RSS SyndicationTwitterFacebook
Rechercher

Le courage des Palestiniens finira-t-il par provoquer une intervention internationale ? (RT)

Une manifestante court se mettre à l’abri pendant une manifestation, au sud de la bande de Gaza, le 25 mai 2018 © Ibraheem Abu Mustafa / Reuters

Au bout de 70 ans, le conflit israélo-palestinien n’est toujours pas résolu. Les hostilités couvent pendant quelques années, puis éclatent à nouveau en de nouveaux massacres et de nouvelles violences.

L’échec de la solution à deux États est consommé et les événements récents ont de nouveau mis en évidence la nécessité d’une approche différente. Au cours des deux derniers mois, les soldats des Forces de défense israéliennes (FDI) ont tué 118 manifestants palestiniens et en ont blessé gravement des milliers d’autres. Les manifestants n’étaient pas armés et ne menaçaient pas les soldats. Les hôpitaux de Gaza débordent de victimes.

Les groupes de défense des droits de l’homme ont demandé à la justice d’interdire aux soldats israéliens de tirer sur des manifestants non armés. La semaine dernière, la Cour suprême israélienne a rejeté leur requête.

La violence israélienne est généralement présentée comme une « réponse » à la violence palestinienne, mais c’est le contraire qui est vrai. Voilà comment les événements se sont déroulés :

 De fin mars au 25 mai, les Palestiniens de Gaza ont protesté contre l’oppression en approchant le plus possible des barrières frontalières. Environ 118 personnes ont été tuées et des milliers d’autres gravement blessées par des tireurs d’élite israéliens. Ils ont tous été abattus alors qu’ils se trouvaient à l’intérieur du territoire de Gaza.

 Les 27 et 28 mai, l’armée israélienne a tiré des mortiers de tanks sur les avant-postes militaires palestiniens à l’intérieur de Gaza, tuant au moins trois personnes.

 Le lendemain, le 29 mai, des militants palestiniens ont lancé des mortiers non guidés sur Israël. La plupart d’entre eux sont tombés sans faire de dégâts et il n’y a pas eu de victimes israéliennes.

 Puis, le 30 mai, des avions à réaction et des hélicoptères israéliens ont lancé des missiles guidés et des bombes sur 65 sites à l’intérieur de Gaza.

De toute évidence, ce sont les Israéliens qui ont déclenché la violence en tuant des manifestants puis des combattants à l’intérieur de Gaza, mais ce n’est pas décrit de cette façon. Time magazine a commencé son article par : « Les combattants palestiniens ont bombardé le sud d’Israël... »

Les soutiens d’Israël veulent empêcher les gens de voir ce qui se passe réellement. Ils savent quel tort peut leur causer des vidéos comme celle où l’on voit des tireurs d’élite israéliens s’amuser à dégommer des manifestants non armés. Pour éviter cela, un projet de loi va rendre illégal de photographier, d’enregistrer ou de filmer des soldats israéliens. Les journalistes palestiniens ont condamné cette tentative de criminaliser le journalisme.

La réalité de l’occupation israélienne

Israël se surnomme elle-même la ’ Nation Startup ’ en raison de ses succès économiques et technologiques. Mais à Gaza et en Cisjordanie, les décisions et les actions israéliennes étranglent l’économie, et détériorent les conditions de vie.

Les Palestiniens de Gaza sont complètement coupés des Palestiniens de Cisjordanie. Ils ne peuvent ni commercer entre eux, ni même se rendre visite. Cela constitue uneviolation des accords internationaux, y compris des accords d’Oslo.

Il est faux de dire qu’Israël a « quitté » Gaza. Israël contrôle les bordures, le ciel et les eaux de Gaza, qui est une bande côtière de moins de 10 km de large sur 40 de long. Le taux de chômage à Gaza approche les 50 %, soit le taux de chômage le plus élevé au monde. Les pêcheurs n’ont pas le droit d’aller pêcher dans les eaux plus profondes et ils se font tirer dessus lorsqu’ils sortent de la zone imposée par Israël. Les agriculteurs de Gaza ne peuvent pas exporter normalement. Israël bloque fréquemment l’importation et l’exportation des cultures et des produits. Il est presque impossible de quitter Gaza. Même les étudiants brillants qui obtiennent des bourses d’études internationales peuvent se voir empêchés de sortir. Les installations électriques et de traitement de l’eau ont été bombardées et détruites par Israël. Presque toute l’eau potable est contaminée. Israël restreint la quantité de nourriture autorisée à entrer à Gaza, de sorte qu’il y a une pénurie continuelle, ce qui entraîne malnutrition, retard de croissance et anémie.

Cette situation n’est pas nouvelle. Il y a dix-huit ans, la journaliste israélienne Amira Hass a relaté l’histoire de Gaza, avec des faits et des statistiques, ainsi que son expérience personnelle de la vie à Gaza dans son impressionnant ouvrage « Boire l’eau de mer à Gaza : Les jours et les nuits en territoire assiégé ». La situation était extrêmement sombre à l’époque, et elle ne cesse de s’aggraver.

A la frontière nord de Gaza, Israël est en train de construire une « barrière maritime », une digue qui avancera loin dans la Méditerranée. La principale raison de ce projet coûteux est d’obliger les eaux usées à rester devant Gaza. En raison des attaques israéliennes contre le traitement des eaux usées et l’infrastructure électrique, les eaux usées se déversent dans la mer. L’été dernier, la plage de Zikim Beach, dans le sud d’Israël, a dû être fermée en raison de l’arrivée d’eaux usées en provenance de Gaza. La « barrière maritime » actuellement en construction bloquera les courants marins.

La plage israélienne restera propre et le problème à Gaza s’aggravera considérablement.

Il n’y a pas que Gaza qui est étranglé, appauvri et opprimé. En Cisjordanie, les colonies israéliennes continuent de s’étendre. Cela augmente le nombre de points de contrôle, les restrictions et la répression. Les Palestiniens ne peuvent quasiment plus aller de Bethléem à Jérusalem. La plus grande partie de l’eau des aquifères de Cisjordanie est transférée en Israël ou distribuée aux colons au rabais, tandis que les Palestiniens doivent acheter de l’eau et la stocker dans des réservoirs sur leurs toits. Ces dernières années, Israël empêche de plus en plus les groupes humanitaires de fournir un soutien médical, dont le dépistage du cancer du sein. Un nouveau livre fascinant intitulé « L’autre côté du mur » décrit la lutte quotidienne en Cisjordanie, où les Palestiniens et leurs alliés internationaux protestent contre le vol de terres, les abus, les assassinats et les emprisonnements.

Un défi héroïque

On constate actuellement une plus grande unité chez les Palestiniens qui semblent s’être mis d’accord sur une stratégie. Les dizaines de milliers de Palestiniens qui manifestaient à Gaza n’étaient pas armés et étaient unis derrière le drapeau palestinien, au lieu d’arborer des drapeaux du Hamas, du Jihad islamique, du Front populaire de libération de la Palestine ou du Front démocratique de libération de la Palestine.

Les manifestants palestiniens à Gaza font preuve d’un courage incroyable. Depuis le vendredi 30 mars, ils reviennent semaine après semaine, bien que des milliers de leurs compagnons aient été abattus ou blessés.

Dans un article intitulé « La clôture sépare les courageux des lâches », Amira Hass a écrit : « Le courage éperdu dont font preuve des dizaines de milliers de citoyens de Gaza ces dernières semaines, d’une manière générale et le lundi en particulier, témoigne de l’énergie, des talents, des rêves, de la créativité et de la vitalité des habitants de cette bande de terre, qui sont soumis depuis 27 ans à une politique de bouclage et de siège visant à les étouffer et à les écraser ».

Avec détermination et constance

La résistance palestinienne se poursuit malgré la violence israélienne et le sang palestinien versé par les Israéliens. Il y a sept ans, des réfugiés palestiniens en Syrie et au Liban ont organisé des « Marches du retour » à la frontière nord d’Israël. Les soldats israéliens ont tué 13 personnes et en ont blessé beaucoup d’autres.

Ces derniers jours, les Gazaouis ont de nouveau tenté de briser le blocus portuaire israélien qui empêche les bateaux de partir ou d’arriver. La solidarité internationale avec la cause palestinienne ne faiblit pas non plus. Trois navires (deux suédois et un norvégien) ont récemment quitté la Scandinavie en direction de la Méditerranée et de Gaza. La flottille qui a pris le nom de Flottille de la Liberté 2018, transporte des dizaines de citoyens internationaux qui exigent une fois de plus qu’Israël mette fin à son blocus de Gaza.

Malgré l’énorme déséquilibre actuel, le temps sert sans doute la cause palestinienne. L’apartheid d’Afrique du Sud existait depuis longtemps et semblait fort. Mais en fin de compte, il s’est effondré rapidement. La même chose peut se produire en Israël/Palestine.

Aujourd’hui, l’Afrique du Sud est un important défenseur de la cause palestinienne. L’Afrique du Sud a été la première nation à rappeler son ambassadeur « en raison du caractère grave et aveugle de la dernière attaque israélienne » à Gaza.

Israël a la puissance militaire, mais la résistance palestinienne ne se laisse pas décourager. La population palestinienne est déterminée, et elle augmente. Les Palestiniens ont de plus en plus d’alliés qui soutiennent leur cause. Les jeunes juifs américains ne sont pas comme leurs parents et critiquent de plus en plus la politique israélienne. Certains Israéliens courageux, comme Miko Peled, affirment sans équivoque que l’apartheid israélien doit prendre fin et qu’il doit être remplacé par un seul État qui garantira la démocratie et l’égalité à tous ses citoyens. Un million de réfugiés palestiniens vivent au Liban et en Syrie, et attendent patiemment de revenir dans leur pays. Ils n’ont pas oublié leurs droits et notamment leur droit au retour.

Les derniers massacres et le sang qui vient encore d’être versé prouvent bien que la voie actuelle n’est pas la solution. Son seul résultat est une situation de plus en plus invivables à Gaza, et toujours plus de colonies de peuplement illégales et d’oppression en Cisjordanie. La soi-disant « solution à deux États » est morte depuis de nombreuses années, et il faut l’oublier. Comme cela s’est produit en Afrique du Sud, la communauté internationale peut et doit aider. Il est temps d’augmenter la pression internationale et d’étendre le BDS (boycott, désinvestissement et sanctions) contre Israël pour mettre fin pacifiquement à ce conflit, caractérisé par l’oppression incessante d’un peuple régulièrement massacré.

Sinon ce sera la catastrophe. Comme l’a écrit le journaliste israélien Gideon Levy, « La vérité est qu’Israël est tout à fait prêt à massacrer des centaines et même des milliers de personnes et à en expulser des dizaines de milliers. Rien ne l’arrêtera. Il n’y plus de conscience morale. C’en est même fini des postures. Les événements de ces derniers jours l’ont clairement montré. La route est tracée, le convoi de l’horreur est prêt à partir. Des dizaines d’années de lavage de cerveau, de diabolisation et de déshumanisation ont fait leur œuvre. L’alliance entre les politiciens et les médias pour oblitérer la réalité et la nier a été conclue. Israël est prêt à commettre l’indicible. Personne ne se mettra plus en travers de son chemin. Ni de l’intérieur, ni de l’extérieur. »

Espérons que le courage des Palestiniens incitera le reste du monde à intervenir !

Rick Sterling

Rick Sterling est un journaliste d’investigation basé dans la région de San Francisco. Il peut être contacté à rsterling1@gmail.com

Traduction : Dominique Muselet

»» https://www.rt.com/op-ed/428692-israeli-palestinian-conflict-violence/
URL de cet article 33473
   
Même Thème
« Des Palestiniens s’expriment – Notre vision pour la libération » par Ilan Pappé et Ramzy Baroud
Palestine Chronicle
Cet ouvrage, disponible à présent en français, est composé d’une trentaine de contributions rédigées, à l’occasion de ce projet de publication, par des intellectuels, acteurs, responsables de la société civile palestinienne. La réunion de ces contributions a été faite par M. Ramzy Baroud, journaliste, analyste, chercheur, écrivain palestinien résidant aux Etats-Unis, ainsi que par M. Ilan Pappé, écrivain, chercheur, universitaire israélien résidant en Grande-Bretagne. Comme ces deux (…)
Agrandir | voir bibliographie

 

Le déficit de l’Etat était l’objet même de spéculations. A la fin de chaque année, nouveau déficit. Au bout de quatre ou cinq ans, nouvel emprunt. Or chaque emprunt fournissait à l’aristocratie une nouvelle occasion de rançonner l’Etat, qui, maintenu artificiellement au bord de la banqueroute, était obligé de traiter avec les banquiers dans des conditions toujours plus défavorables.

Karl Marx
La lutte des classes en France. 1850

© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.