La société brésilienne est bombardée tous les jours de fausses nouvelles produites par les lobbies des grandes entreprises multinationales qui veulent nous imposer les semences transgéniques comme si c’était une nécessité, une question de progrès. Ils présentent seulement les présumés avantages et cachent les dangers pour le peuple et pour notre souveraineté nationale et alimentaire. Mais finalement, qu’est-ce qui est en jeu ?
9 juillet 2003
Titre BRÉSIL : LE DANGER DES TRANSGÉNIQUES, LES INTÉRÊTS DES MULTINATIONALES ET LA MANIPULATION DES MÉDIAS
Mouvement des paysans sans-terre
D’un côté, nous avons les intérêts de lucre et le contrôle du monopole de semences par des entreprises multinationales comme Monsanto, Cargill, Bung, Du Pont, Sygenta et Bayer. De l’autre, les intérêts des agriculteurs honnêtes et du peuple brésilien : c’est la vraie confrontation qui se trame dans la question des transgéniques.
Les entreprises et ses lobbies, avec leur ambition de contrôler l’agriculture brésilienne et d’avoir le monopole des semences, spécialement du soja, du maïs, du blé, du tournesol et du coton, affirment que les transgéniques sont plus productifs et rentables que la semence de leurs concurrents. Si le critère pour l’agriculture est celui de toujours choisir les produits les plus rentables, alors, ils devraient stimuler la plantation de tabac et de marijuana. Les agriculteurs ont la responsabilité de produire des aliments : et des aliments sains, sûrs pour toute la population.
Une variété de maïs transgénique a déjà été retirée aux Etats-Unis pour les préjudices qu’ils portent à la santé humaine et animale. Sur le soja, il n’y a, jusqu’à maintenant, aucune étude qui offre la sécurité, et pour autant, dans l’avenir, cela pourra avoir des conséquence pour la santé humaine. Il est déjà prouvé que, en combinant sa culture avec l’usage intensif du produit agrotoxique Roundup (Monsanto, NdT), avec les années, cela affectera négativement le sol et l’environnement.
C’est pour cette raison que depuis plus de quatre ans, une action judicaire est en cours contre Monsanto, qui n’arrive pas à présenter une expertise prouvant que son soja ne cause aucun mal à l’environnement brésilien, comme l’exige la Constitution.
Des zones cultivées dans le monde, moins de 10% utilisent des semences transgénique : aux Etats-Unis, au Canada et en Argentine, où les multinationales états-uniennes contrôlent le marché. Pourquoi tous les autres pays préfèrent-ils la précaution ?
Partout dans le monde, et particulièrement en Europe et en Asie, les consommateurs sont opposés à la consommation de produits transgéniques, dont les effets sur la santé ne sont pas garantis. Nous sommes en faveur de l’usage de la biotechnologie, comme les agriculteurs l’ont appliquée empiriquement tout au long de l’histoire de l’humanité. Mais une biotechnologie responsable avec notre peuple et l’avenir de l’environnement.
Si nous pouvons alimenter notre peuple avec des produits d’autres semences sûres et bonnes pour la santé, pourquoi prendrions-nous le risque des transgéniques ? Seulement pour garantir les profits de Monsanto ?
Monsanto essaie d’induire, par tous les moyens, la culture de transgéniques au Brésil, parce que c’est sa dernière opportunité. Aux Etats-Unis, elle a perdu plus de 1.000 millions de dollars et ses actions ont chuté de 27% l’an dernier.
Elle a recu la pire cotation à la bourse de New-York et a encore le culot de vouloir prélever des royalties aux exportateurs et agriculteurs brésiliens, qui furent induits à commettre deux crimes : planter illégalement sa semence de soja Roundup passée en contrebande d’Argentine. Monsanto devrait taxer la FARSUL, organisation des latifondistes gauchos, qui ont répandu la semence trangénique !
Le Brésil a besoin d’une législation qui garantisse le droit de prévention pour la santé publique et qui empêche les multinationales de détenir le monopole de nos semences, mettant en danger la souveraineté nationale. Pour l’instant, la Mesure Provisionnelle (MP) 113, qui fut approuvée déjà par la Chambre et qui libère le commerce temporaire du soja gaucho de cette récolte, mais qui maintient l’interdiction rigoureuse de la culture de toute semence transgénique à des fins commerciales, est en vigueur. Le gouvernement est en train de préparer une nouvelle loi définitive pour remplacer la MP, qui sera envoyée au Congrès le mois prochain.
Un large débat de toute la société brésilienne, des consommateurs urbains est nécessaire. Que tous se manifestent et fassent pression sur le gouvernement et les parlementaires.
L’entreprise états-unienne Monsanto va dépenser des millions en lobbying, en financant des campagnes, en payant des voyages à des délégations aux Etats-Unis, en faisant de la propagande dans les médias, en alimentant les journalistes pour garantir son lucre.
Nous espérons que le gouvernement et les parlementaires brésiliens agissent du côté du peuple et non de celui du capital états-unien. Il s’agit d’une affaire de santé publique et de souveraineté alimentaire nationale. Si le gouvernement et le Congrès se trompent de côté, ils seront jugés par l’histoire et le peuple !
João Pedro Stedile
Joao Pedro Stédile est dirigeant du Mouvement des Travailleurs ruraux Sans Terre (MST) et de la Via Campesina.
- Traduction : Frédéric Lévêque, pour RISAL.
- Article original : "Brasil : El peligro de los transgénicos, los intereses de las multinacionales y la manipulación en los medios de comunicación".
COPYLEFT Joao Pedro Stédile 2003.