Le monde occidental voit filer tous les jours un peu plus les acquis nationaux et démocratiques sur lesquels il a prospéré et qu’il a gagnés autrefois au prix du sang et de la lutte. Pourtant les citoyens occidentaux, directement concernées, sont tétanisés par la peur de perdre les dernières miettes des acquis politiques et sociaux. Ils se croient toujours dans une zone de confort bien que fortement réduite.
Bref, au-delà de l’Occident c’est la planète entière qui observe la perte croissante et assurée de ce bien précieux qu’est la souveraineté des peuples au profit d’une élite émergente.
L’Occident a mal à sa démocratie. Les actions et attitudes du monde politique aggravent tous les jours un peu plus l’état du patient. Pourrions-nous arriver à la perte totale du système démocratique ? Et si tel devait être le cas, quelle serait alors l’alternative possible ? Ce questionnement soigneusement évité par les gouvernants est crucial quant à notre avenir et celui des générations à venir.
La démocratie – qui signifie souveraineté du peuple – est un système de gouvernement très récent à l’échelle de l’histoire humaine et la mettre en perspective de ce qui a été peut piquer les consciences afin d’éviter un retour en arrière. La démocratie n’est pas un état définitif acquis une fois pour toutes. Elle peut évoluer au fil du temps dans la bonne ou la mauvaise direction. On doit s’interroger sur les scenarii qui peuvent ravager les acquis de l’humanité.
Serait-il par exemple pensable d’assister à l’émergence d’un système totalitaire mondialiste ?
L’esclavage et le servage ont plus été la norme sur la planète terre que ne l’ont été la liberté et la souveraineté des peuples. Est-il impossible de les voir réapparaître même en Occident sous une forme ou une autre ?
La démocratie sous-entend une équité entre les citoyens. Ceux-ci jouissent alors d’un ensemble législatif qui leur garantissent des droits mais leur imposent des devoirs équivalents. Mais voilà quelque chose dans la nature de l’homme le pousse à vouloir prendre l’ascendant sur son voisin. C’est un fait observable. la volonté de gagner, vaincre, posséder et dominer a toujours nourri conflits et guerres.
Même les cours d’écoles enfantines pourraient en témoigner [1]. La création d’empires mais aussi de dictatures, de comportements colonisateurs, ségrégationnistes et fascistes est une conséquence de ce comportement humain qui n’a pas changé depuis la nuit des temps.
L’alternative a la démocratie est potentiellement un régime oligarchique ou totalitaire qui hiérarchise les habitants d’une région en fonction de leurs performances, leur richesse, leur appartenance sociale, communautaire…
Il y a dès lors l’élite qui a le droit d’influencer les choix politiques et le reste de la population considérée comme inapte à l’exercice du pouvoir.
C’est l’éternel problématique dominant-dominé. La longue histoire de l’esclavage ou du servage en témoigne. Nous y sommes confrontés à ce principe endémique de domination et d’appropriation des biens et de la vie d’autrui. La nature humaine porte en elle la capacité à exploiter ou asservir son prochain sans qu’un motif existentiel quelconque ne le justifie. En clair les motivations de domination d’une catégorie sociale ne sont pas objectives mais bel et bien subjectives.
Seules des pulsions narcissiques, égocentriques et hégémoniques peuvent le justifier… Les discours politiques et propagandistes fabriquent de toutes pièces les raisons qui justifieraient la fin. On peut penser à tous les déclencheurs des guerres récentes. Les raisons avancées ont à l’occasion été manipulées.
La nature humaine qui a mené autrefois à l’asservissement d’autrui n’a pas changé. Il existe et existera toujours de potentiels empereurs, dictateurs ou tyrans en herbe qui attendent leur heure de gloire et les lauriers. Certains sont plus atteints du syndrome que d’autres. Les plus dangereux sont ceux qui ont à la fois un discours démocratique anesthésiant, des aspirations mégalomaniaques mais aussi des compétences éprouvées et de puissants soutiens. Ils sont crédibles, arrivent à convaincre et exaltent la souffrance des peuples…
Ils érigent un dogme séduisant où ils promettent plein emploi, avantages sociaux, sécurité… Ils parlent abondamment de démocratie, de nation, d’identité et de droits de l’homme. Les électeurs peuvent être sonnés le jour où ils découvriraient la vraie face d’un tyran.
Ces leaders potentiellement à style totalitaire sont sans conteste cupides et avides de pouvoir. Mais au-delà de tout, c’est la toute-puissance, l’omnipotence et l’omniscience qui les intéressent. Ils se croient investis d’une mission divine ou se prennent carrément pour des dieux. Certains de leurs semblables sont dans des hôpitaux psychiatriques. D’autres croupissent en prison. Mais un certain nombre occupent des postes importants et leur véritable personnalité est inconnue du grand nombre… On a clairement entendu l’un ou l’autre dire qu’il accomplissait le travail de dieu…
Que faire s’ils arrivent à s’arroger un pouvoir militaire, nucléaire, financier ou législatif ? Les dégâts potentiels sont alors à la hauteur des dits pouvoirs. La remise en question des libertés fondamentales de ceux qu’ils dirigent – collaborateurs ou citoyens – a toutes les chances d’être une cible de choix.
Ces leaders à risque sont probablement des individus fortement narcissiques. Ils essaient de trouver des stratégies pour compenser un vide intérieur angoissant. L’argent est un moyen possible. Mais leur préférence ira vers la puissance. S’approprier la vie d’autrui a pour eux un effet dopant et anxiolytique… Leur esprit malade ne se formalise pas de la manipulation. Ils feraient n’importe quoi pour obtenir, rester et même étendre encore plus leur pouvoir.
Le citoyen doit absolument rester vigilant face aux discours politiques lénifiants et séduisants. Ils peuvent masquer des manœuvres mégalomaniaques. Une fois le pouvoir obtenu, l’élu peut y compris en démocratie placer à tout moment les bases d’un concept destructeur de libertés. Un peuple fort, uni, lucide et affirmé dynamise et enracine la démocratie. Il ne se laissera pas asservir. En revanche, un peuple en crise, divisé, humilié est plus facile à piéger. Il servira de proie idéale au(x) prédateur(s). Les peuples dirigés par des tyrans sont souvent sur le qui-vive, inquiets et épuisés psychologiquement et économiquement.
Le prédateur politique adore disposer d’une population à faible identité dotée d’une pauvre estime d’elle-même. C’est là qu’il se sent exister. Il lui sera alors facile de galvaniser les foules assoiffées de solutions par de vaines promesses de démocratie, de plein emploi, de pouvoir d’achat jamais tenues…
Liliane Held-Khawam