Jusqu’à maintenant, l’incompétence et le manque de solidarité de nos dirigeants laissaient craindre le pire (avec raison) quant aux conditions de vie qui seraient imposées aux plus fragiles d’entre nous pour régler cette crise qui n’en finit pas. Mais il semblerait qu’à force de tergiversations, de pourparlers interminables et de négociations impossibles, la situation économique de tous les pays d’Europe se soit tellement dégradée qu’elle s’approche aujourd’hui d’un point de non-retour qui, une fois dépassé, redistribuera les cartes d’une manière qui peut être favorable aux peuples.
Cette nouvelle -qui pourrait paraître anxiogène au citoyen déjà en difficulté -ne devrait pourtant pas l’effrayer : car en termes d’économies drastiques, de plans de sauvetage des banques ou de casse sociale, il est un seuil de misère et de contrainte au delà duquel nos gouvernants ne peuvent aller sans provoquer les révoltes que connaissent tous les Etats qui en abusent. Et c’est justement ce seuil qui se trouve déjà presque atteint.
Cela signifie que par exemple en Grèce, le gouvernement n’est pas en mesure d’imposer à son peuple des mesures d’austérité supplémentaires sans mettre en danger la stabilité non plus économique et sociale de son peuple mais tout simplement l’ordre public. Et ce n’est pas avec les coupes drastiques dans les budgets militaires ou des fonctionnaires (dont police, justice etc…) qu’ils seront en mesure de le rétablir par la force : on le voit en Syrie comme on l’a vu précédemment ailleurs, même un gouvernement autoritaire qui réprime la contestation dans le sang ne peut indéfiniment taper sur son peuple sans qu’il ne finisse par être débarqué… Et à moins que de souhaiter cette confrontation, les dirigeants de l’Europe vont bien devoir abandonner la spoliation continuelle des plus faibles pour aller chercher de l’argent là où ils savent qu’il se trouve, chez les riches.
Quand bien même d’ailleurs ils voudraient aller jusqu’à la confrontation, la structure administrative et juridique des Etats démocratiques européens ne permet ni la censure, ni le contrôle, ni la surveillance ou la répression dont les dictatures qui ont pourtant sauté ont largement abusé. La crise va trop vite, et il est fort probable que l’empire européen que nos dirigeants désirent créer, avec contrôle d’internet et surveillance des individus, ne sera pas prêt à temps pour éviter d’avoir à se confronter ou à leurs peuples, ou à leurs propres donneurs d’ordres.
La bataille va donc changer de nature, car les peuples ont désormais un avantage certain sur les riches, celui de ne plus rien avoir à perdre : les gouvernants se verront donc contraints de demander aux riches de faire des efforts (des vrais), et les riches seront contraints, d’une manière ou d’une autre, de payer (même un peu) : soit pour sauver l’Europe, soit pour la faire exploser.
En même temps que se déroulera cette bataille s’ouvrira alors une fenêtre d’action pour les peuples qui seront alors en mesure de faire entendre leur voix. Et il se peut que même leur silence soit bénéfique : car même en ne faisant rien ils auront toujours le plaisir d’assister à une guerre fratricide entre le pouvoir financier et le pouvoir politique, qui tous deux y laisseront forcément des plumes… A nous ensuite de savoir les ramasser !
Caleb Irri
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