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Gros sur la patate !

Toutes ressemblances avec des lieux, des personnages existant ou ayant existé seraient tout à fait fortuites, ceci est une fiction…quoique !

Il y a une ferme à vendre à la pointe du Raz.

Super…, dans un paysage magnifique battu par les vents un bidouilleur y avait implanté une porcherie industrielle. Avec le vent qui balaie sans cesse ce bout de terre privilégié on sentait la présence du cochon jusqu’à Douarnenez. Et s’il n’y avait que cela, l’azote, en surabondance du fait de méthodes culturales productivistes ayant pour résultat un épandage de lisier trop souvent répété, s’était écoulée à la mer et avait rendu la baie d’Audierne toute verte infestée d’algues invasives, l’ulve de son vrai nom.

Dans un premier temps, au lieu de diminuer le nombre de ces pauvres bêtes serrées dans leur univers concentrationnaire et de remplacer les caillebotis par de la paille on a avancé l’idée de la méthanisation du lisier. En soit, l’idée de méthanisation n’est pas mauvaise mais on a oublié que le lisier était trop liquide donc on a rajouté du maïs qui n’étant pas bio apporta aussi une dose d’azote conséquente dans le composte qui résulte de la fabrication du méthane, on tournait en rond en quelque sorte. D’autant que l’on utilisait aussi la méthanisation pour se débarrasser de l’algue verte ramassée à grand frais. Finalement, en plus du désastre écologique, toutes ces inhérences avaient un coût exorbitant laissé au bon soin du lampiste qui non content de manger un cochon dégueulasse saturé d’antibiotique et autres cochonneries antibactériennes devait aussi payer la note par le biais de ses impôts. Alors le bon peuple en a eu marre et a gueulé !

C’est rare, mais ça été efficace car l’empoisonneur a mis les clés sur la porte et a décampé, la ferme est donc à vendre. Les productivistes invétérés trouverons cela dommage car avec le retour des farines animales le bidouilleur aurait fait dans le maximum de rendement ce qui est le seul but recherché par ce genre d’individu….

Vendue fort cher d’ailleurs ! Ce n’est pas que la terre soit la meilleure pour l’agriculture, mais l’emplacement est remarquable, la « fin de la terre » comme on l’a cru longtemps avant que l’on découvre les Amériques. Alors les clients furent nombreux ; on ne fera pas un état exact des diverses situations qui firent que les projets des candidats n’aboutirent pas, mais on peut citer par exemple ce couple qui voulut faire de l’agriculture bio, plus précisément élever des chèvres et des moutons de Ouessant, ce petit mouton noir si bien adapté aux terres ventées. D’abord ils étaient de la ville ce qui est une tare congénitale pour être paysan, ils n’avaient pas le cursus universitaire nécessaire pour planter des poireaux, et pour ne rien arranger leurs parents n’étaient pas nés avant eux ce qui fait que le banquier du Crédit-boeuf les a regardé goguenard, d’autant plus que financer du bio ce n’était pas trop dans le style de la maison, on est plus habitué à financer le super tracteur quatre roues motrices, la moissonneuse avec à bord un ordinateur qu’un chétif troupeaux de chèvres ! A la limite, on aurait peut-être tenté de les aider s’ils avaient écoulé leurs productions dans un restaurant qu’ils auraient tenu en faisant un peu couleur locale. Seulement voilà , ces ignares avaient dit qu’ils ne venaient pas là pour monter une usine à touristes mais pour être en harmonie avec ces lieux encore préservés.

Pour tout dire, c’est le « Projet », le projet avec un grand « P » qui a remporté le marché. C’est un paysan…euh, non, plutôt un quidam pratiquement plus agriculteur mais tout à fait industriel qui va avoir droit aux subventions et aides de toutes sortes puisque ses propositions sont pleines d’ambitions productivistes et mercantiles en direction du marché de la patate.

Impressionné par le succès de la patate de sable, la pomme de terre de l’Ile de Ré, un agro-industriel c’était dit qu’en créant un nouveau label qui utiliserait la renommée de la Pointe on allait tout droit vers la fortune. Il avait même déjà trouvé le slogan : « Quand vous en avez ras la patate retrouvez la frite avec la pomme de terre du Raz ! ». Peu importe que la terre soit assez pauvre pour espérer naturellement une récolte abondante, le technicien l’avait dit, on mettra ce qu’il faudra et le rendement sera là . De grosses pulvérisations de produits de chez Monsanto ou Bayer pour arrêter les maladies et tuer les doryphores, et le tour était joué pour produire des centaines de tonnes de ladite patate. La panacée productiviste, en somme…

Evidement, le banquier avait plongé dans le business et l’on a vu tout de suite arriver un super tracteur, un pulvérisateur automoteur, une arracheuse et divers accessoire aratoires modernes et surdimensionnés, le tout pour un investissement conséquent. Peu importe, avec les garanties techniques et productivistes cautionnées par la chambre d’agriculture les risques étaient donc minimes.

De surcroit pour plus de garantie on prit des plants venant de l’ile de Ré comme cela on était à peu près sur qu’ils étaient habitués au climat marin. Malgré toutes ces débauches de technicité, la première année fut un désastre, le rendement fut tellement minable qu’il mit la communauté scientifique en émoi, on déplaça donc un ingénieur de l’INRA. La sommité trouva vite les causes qui étaient que l’iode et la salinité abondante de l’air été mal appréciées, ce dont à quoi il remédia aussitôt en apportant encore plus de complément à la terre afin de fortifier la plante et d’en assurer le rendement. Ce n’était pas plus compliqué que cela, et effectivement le résultat fait que l’agro-businessman pense s’agrandir pour produire encore plus et tenter de faire coter en bourse la fameuse patate, quant au goût c’est une autre histoire…

Pourtant, pendant ce temps là , chez nous on a continué à manger des patates qui viennent de cher le Père Loïc. Il n’habite pas loin de la pointe, dans une de ces maisons basses en granit entourées d’un petit muret en pierre simplement posée les unes sur les autre. Et derrière ce coupe-vent y pousse une patate magnifique. Alors on va en chercher tout les ans cinquante kilo que l’ancien conditionne soigneusement dans un vieux et solide sac de jute, mais c’est lorsque l’on va payer notre dû qu’autour d’un verre de cidre le Père Loïc nous vante sa patate.

Comme il dit si bien : j’peux pas en faire cadeaux ! Il faut bien que je donne une petite pièce au jeune Yves qui est si prompte à atteler le têtu cob breton à crinière blonde pour aller ramasser un tombereau de « goémon » pour la fumure. Si par hasard il y avait un peu de maladie, juste un petit coup de bouillie bordelaise sera parfait pour enrayer la chose, quant aux doryphores on les aspergera de savon noir pour tenter de les noyer, mais surtout il faut prendre la précaution de bien ramasser les larves sur le sol afin de limiter les dégâts de cet insecte ravageur. Pour toutes ces raisons, le plus souvent possible, l’ancien échange sa récolte contre autre chose, particulièrement du bois pour la cheminée car les arbres ne poussent pas facilement sur la pointe.

Mais Père Loïc, c’est quelle variété cette patate ?

Bé, c’est la patate du Raz ! Mais pour tout dire, il y pas mal de générations de cela, peut-être même à la fin du XIXème siècle, il paraitrait qu’un habitant d’ici aurait ramené des plants de patate de l’Ile de Ré. Ce ne fut pas facile car ce n’est qu’au bout de pas mal d’années qu’elles se sont vraiment acclimatées, les gars du coin ont du manger autre chose avant que cette plante donne correctement, maintenant les tubercules sont parfaites et ont bien le goût et l’odeur de la Pointe, pourtant elles n’ont pas de label !

En chargeant le sac dans ma vielle brouette en bois je m’imaginais assis devant ma cheminée, pensif, avec un oeil sur le diable, qui avait le cul dans la braise, dans lequel cuisaient doucement à sec quelques patates non pelées en compagnie de gousses d’ail ; et en tournant l’ustensile de façon régulière pour répartir la chaleur mes papilles gustatives s’excitaient d’envies par avance en pensant au régal à venir lorsque je couperai la tubercule chaude en deux pour l’oindre de beurre demi-sel breton, et la mangerai à la petite cuillère, ce qui est le privilège des mets de choix.

Mais, j’en avais aussi gros sur la patate, le Père Loïc a 82 ans, quand il ne sera plus là , qu’est-ce que je vais manger ?

Michel Mengneau

http://le-ragondin-furieux.blog4ever.com

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John Swinton, célèbre journaliste, le 25 septembre 1880, lors d’un banquet à New York quand on lui propose de porter un toast à la liberté de la presse

(Cité dans : Labor’s Untold Story, de Richard O. Boyer and Herbert M. Morais, NY, 1955/1979.)

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