Alerte : un projet de loi contre l’accès aux Archives

DIVERS

Le texte du nouveau projet de loi sur la conservation et la communication des Archives a été adopté par le Sénat. Des auditions ont été faites par la commission des lois de l’Assemblée nationale cette semaine et le texte doit être prochainement voté (dans la deuxième quinzaine d’avril selon le calendrier parlementaire, peut-être le 17). Ce texte est disponible sur le site de l’Assemblée : page d’accueil aller à la rubrique « document parlementaire », projet n° 566 ou cliquez sur ce lien :

http://www.assemblee-nationale.fr/1...

Ce projet mérite TOUTE notre attention dans son ensemble, mais plus particulièrement le chapitre « régime de communication ». Il prévoit certes un raccourcissement des délais légaux d’accès à une partie des documents (vingt-cinq ans contre trente, ou cinquante contre soixante par exemple) mais comprend aussi quatre points très inquiétants.

- La création d’une nouvelle catégorie d’archives : les archives incommunicables. Elles pourront ne jamais être communiqués au nom de la « sécurité nationale » (armes biologiques.) et de la « sécurité des personnes », certainement immortelles. Il y a une contradiction dans les termes du texte, qui ne permet pas de comprendre quelles sont les intentions du législateur. Il est dit :

Art. L213-1 : "Les archives publiques sont [...] communicables de plein droit" et L 231-2 : « il existe des archives qui "ne peuvent être consultées" ».

Cet art. 213-2 n’a pas de raison d’être, car :

- 1/ les informations permettant de concevoir des armes biologiques ou de destruction de masse sont nécessairement récentes ; or celles-ci sont déjà couvertes par l’art. 213-2 I 3° ;

- 2/ les informations de nature à compromettre la sécurité des personnes sont déjà visées par le 213-2 I 4°.

- Un nouveau délai, fixé à soixante-quinze ans, est créé, fondé sur une extension de la notion de protection de la vie privée, visant la plupart des archives publiques (Art. L. 213-2-4). Il y a ici amalgame entre la « protection de la vie privée » (celle-ci n’étant pas plus définie) et le fait de rendre publique « une appréciation ou un jugement de valeur », catégories particulièrement floues. Ou pire, le fait de « faire apparaître le comportement d’une personne dans des conditions susceptibles de lui porter préjudice ». Pratiquement tous les dossiers d’archives publiques, tels les rapports de préfets, les rapports et archives de police, contiennent des jugements de ce type. Qui décidera - et sur quels critères - ce qui doit être ouvert alors ? Fixer la barre à 75 ans, conduirait de plus à refermer de nombreux dossiers ouverts depuis 15 ans. Verra-t-on se de refermer pour quelques années les études sur le Front populaire, la 2e Guerre mondiale et Vichy, ou celles sur la guerre froide qui commençaient à s’ouvrir librement ? Certes, restent les dérogations, mais c’est placer les chercheurs sous le sceau du privilège individuel pour 25 ans de plus.

- Une notion de « secret des statistiques » est introduite de façon répétitive (14 occurrences au mot secret, dont 8 au secret statistique). L’article 25 - nouveau - dit dans un I que les documents administratifs (immédiatement consultables en vertu de la loi de 1978 sur la transparence administrative) ne sont communicables qu’aux intéressés quand ils portent atteinte au secret de la vie privée ou comportent des jugements sur les personnes. C’est le cas des dossiers d’instituteurs par exemple.

Dans un II, il ajoute que les documents visés aux I sont consultables dans les conditions fixées par le 213-2 : c’est-à -dire 75 ans. Et comme ce II de l’article 25 nouveau ne mentionne pas le 213-3, qui est l’article autorisant des dérogations, le couvercle est vissé. Nul chercheur ou citoyen ne verra les dossiers de cour de justice ou les dossiers personnels avant 75 ans : aucune dérogation n’est possible.

- L’art. 213-I 4° aurait pour conséquence d’interdire toute recherche sérielle postérieure à 1923 ; l’art. 213-2 4° rend très difficile la consultation des listes nominatives.

- Enfin, le système des protocoles, déjà en vigueur pour les Chefs d’État et dont on a constaté les dérives dans certains cas est étendu à tous les papiers des ministres (Art. L. 213-4). Il permettra à ceux- ci de traiter les archives publiques produites par eux et par leurs collaborateurs, comme des archives privées jusqu’à leur décès.

Les nouvelles dispositions prévues par ce texte sont extrêmement graves : elles traduisent une défiance inquiétante de la part des pouvoirs publics envers la communauté des chercheurs certes, mais de façon plus globale, envers la communauté des citoyens. Elles sont en contradiction flagrante avec les recommandations du Conseil de l’Europe adoptées le 21 février 2002 par le comité des ministres.

Nous tenions à vous faire savoir sans attendre cette 1ère information. Une pétition et d’autres initiatives sont en discussion. N’hésitez pas à faire circuler le texte voté par le Sénat et soumis aux députés et à diffuser ces informations.

Merci

JmB

COMMENTAIRES  

14/04/2008 14:30 par Odhalgim

Comme la plupart des tyrannies vécus par les peuples européens depuis la plus haute antiquité, le tyran, se présentant en sauveur, commence par se faire élire le plus démocratiquement du monde en promettant tout puis il retire au peuple qui l’a élu ses droits démocratiques les plus élémentaires. Il faut bien comprendre qu’en France nous ne vivons plus dans une démocratie mais, que depuis l’arrivée au pouvoir de "l’américain" et de sa clique, c’est la tyrannie qui s’est installée. Ouvrons bien les yeux et les oreilles, car toutes les "anomalies" que nous observons ne sont pas anodines mais sont bien les signes avant-coureurs d’une mise en place réfléchie,concertée et systématique d’un pouvoir tyrannique (=dictature) pur et dur avec le soutien de certaines puissances étrangères traditionnelement ennemies de la France et des peuples qui la constituent. Que faire alors ? Que chaque citoyen (-ne), que chaque groupe ou collectivité, se pose les bonnes questions, écoute sa conscience,délibère en homme (femme) libre avec ses concitoyens (-nes) et agisse de telle façon qu’il réussisse à empêcher les usurpateurs à réaliser leurs plans tout en cherchant à rétablir la démocratie dans les plus brefs délais. (cf. p.ex. le cas du professeur arrêté, le changement de la loi sur les archives,...)

29/04/2008 11:45 par Luc N.

Merci, Odhalgim, d’avoir si bien rappelé l’essentiel : l’accès aux archives publiques est un enjeu à part entière, du combat plus vaste pour les libertés publiques.
J’ai en revanche un peu de mal à vous suivre, sur un point précis : vous parlez de "l’américain" et de sa clique. Mon point de vue est que ce sinistre personnage n’est ni "américain", ni même "hongrois" : il est tout simplement ce que la France peut aussi, à l’occasion, produire de plus rance. Selon toute vraisemblance les malheureux qui ont voté pour lui l’ont fait parce qu’ils voyaient en lui un de leurs semblables (voilà au moins des gens qui ont une haute idée de leurs chromosomes), et non, par fascination de l’Amérique -ou de ce qu’ils pensent être l’Amérique.

23/04/2008 08:04 par mariemini

Peut-on signer une pétition ? Faire quelque chose ?

23/04/2008 12:04 par Anonyme

Vous trouverez sur le site du CHPP l’appel aux parlementaires de l’Association des usagers du service public des Archives nationales, la liste des premiers signataires ainsi que divers articles et points de vue :

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