à-vis des patients déjà contaminés comme pour les prospectives épidémiologistes.
Monarch Premier affiche une fierté triomphante loin d’être seyante à la situation de la santé publique où l’a plongée le système que vous représentez. Que va-t-il rester des entreprises cotées en Bourse dont il a invité les Directeurs généraux à Versailles, en pleine détresse de la classe des Gilets Jaunes que ses sbires massacrent, mutilent, gazent, bastonnent et emprisonnent à volonté. Versailles, lieu hautement symbolique d’un pétainisme à la française, depuis laquelle furent menés les massacres des patriotes parisiens qui se sont dressés contre la trahison d’un général Bezaine ! Ce monarchiste avait livré la France aux Allemands dans l’espoir de faire tomber la République et de restaurer un second Empire déliquescent. Vous, Monarch Premier, avec votre Europe à tout prix, livrez la France aux capitalistes allemands et étasuniens, sans contrepartie.
Un peuple constitué
Monarch Premier a été élu à la faveur d’un travail acharné de communicants et de journaleux champions en storytelling où l’on a accommodé l’histoire romanesque d’une quadragénaire séduisant un adolescent de quinze ans. Une fois pris en main, le jouvenceau développera des qualités sans cesse ouvragées d’un orateur-comédien disant tout et son contraire pour devenir un vulgaire fondé de pouvoir de quelques oligarques.
Le peuple de France réalise la supercherie de ce monde fait d’escroquerie et d’indigence morale. Sans doute, Monarch Premier, vous aurez condamné à la mort par incapacité, légèreté, insouciance et indolence au mieux des milliers voire de centaines de milliers de Français. Au pire, un tribunal jugera des raisons profondes de votre action retardée et incohérente. Vos différents subordonnés, certes surtout qualifiés en flagornerie et vassalité, ont dû vous faire savoir le manque de lits en réanimation en cas d’épidémie de ce genre. Sils ne l’ont fait, il faut les limoger au lieu de les promouvoir comme vous l’avez fait. Ils devraient vous dire que notre savoir sur la pathogénicité de ce virus est incomplet. En particulier, nous ne savons pas si la maladie confère une immunité et donc si les vaccins en cours de préparation partout dans le monde seront efficaces pour protéger la population. Vous semblez patauger dans une satisfaction ignorante quand vos conseillers immatures à votre image vous ont fait choisir la voie d’infecter toute la population pour lui faire acquérir son immunité.
Vous avez été celui qui a cassé le code du Travail en vous dissimulant maladroitement derrière le nom d’une beurette assez niaise pour endosser le sale travail.
Vous avez été celui qui a refondu les droits aux allocations chômage, droit transformé en aumône car financé par l’impôt et non la contribution patronale au salaire.
Vous avez été celui qui a institué une exonération d’impôt aux entreprises sans contrepartie, laminant une fois de plus les ressources fiscales de l’Etat.
Vous avez été celui qui a le moins compensé les exonérations patronales sur les bas salaires.
Vous êtes celui qui a entrepris d’étrangler un peu plus les services hospitaliers en instituant une baisse de la masse salariale de 1,2 milliards d’euros.
Vous avez mis en œuvre mille et une privatisations de biens publics, la dernière en date, celle des Aéroports de Paris a été gelée dans un contexte de chute vertigineuse des valeurs boursières, vous n’avez pas pu pousser l’indécence jusqu’à les céder gratuitement.
Tout ce que vous avez entrepris, ce le fut au détriment des travailleurs en les précarisant davantage, en rognant leurs droits et leurs salaires réels et en les humiliant quand ils perdent leur emploi et se trouvent au chômage. Et lorsque vous avez faire mine de vous intéresser aux gueux, vous avez voulu les escroquer une fois de plus en prétextant une taxe écologique. C’était pour renflouer les caisses de l’Etat exsangue des cadeaux fiscaux faits à vos patrons oligarques et pour sacrifier à une caricature de précaution écologique. Fabriquer des voitures électriques pour refouler plus loin la pollution, dans les pays tiers, comme si celle-ci n’allait pas nous revenir en plein poumon dans un monde globalisé par vos pairs.
Le peuple de France, maintenant constitué parce qu’il s’est dressé pour contester vos valeurs qui les atomisent en objets séparés par l’envie et la compétition, vous demandera des comptes. Il manifeste tous les samedis sans interruption depuis fin novembre 2018. Il a accompli la grève la plus longue des transports en commun fin 2019-début 2020. Il va refuser – toutes professions confondues depuis l’éboueur jusqu’à l’avocat et au chanteur d’opéra – que vous renflouiez les actifs boursiers et les banques en facilitant l’impression d’une monnaie qui fait tant défaut pour éduquer, assurer la santé, les retraites et assurer le contrôle et la distribution de biens publics comme l’eau, l’énergie, la poste et les infrastructures routières, du rail et des transports aériens. Les travailleurs, là où ils sont vont s’approprier les outils de leur production contre un franc symbolique car c’est ce que cela va valoir bientôt tout ce que vous et vos prédécesseurs avez privatisé.
La Bourse virtuelle va fermer et les algorithmes qui président aux échanges à très haute fréquence rangés dans le musée des inventions mortifères du capitalisme sénescent.
Contrairement à 2007-2008, vous nous trouverez pour barrer le chemin à ceux qui spéculent en ce moment même à la baisse. Nous ne voulons plus des activités prédatrices et spéculatives des gens de votre camp.
On se lève mais on ne se casse pas. On reste pour vous chasser, vous et vos semblables des postes de commande que vous occupez indûment. Et vous juger.