Le gouvernement américain a demandé à la Cour d’appel du district de Columbia de confirmer le rejet de la contestation par le journaliste américain Bilal Abdul Kareem de la décision apparente de son gouvernement de l’assassiner sans lui dire pourquoi, ni lui accorder le droit constitutionnel à une procédure régulière.
M. Kareem est un lauréat des prix Edward R. Murrow et Peabody, qui a grandi à Mount Vernon, New York, et était auparavant un comédien de stand-up à New York. Il a fait des reportages sur le conflit en Syrie depuis le début. En 2016, il a échappé de justesse à cinq assassinats, dont deux sur des voitures dans lesquelles il voyageait et deux autres au siège de son agence de presse, On The Ground News. Il pense que le gouvernement américain l’a identifié à tort comme un terroriste pour avoir interviewé des groupes armés en Syrie, une partie essentielle de son travail journalistique. Bilal expose les histoires inédites du conflit syrien et vise à construire un dialogue interculturel entre l’Est et l’Ouest. Il a été inspiré par sa mère, Phyliss Phelps - journaliste à l’époque des droits civils et membre à vie de la NAACP et de la Rainbow Coalition.
En juin 2018, le tribunal pour le district de Columbia a décidé que M. Kareem avait présenté un cas plausible de son inscription sur la "liste noire" et que, si cela était vrai, le gouvernement devait lui accorder le droit à une procédure régulière, rejetant la suggestion selon laquelle il s’agissait d’une "question politique" déléguée au président. Toutefois, sur une deuxième motion de rejet, le gouvernement américain a réussi à faire valoir que l’affaire ne pouvait être entendue sans référence à des secrets d’État dont la divulgation porterait atteinte à la sécurité nationale. Le rejet par le tribunal de l’affaire de M. Kareem signifie que le gouvernement peut secrètement prendre pour cible un journaliste américain, sans référence à la Constitution américaine.
M. Kareem a fait appel de la décision du tribunal auprès de la Cour d’appel du district de Columbia, en faisant valoir que le fait qu’un journaliste américain soit sur la liste des personnes à abattre ne devrait pas être un "secret d’État" et que la décision du tribunal inférieur permet simplement d’appliquer la peine de mort sans aucune procédure régulière. Le gouvernement américain a déposé son mémoire en réponse à l’appel de M. Kareem hier soir, affirmant que la nécessité de préserver les "secrets d’État" l’emporte sur le droit constitutionnel à la vie d’un citoyen américain et que l’affaire pose une question politique plutôt que juridique - ce dernier argument ayant été rejeté par le tribunal de district. À l’heure où la présomption de culpabilité et la violence sanctionnée par l’État dominent nos flux d’informations, Bilal Abdul Kareem pose simplement la question : "Essayez-vous de me tuer ? Et si oui, pourquoi ?
M. Kareem a déclaré : "Quand j’étais jeune, j’ai toujours eu un sens aigu de la justice. Ma mère me l’a inculqué, mais je le voyais aussi comme une valeur américaine. Je croyais que si vous faisiez quelque chose que vous ne deviez pas faire, vous auriez votre temps pour plaider votre cause au tribunal. Mais aujourd’hui, on me refuse ce droit. Je vis dans la crainte de mon propre gouvernement, car je travaille en tant que journaliste - pour exposer et contester des points de vue différents et favoriser la compréhension entre les cultures. Ici, en Syrie, dans l’une des guerres les plus violentes que le monde ait connues, j’essaie de défendre ces mêmes idées de justice, de transparence et de responsabilité. Si seulement mon gouvernement faisait de même".
Maya Foa de Reprieve, a déclaré : "Il devrait être impensable que le gouvernement américain cherche à exécuter de manière extrajudiciaire un journaliste américain en reportage dans une zone de guerre sans lui dire pourquoi il est visé, ou sans lui donner la possibilité de le contester. Ignorer la Constitution quand elle ne vous convient pas, c’est le comportement des dictateurs et des despotes. Le gouvernement américain doit cesser de se cacher derrière des "secrets d’État" pour éviter d’accorder à M. Kareem un procès en bonne et due forme - son droit le plus fondamental en tant qu’Américain".
Traduction "on en apprend tous les jours" par Viktor Dedaj pour le Grand Soir avec probablement toutes les fautes et coquilles habituelles