Les autorités brésiliennes veulent engager 6 000 médecins cubains. Ils seraient affectés dans des régions isolées du pays, régions pauvres du Nordeste ou de l’Amazonie, là où les structures de santé sont déficientes et où les médecins brésiliens ne veulent pas aller. Le projet est d’ailleurs contesté par le Conseil brésilien des médecins qui juge "irresponsable" de faire appel à des médecins cubains dont la formation universitaire, affirme-t-il, est insuffisante (*). Il réclame que tout médecin étranger se soumette à un contrôle de ses connaissances et de ses compétences avant d’être autorisé à exercer au Brésil.
Le ministre brésilien des Affaires étrangères, Antonio Patriota, a précisé hier que des négociations étaient en cours pour permettre à ces médecins cubains d’exercer au Brésil. L’Organisation panaméricaine de la santé (PAHO), basée à Washington, participe à ces discussions. En contrepartie, le Brésil financerait la modernisation de cinq terrains d’aviation cubains.
Michel Taupin
Cuba Si
(*) Formation des médecins internationalistes cubains :
ELAM : Ecole Latino-américaine de Médecine (Escuela Latinoamericana de Medicina). L’ELAM a été fondée il y a douze ans à Santa Fe, à Playa, à 90 minutes d’autobus de La Havane. Les étudiants y jouent un rôle central. Avec le coût de leurs études couvert par l’État cubain, les étudiants apprennent une nouvelle conception des relations sociales liées à la pratique médicale, conception dont ils auront besoin dans leur travail dans des communautés défavorisées de leur pays. Une large majorité d’étudiants vient de pays qui souhaitent désespérément envoyer des étudiants à l’ELAM pour qu’ils deviennent des médecins formés à la cubaine. Ce n’est pas le cas du Brésil et des États-Unis.
L’Association Médicale Brésilienne, Colégio Médico, a une politique distincte de celle du gouvernement Lula et ne reconnaît pas les diplômes de l’ELAM. Les étudiants étasuniens n’ont pas ce problème, mais ils doivent passer certains examens comme tous ceux qui reçoivent un diplôme étranger, et étudier intensément les questions qui relèvent du modèle médical étasunien plutôt que cubain.
Peut-être que l’antagonisme extrême du pays le plus violent de la planète est une confirmation du pouvoir de l’ELAM. Le modèle cubain de santé publique cherche à comprendre les problèmes médicaux en étudiant l’ensemble du contexte humain et ses problèmes. L’ELAM est capitale dans les efforts de Cuba pour relier son système médical aux besoins des personnes défavorisées à travers le monde. Le modèle cubain est basé sur la conviction qu’on ne peut agir sur les maux de l’humanité sans agir sur la société qui crée ces maux.
D’après Ketia Brown, une étudiante de troisième année de médecine, " l’ELAM est la révolution réalisée. Nous devons tenter d’avoir un projet révolutionnaire dans un monde capitaliste." L’ELAM est un tel projet. C’est une lutte pour une nouvelle conscience médicale qui puisse faire partie de la lutte pour améliorer la santé mondiale. "Quand des milliers d’étudiants s’associent dans leur détermination à aider autrui dans une école construite pour leur permettre d’atteindre ce but, il y a un espoir que les jeunes continuent la lutte."
Don Fitz