Alors que les grands média internationaux se sont déchaînés sur la bataille d’Alep, accusant l’armée syrienne et ses alliés russes de divers « crimes de guerre » dont il s’est avéré, depuis, qu’il s’agissait de « fake news » diffusées par les forces rebelles, un grand silence entoure les opérations menées à Raqua (contrôlée par l’EI) par les Forces démocratiques syriennes (à majorité kurde), armées et soutenues par les bombardements de la coalition américaine. Une commission d’enquête de l’ONU présidée par Paulo Sergio Pinheiro, vient, cependant, de faire état de 300 victimes civiles, au moins, et du déplacement forcé de quelque 160 000 personnes.
« Nous n’avons relevé que les victimes des bombardements, soit environ 300 civils, dont 200 sur un même lieu, le village d’al-Mansoura », a déclaré Karen Koning AbuZayd, l’un des membres de la commission. Le Pentagone, qui intervient sans mandat de l’ONU et sans accord du gouvernement syrien, parle d’ « opération de niveau limité ». Les Américains ont, en outre, attaqué les forces syriennes gouvernementales au cours des dernières semaines, à plusieurs occasions, sous prétexte de « protéger (ses) alliés FDS ».
Le massacre des civils par les forces américaines et alliées est d’un tel niveau que même l’organisation Human Rights Watch (HRW), très pro étasunienne, s’est vue obligée de critiquer les conséquences des opérations à Raqqa sur la population civile. HRW a, également dénoncé le largage de bombes à phosphore blanc, illégales, par l’armée des EU sur des zones résidentielles.
Uranium appauvri
Il est, en outre, aujourd’hui certain, que l’armée des EU utilise des munitions à l’uranium appauvri qu’elle avait expérimentées lors de la première guerre d’Irak, en 1991. À ce titre, la Serbie vient de charger une équipe d’avocats de réunir les éléments d’une plainte contre l’OTAN qui avait déversé entre 10 et 15 tonnes d’uranium appauvri au cours des bombardements, en 1999. Elle envisage de demander aux dix-neuf pays membres de l’OTAN à cette époque, des compensations au titre de la catastrophe écologique et sanitaires (cancers et autres pathologies), de fournir la technologie et l’équipement nécessaires à la dépollution des zones contaminées et des traitements médicaux.
Après la guerre du Kossovo, en 1999, le Parlement européen avait réclamé, le 24 janvier 2001, l’interdiction de la fabrication, des essais, de l’utilisation et de la vente d’armes à l’uranium appauvri « afin de préserver les générations présentes et futures ». En outre, la directive 96/29/Euratom stipule que tout produit dépassant une concentration de 10 000 becquerels par kilogramme, doit être confiné. L’uranium appauvri présente une concentration 1500 fois supérieure à cette limite.
Une loi fédérale aux EU (titre 50, chapitre 40, article 2302) stipule que les armes à l’uranium appauvri correspondent à la définition des armes de destruction massive pour deux des trois de leurs critères.
Depuis la guerre d’Irak, les Étasuniens et leurs alliés occidentaux n’ont jamais cessé d’utiliser ce type de munitions. Ils n’ont jamais reconnu, malgré toutes les preuves scientifiques et les enquêtes épidémiologiques, les conséquences de l’utilisation de munitions à l’uranium appauvri sur l’environnement et les populations.
Le cas français
En France, pays qui a produit et utilisé ces armements, la mission parlementaire d’information, présidée par Bernard Cazeneuve, ex-Premier ministre socialiste, a conclu, en 2001, à l’innocuité de l’UA, malgré les éléments apportés, alors, par l’association AVIGOLFE (Association des Victimes civiles et militaires de la Guerre du Golfe) et les scientifiques dont elle s’était entourée. Bernard Cazeneuve a sans aucun doute, été le défenseur le plus acharné du ministère français de la Défense, dans cette affaire, niant sans nuance l’ensemble des conséquences de la « sale guerre » du Golfe sur la santé des populations et des hommes sur le terrain, soit un ensemble de pathologies identifiées au regard de facteurs chimiques, biologiques et nucléaires.
Quinze ans plus tard, et malgré le travail remarquable de la juge d’instruction Marie-Odile Bertella-Geoffroy, « débarquée » en 2013, de son poste au pôle santé du tribunal de grande instance de Paris, les plaintes contre X déposées par les victimes ou leur famille dans le cas de décès, ont, en 2016, « bénéficié » d’un non-lieu. Dossier classé sans suite, donc, par le nouveau juge du Pôle santé de la Justice française, comme l’ont été ceux liés au scandale de la « vache folle » ou de l’amiante, qui avaient été également instruits par la juge Bertella-Geoffroy.
16 juin 2017