« Nous devons agir. Agir ensemble et agir vite, car il y a urgence. La première des urgences s’appelle la Syrie ». L’autre priorité qui préoccupe le guerrier Hollande est le Sahel africain : « La dernière urgence, et c’est peut-être la première qui doit nous mobiliser cette semaine, est le Sahel(...) Oui, il faut que le Mali retrouve l’intégrité de son territoire et que le terrorisme soit écarté de cette zone du Sahel », disait le président belliqueux devant l’Assemblée générale des Nations Unies le 25 septembre 2012 (1). Alors que le chômage, la précarité et la misère matérielle et morale qui en découle font ravage en France, François Hollande déclare solennellement à New York que l’urgence aujourd’hui est l’intervention militaire en Syrie et au Sahel ! Guerre économique et sociale à l’intérieur et menaces de guerre à l’extérieur sont deux faces d’une seule et même politique. Ce fétichisme de la guerre va de pair avec le mépris de la social-démocratie pour les intérêts des classes populaires. La fabrication des ennemis à combattre, à l’intérieur comme à l’extérieur, permet aux sociaux-démocrates au pouvoir de mieux servir les intérêts de la classe dominante.
Les guerres extérieures désirées par le président Hollande, ne sont en fait que le prolongement de la guerre économique et sociale livrée sans trêve à l’intérieur par les sociaux-démocrates aux travailleurs et aux salariés en général. Pendant que François Hollande déclarait la guerre à la Syrie et poussait à l’intervention militaire au Mali, les députés, eux, se préparaient dans l’ombre à ratifier cette terrible arme économique que constitue le Traité européen de stabilité, de coordination et de gouvernance (TSCG). La quasi-simultanéité des déclarations guerrières de François Hollande aux Nations Unies et le vote du budget européen montrent que les deux dimensions de cette politique belliqueuse sont intimement liées. Les menaces de guerre proférées par François Hollande n’ont de sens que par rapport à la guerre de classes que la social-démocratie mène contre de larges couches de la population. Cet activisme guerrier à l’extérieur s’accompagne par une croisade à l’intérieur contre les intérêts des classes populaires. Son agressivité à l’égard des autres peuples n’est que l’expression de la violence économique qu’elle exerce à l’intérieur sur les travailleurs. Car la social-démocratie reste un rouage essentiel de l’exploitation capitaliste et un instrument redoutable de l’impérialisme. Elle est, à l’intérieur comme à l’extérieur, au service des classes dominantes.
Avec ces menaces guerrières à l’extérieur, les sociaux-démocrates tentent d’avoir la paix intérieure pour mieux mener à bien leur politique de misère contre les classes populaires. La fabrication des ennemis extérieurs leur permet de détourner la lutte des travailleurs contre les véritables responsables de la situation économique désastreuse pour la diriger et la concentrer sur des ennemis inventés de toutes pièces. Pour la social-démocratie au pouvoir, l’ennemi n’est pas le chômage, la précarité et la misère matérielle et morale qui rongent au quotidien la vie de millions d’hommes et de femmes en France, mais les « terroristes » qui occupent le Nord-Mali et le régime syrien. D’un côté, de véritables problèmes que l’on peut mesurer et quantifier, de l’autre, des ennemis créés et présentés comme dangereux et hostiles à l’intérêt de la nation, de la démocratie, des droits de l’homme etc. Alors que la France n’a pas véritablement d’ennemis, la bourgeoisie française et la social-démocratie qui sert ses intérêts inventent en permanence des ennemis à combattre. Derrière cette construction de l’ennemi, qui change selon les circonstances et le rapport de force, se cache la volonté du pouvoir de soumettre et de rassembler autour de sa politique ceux-là mêmes qui en sont les victimes, les classes populaires. Servir les oppresseurs nécessite le consentement et la soumission des opprimés.
Mais comme l’ennemi extérieur ne suffit pas, le gouvernement Hollande, comme celui de Nicolas Sarkozy avant lui, invente des ennemis intérieurs. « Je veux ainsi affirmer la détermination du gouvernement à lutter contre le terrorisme, de le faire tant à l’intérieur de notre pays qu’à l’extérieur de nos frontières » déclarait Jean-Marc Ayrault premier ministre (2). Car « La France doit être rassemblée, elle doit être rassemblée pour venir à bout de tous ceux qui croient pouvoir, par la violence, remettre en cause l’unité de la Nation » (3). Le mot « rassemblée » est utilisé deux fois dans la même phrase ! Rassembler la France autour de la politique d’austérité qui ravage la vie d’une partie de la population de plus en plus grande reste l’objectif à atteindre. Pour les sociaux-démocrates, ce qui est bon pour les puissants doit l’être également pour toute la population. Les intérêts des uns ne peuvent que coïncider avec les intérêts des autres. Les conflits de classes n’existent pas !
Les politiques d’austérité imposées par la bourgeoisie et appliquées avec un zèle singulier par le gouvernement en place, qui détruisent progressivement les droits et les acquis sociaux arrachés de haute lutte par la classe laborieuse au prix d’énormes sacrifices, sont bonnes pour l’ensemble de la population. Il y a longtemps que les sociaux-démocrates ont abandonné le marxisme et la lutte des classes. Ils sont par contre subjugués par le capitalisme, et les guerres impérialistes. La trahison des intérêts des travailleurs et la collaboration de classes sont une constante dans l’histoire de la social-démocratie (4).
Il faut donc, vaille que vaille, rassembler toute la nation autour du gouvernement et de sa politique.
C’est dans ce cadre qu’il faut situer cette « mobilisation la plus totale de l’État pour lutter contre toutes les menaces terroristes » comme le déclarait François Hollande lui-même (5). Car pour rassembler une population de plus en plus traumatisée par les effets des plans d’austérité à répétition, il faut lui trouver un ennemi ou des ennemis intérieurs qui puissent l’occuper et la détourner de ses véritables préoccupations. La théâtralisation et la médiatisation à outrance des opérations policières de « lutte contre le terrorisme » montrent que le pouvoir tente de convaincre la population que l’urgence du moment est la guerre contre « le terrorisme » (bien entendu « islamiste »). Les interventions, interpellations et autres perquisitions se font le plus souvent sous les projecteurs des caméras et les flashs des photographes. Les membres du gouvernement, du ministre de l’intérieur jusqu’au président de la République, prennent la relève et commentent à chaud les tenants et aboutissants du dossier et assurent la population de leur détermination totale à combattre « le terrorisme ».
Par contre le gouvernement est beaucoup plus discret sur les opérations de licenciements massifs opérés par les patrons des grandes et petites entreprises un peu partout en France et dans tous les secteurs de l’activité économique. Le sort des victimes de ce « terrorisme économique » n’intéresse pas vraiment les sociaux-démocrates au pouvoir. La « mobilisation la plus totale de l’État » est réservée à la lutte contre « le terrorisme » à l’intérieur comme à l’extérieur mais en aucun cas contre le chômage et la misère. Pire, la politique d’austérité menée avec beaucoup de cynisme par François Hollande et son gouvernement produit chaque jour qui passe de nouvelles victimes qui iront grossir les rangs des millions d’autres chômeurs. Les sociaux-démocrates sont ainsi très éloignés des préoccupations et des souffrances des classes populaires dont ils prétendent pourtant servir les intérêts.
Leur mépris des masses et leur vénération des puissants ont fait des sociaux-démocrates un instrument redoutable du capital. Par leur opportunisme et leur trahison des intérêts des travailleurs et de l’ensemble des classes populaires, les sociaux-démocrates perpétuent les injustices et les privilèges de ceux qui ont déjà tous les pouvoirs. Leur engagement total aux côtés de la classe dominante dans son offensive contre toutes les avancées sociales montre qu’ils sont résolument pour l’ordre établi avec toutes ses tares et tous ses dangers pour l’homme et la nature. Conservateurs, ils constituent un véritable obstacle à la transformation radicale de la société et au dépassement du capitalisme.
Mohamed Belaali