Qui a dit que Sarkozy et Juppé ne s’entendaient pas ? La police municipale de Bordeaux dont M. Juppé est le patron, semble pourtant appliquer à la lettre les consignes du ministre de l’intérieur pour ce qui concerne les pauvres, les jeunes et les "pas-de-chez-nous". Trois jeunes femmes bordelaises ont assisté aux exploits des valeureux municipaux girondins. Elles témoignent.
Jeudi 30 janvier. 20h55. Quartier Saint Michel, à Bordeaux. A l’angle de la rue Carpenteyre et de la rue Planterose.
Trois hommes (un punk, un SDF et un jeune Arabe) marchent dans la rue, semblant être en état d’ébriété. Ils crient un peu fort. Rien d’exceptionnel pour le quotidien bordelais...
Soudain, surgis de nulle part, trois municipaux et deux clébards. A peine leur phrase commencée « Mais qu’est-ce qui se passe ici ? » que les deux chiens, en colère (comme leurs trois compères), ont déjà mis deux des « délinquants » par terre ! Le troisième « intrus », lui, reçoit un coup de matraque… Rapidement immobilisés, les individus ne montrent aucune velléité. Nous nous arrêtons indignées, imposant notre présence pour voir jusqu’où la violence des policiers peut monter. Nous voyant ainsi témoins, ils se calment. Le plus âgé d’entre eux parait même embarrassé…
L’ambiance apaisée, nous empruntons la rue Carpenteyre, en direction de notre soirée. Une centaine de mètres plus loin, voilà que nous alertent des aboiements de chiens. Puis des cris… d’êtres humains. Demi tour, au pas de course, nous apercevons au bout de la rue un attroupement de gens béats devant l’altercation.
Au moment où nous arrivons devant la scène, un quatrième larron est en train de se faire chausser et matraquer par trois des policiers (ils sont maintenant quatre eux aussi). Les trois autres interpellés, le visage en sang, sont maintenus en respect par terre, par les chiens toujours excités. Le plus âgé des policiers se montre de plus en plus mal à l’aise à la vue du public grandissant qui commence à réagir verbalement. Comprenant alors que l’action va trop loin, les policiers cessent toute violence physique (mais pas orale). Notons que les quatre interpellés n’opposent toujours aucune résistance mais tentent plutôt de calmer la situation. Sur ce, les renforts arrivent : trois voitures banalisées et un fourgon. Nous en sommes donc maintenant à quatre « délinquants » et une dizaine de policiers.
Trois des interpellés sont rapidement menottés, à genoux, face au mur ; le plus violenté des quatre restant sur le pavé. Menotté à terre et sincèrement mal en point (effet cumulé, certainement, des coups reçus et de l’alcool qu’il semblait avoir bu), il est traîné par deux policiers pour se tenir à genoux. Un conducteur malchanceux, cherchant à se frayer un passage au milieu de cet attroupement bénéficie lui aussi de la bonne humeur des policiers et prend un coup sur le capot.
Fin de la scène publique. Ils se font embarquer pendant que les témoins choqués s’inquiètent de la nuit qu’ils vont passer au commissariat. On entend même prononcer ça et là les noms de certains de nos dirigeants. Leur politique ne favoriserait-elle pas ces comportements ?
Espérons en tout cas que ce genre de scène ne se banalisera pas. De notre côté, nous partons à notre soirée, désabusées de voir que l’on n’est pas à l’abri de se faire démolir la façade pour un petit coup dans le nez !!!
Cindy, Sophie et Gaelle, reporters malgré elles.