12 septembre 2006.
Ce dimanche 10 septembre, lors de la réunion des 600 délégués de collectifs locaux pour une alternative antilibérale de gauche et des candidatures unitaires, plusieurs délégués ont souhaité qu’Yves Salesse présente sa candidature pour porter le "non" de gauche lors de l’élection présidentielle. Je m’en réjouis et je veux ajouter ma voix à celles qui se sont exprimées dimanche. En toute indépendance. Sans qu’il me l’ait demandé ; sans que je l’en ai informé.
Voici une candidature qui n’est pas autoproclamée, qui n’est pas annoncée par voie de presse, qui vient spontanément de la base. Des gens, en toute indépendance, reconnaissent une personnalité qu’ils ont appris à connaître tout au long de la campagne référendaire et apportent son nom dans le débat, en dehors de toute pression d’appareil ou de toute valorisation médiatique.
Pourquoi Yves, alors que j’ai du respect et de l’estime pour Marie George, une chaude sympathie pour Olivier et une vraie amitié pour José ? Parce que la seule préoccupation qui m’anime, c’est de répondre de la meilleure façon à la seule question qui compte à mes yeux : qui peut apporter sur son nom le plus grand nombre des voix qui ont formulé un "non" de gauche le 29 mai ?
A cette question, il faut répondre en faisant abstraction de ses sentiments et de ses préférences. Dès lors qu’on est d’accord sur le contenu, les préférences pour une formation politique ou pour un courant de pensée ne sont pas des critères pertinents. Le débat n’est pas entre une candidature issue d’un parti ou pas. Nous avons été tous ensemble, militants de partis, de syndicats, d’associations et personnes non encartées pour battre le TCE. Et chacune de nos appartenances est éminemment respectable, y compris le fait d’assumer ses choix sans la protection d’une structure. Nous sommes tous des militants du 29 mai. Mais nous sommes piégés dans un système institutionnel et nous sommes obligés de l’appliquer si nous voulons être en mesure de le changer. Il nous faut donc faire un calcul froid pour répondre à la question : qui peut réunir le plus de voix ?
Chacun des candidats connus depuis des semaines est affecté d’un handicap. Demandez à Jean-Luc Mélanchon ou à Francine Bavay si les électeurs socialistes ou écologistes qui ont voté "non" en 2005 sont prêts à voter pour Marie George ou pour Olivier. Demandez à des ouvriers, à des chômeurs, à des sans logement, à ceux, dans les banlieues, qui ne votaient plus et qui sont allés voter "non" le 29 mai s’ils sont prêts à voter pour José.
Par contre, j’ai la conviction qu’Yves peut rassembler toutes ces voix.
"Mais il n’est connu que des militants du 29 mai !" me direz-vous. C’est vrai. Mais s’il est choisi, l’évènement que constituera le choix d’un candidat commun à toute la gauche du "non" le fera connaître immédiatement. J’ajoute que nous refusons de céder à la media mania, que notre campagne, comme celle contre le TCE, se fera dans un dialogue direct avec les gens, par des milliers de rencontres, sans négliger les plateaux de télé, mais sans leur conférer l’exclusivité du débat.
Plus que personne d’autre, Yves Salesse incarne le rassemblement antilibéral. C’est lui, qui au coeur de l’été 2004, a réuni toutes les sensibilités de gauche hostiles à l’Europe néolibérale pour écrire ce qui allait devenir l’Appel des 200. C’est lui qui fut à l’initiative des collectifs pour "un non de gauche au TCE". C’est lui qui impulsa leur transformation en collectifs du 29 mai. C’est lui qui rédigea la première mouture de ce qui allait devenir l’Appel du 11 mai pour un rassemblement antilibéral de gauche et des candidatures communes. Il fut de ceux qui ont nourri de leurs propositions la Charte antilibérale et les autres documents qui donnent du contenu à l’alternative que nous voulons.
Chaque fois qu’il a été amené à débattre avec un contradicteur, chacun a pu apprécier sa maîtrise des dossiers et sa capacité à relever les arguments adverses. Il en est peu comme lui qui sont en mesure d’affronter les adversaires les plus solides sur les questions nationales, européennes et internationales, sur les matières financières, économiques et sociales, sur les problématiques environnementales.
Sa compétence et le rôle central qu’il joue dans la démarche antilibérale de gauche depuis deux ans le désignent pour être le candidat du rassemblement, le candidat soutenu par toutes les sensibilités, par tous les électorats de gauche qui ont dit "non" au néolibéralisme.
De plus, qui mieux que lui, sans cesse au contact avec toutes les composantes de la gauche du "non", pourra contribuer au succès du choix unitaire des candidatures pour les élections législatives ?
Sans doute, à la différence de candidatures "people", Yves n’affiche pas toujours le sourire du marchand de dentifrice. Mais c’est avec la chaleur d’un Jaurès qu’il défend ses convictions. Et cette chaleur-là vaut mieux que tous les artifices.
Parce qu’il peut le plus rassembler, parce qu’il dispose du savoir et du savoir faire, je souhaite qu’il réponde positivement à l’appel de celles et de ceux qui sont convaincus qu’Yves Salesse est le meilleur pour changer la donne à gauche.
Raoul Marc JENNAR
Militant du 29 mai
Mosset, 20 septembre 2006
A propos d’ Yves Salesse
J’ai reçu beaucoup de réponses à mon message appelant, après d’autres, Yves Salesse à « mettre sa candidature dans le débat », pour utiliser une expression désormais consacrée. Les réactions, dans leur très grande majorité, sont positives. Certaines sont même enthousiastes. Quelques-unes appellent, bien naturellement, des compléments d’information.
« C’est un énarque » m’écrit quelqu’un. C’est vrai. Mais, c’est loin d’être un énarque classique. Ce fils d’instituteurs de province a vécu au SMIC jusqu’à son entrée à l’ENA à 41 ans. Il a été longtemps militant syndical, notamment secrétaire adjoint du syndicat CGT de la gare du Nord (Paris), pendant une dizaine d’années. Il était aussi délégué des personnels contractuels, c’est-à -dire les personnels les plus vulnérables, majoritairement des femmes immigrées. Tout cela l’a marqué et il porte une expérience personnelle concrète de la vie difficile, de la situation des précaires et des immigrés. Son syndicalisme l’a mené sur la voie du licenciement et c’est alors qu’il a passé le concours de l’ENA (3e voie) et fait des études d’économie.
Il est « sans expérience politique » écrit un autre correspondant. Aujourd’hui, Yves n’appartient à aucun parti. Ce n’est pas un professionnel de la politique. Mais il a été longtemps l’un des responsables de la LCR. De 1997 à 1999, il a travaillé au cabinet de J.-C. Gayssot (Transports), chargé des affaires européennes et internationales. Il a mis fin à cette expérience, en 1999, en désaccord avec l’orientation du gouvernement Jospin. Il en a tiré les leçons dans un livre : « Réformes et révolution : propositions pour une gauche de gauche » (Agone, 2001). Cela fait quand même une sérieuse expérience politique et une forte capacité à prendre du recul en restant fidèle à ses convictions et engagements.
« Un conseiller d’Etat, ce n’est pas une bonne image pour les milieux populaires » écrit un autre interlocuteur. Je pense le contraire. Parce que dans nos milieux modestes, on apprécie que l’un d’entre nous fasse des études, réussisse et ne trahisse pas son engagement passé. Parce que nous avons besoin de gens qui ont l’expérience de la « machine » et apportent le crédit de l’expertise officielle. J’ajoute que son statut conforte l’idée que nous ne présentons pas une candidature de témoignage. Il est important qu’on puisse dire de notre candidate ou candidat, même si nous relativisons sa place et insistons sur le caractère collectif de notre campagne, qu’il serait capable d’être Président de la République.
« Il n’est connu que des militants du 29 mai » écrit-on. J’ai répondu par avance à cette objection. En plus, ce n’est pas tout à fait vrai : Yves était connu, avant la campagne du « Non », dans des milieux très divers, par ses livres et ses travaux. La place qu’il a occupée dans la campagne l’a fait connaître bien au delà des cercles militants. Il a tenu de très nombreuses réunions publiques, écrit des tribunes qui ont touché un vaste public et suscité le débat (Pervenche Berès l’avait pris à partie dans Le Monde, Pisani-Ferry dans Libération). Bien des gens se souviennent de ses passages à la radio ou à la télé, notamment face à Moscovici, De Villiers ou Hollande.
Enfin, un correspondant craint qu’il ne « passe pas bien » chez les communistes. Je me souviens qu’en 2004, lorsque l’exécutif du PC a proposé à ses fédérations que des non-membres du parti soient têtes de liste aux élections européennes dans trois circonscriptions, Yves a été le seul à être accepté (pour la région grand S-E). C’est lui qui a refusé alors. Parce qu’une seule tête de liste non-PC représentait une ouverture insuffisante et qu’accepter aurait été se désolidariser des autres candidats non-PC pressentis. Cela n’a pas empêché Yves de soutenir la liste d’ouverture du PC dans la région Ile-de-France et de co-présider le comité de soutien à cette liste.
Autres précisions : Yves s’est mis en congé de la co-présidence de la Fondation Copernic depuis plusieurs mois pour mener la bataille pour la candidature unitaire. Sa fonction au Conseil d’État ne lui interdit nullement d’être candidat à une élection.
Yves a aussi pour lui son travail approfondi sur une série de sujets clés pour les campagnes de 2007 : les services publics, l’État et la démocratie, l’Europe, les rapports avec le Sud. Il faut ajouter sa participation aux différents lieux d’élaboration de nos propositions, notamment les groupes Copernic et, maintenant, le groupe projet. Outre le livre déjà cité, je mentionnerai, parmi d’autres, le « Manifeste pour une autre Europe » (Editions du Félin, 2004).
Telles sont à mes yeux des raisons supplémentaires à celles avancées dans mon message du 12 septembre pour soutenir une candidature qui a maintenant été formellement soumise au Collectif national.
Raoul Marc Jennar
Militant du 29 mai