BOGOTA, lundi 15 octobre 2012 (LatinReporters.com) - Joli coup de pub de la guérilla marxiste des Farc. Sa seule combattante européenne connue, la guérillera hollandaise Tanja Nijmeijer (34 ans), ferait partie de son équipe de négociateurs dans les pourparlers de paix avec la Colombie pour clore un demi-siècle de conflit intérieur. La négociation va s’ouvrir officiellement à Oslo, en principe le 17 octobre.
Le désignation de Tanja était annoncée dimanche soir par la télévision publique de Bogota, Canal Capital. Selon la même source, asseoir la Hollandaise à la table de négociation serait une décision de dernière heure. Elle irriterait le gouvernement du président colombien Juan Manuel Santos.
Bogota n’apprécierait donc pas la participation aux pourparlers de l’insurgée étrangère. La guérilla, elle, revendiquerait son droit de choisir librement ses représentants, ajoutant que Tanja combat depuis plus de dix ans avec les Farc (Forces armées révolutionnaires de Colombie). Sa maîtrise de plusieurs langues, dont l’anglais et l’espagnol, lui donnerait le profil idéal pour gérer la communication et les contacts avec les médias.
Canal Capital précise que la Hollandaise se trouve actuellement à La Havane avec Ivan Marquez, nº2 et principal négociateur des Farc. La situation créée par l’entrée en scène de la guérillera retarderait le départ pour la Norvège des deux délégations, celle de la guérilla et celle du gouvernement colombien. Des contacts informels prévus pour ce lundi à Oslo seraient en conséquence annulés ou reportés et l’incertitude plane désormais sur le 17 octobre, date prévue pour l’installation de la table de négociation.
Consultées par l’agence espagnole EFE, des sources proches des négociateurs gouvernementaux n’ont ni démenti ni confirmé les informations de Canal Capital. D’autres médias colombiens imputent le retard de l’arrivée à Oslo des négociateurs à des imprévus logistiques, climatiques et juridiques. A Cuba, par exemple, les délégués des Farc attendraient encore, avant de s’envoler vers la Norvège via Paris, la certitude de la levée des mandats d’arrêt internationaux qui les visent.
L’aventure idéologique de Tanja Nijmeijer a plusieurs fois suscité l’attention de la presse internationale. Notamment en 2007, lorsque des extraits de son journal personnel, trouvé dans un camp de la guérilla attaqué par l’armée, étaient divulgués en Colombie et traduits dans de nombreux pays occidentaux. Les médias s’interrogèrent aussi sur son sort lors de la mort, en septembre 2010 dans un spectaculaire bombardement aérien, du chef militaire des Farc, Jorge Briceño, alias Mono Jojoy. La guérillera faisait partie de son cercle rapproché.
Aux Pays-Bas, Tanja étudia les langues à l’Université de Groningue avant d’effectuer un stage pratique en 2000 en Colombie. Elle y enseigna l’anglais dans un collège privé de Pereira. Au cours de ce premier séjour, elle est frappée par le conflit armé et les inégalités sociales dans le pays.
Elle retourne en Colombie pour participer au mois d’août 2001 à la "Caravane pour la vie", une marche organisée par des ONG dans le but d’attirer l’attention de l’opinion internationale sur les problèmes sociaux de la Colombie et les massacres commis dans le cadre du conflit armé.
Lorsque Tanja Nijmeijer revient définitivement en Colombie, fin 2001, elle a 23 ans. C’est lors de ce troisième séjour qu’elle rejoint les Farc, utilisant différents noms de guerre : Eillen, Alexandra ou Holanda. Militant d’abord dans les milices urbaines des Farc à Bogota, elle passe à une unité de combat rurale en 2003.
Depuis décembre 2010, Tanja est sous le coup d’un avis de recherche et de capture émis par Interpol suite à l’accusation de terrorisme prononcé contre elle par la justice des États-Unis pour participation supposée à la séquestration de trois Américains. Ceux-ci, capturés par les Farc en 2003, furent libérés avec Ingrid Betancourt le 2 juillet 2008 par l’armée colombienne.
http://www.latinreporters.com/colombiepol15102012hd.html
[NDLR - Sur le site de Radio Nederland, une vidéo de 40 minutes retrace le parcours de Tanja Nijmeijer. Elle s’y exprime largement, en espagnol, filmée en uniforme et le fusil à la main dans un camp des Farc.]
