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Le gouvernement prépare en catimini une réforme drastique du statut de la fonction publique

Presque 5 millions de Français exercent leur activité dans un des différents domaines de la fonction publique (Etat, collectivité territoriales et secteur hospitalier). L’activité de ces fonctionnaires couvre de très nombreux domaines, de la santé à l’éducation, de la recherche à la sécurité publique, de la gestion financière à la justice. Leur statut les mettait à l’abri d’un certain nombre de pressions de leur employeur, l’Etat, par ailleurs assez mauvais patron. Les agents du secteur public s’accommodaient de la situation, beaucoup étant attachés à leur métier, troquant des progressions de carrière limitées contre une sécurité de l’emploi. Le projet de réforme du gouvernement « relatif à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique » pourrait ouvrir la porte à un licenciement déguisé des fonctionnaires. Explications.

Décrié par les libéraux, le travail des personnels de la fonction publique est indispensable au fonctionnement du pays, à sa cohésion sociale, et fournit de par la mutualisation des coûts un service aussi bon et moins cher pour l’usager que le secteur privé. Il suffit pour se convaincre de cet état de fait de regarder le coût et la qualité de service du secteur ferroviaire au Royaume-Uni. Le même constat existe entre lorsque l’on compare le système de santé français à son homologue américain. Plus près de nous, regardons les coûts annexes apparus lors de la vrai fausse privatisation d’EDF, portant sur des services auparavant gratuits ou peu coûteux, tels la réouverture de ligne, leur vérification, le changement de compteur ou de contrat, sans parler de l’encadrement du coût du kWh, appelé à disparaître.

On l’a compris, le secteur public représente une gêne forte dans une optique libérale, pressée de faire appliquer les recommandations européenne en matière de commerce et de services [1]. La diminution programmée des moyens du secteur public se heurtait jusqu’à présent à un écueil massif, le statut de la fonction publique, limitant la possibilité de limoger les agents de l’Etat, de collectivités territoriales et de l’hospitalier, sauf bien évidemment pour faute grave. Or, d’après Marianne [2], sous couvert d’amélioration de la mobilité et des parcours professionnels des fonctionnaires, le gouvernement prépare tout simplement le licenciement déguisé de fonctionnaires.

L’article 7 de ce projet prévoit qu’un agent qui serait « privé d’affectation par suite d’une suppression ou d’une modification substantielle de son emploi » pourrait bénéficier de mesures d’accompagnement, telles des « actions de formation ou de reconversion professionnelles ». Celui-ci peut être « conduit à exercer des missions temporaires auprès de services dans une logique d’enrichissement de compétences ou de reconversion ». Jusque-là , rien à redire, le projet semble plutôt profitable aux fonctionnaires. En revanche, le projet prévoit de modifier les articles 44 et suivants de la loi 84-16 du 11 janvier 1984 « portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’Etat » comme suit : « La réorientation professionnelle est la situation dans laquelle peut être placé le fonctionnaire dont l’emploi a été supprimé ou modifié de façon substantielle... La réorientation est prononcée pour une durée maximale de deux ans. Au terme de cette période et à condition que l’administration ait accompli toute diligence utile pour favoriser la réorientation professionnelle du fonctionnaire, celui-ci peut être placé d’office en disponibilité ». Autrement dit, au bout de deux ans, le fonctionnaire pourra se retrouver sans traitement, ce qui constitue une façon déguisée de le congédier et une remise en cause fondamentale du statut de fonctionnaire.

On imagine dès lors facilement toutes les dérives du système. Un magistrat qui résisterait un peu trop aux pressions de sa hiérarchie pourrait voir son poste disparaître, et se proposer une formation pour rejoindre le service juridique d’une administration en Dom-Tom, des policiers trop indépendants pourraient se retrouver dans l’administration pénitentiaire, un secrétaire général de mairie gênant et informé de malversations financières pourrait se voir viré au bout de deux ans, etc. De même quant au sort de l’Education nationale, où les emplois de professeurs sont supprimés par centaines. Pour le moment, ceux-ci sont partiellement protégés par leur statut, mais pour combien de temps encore eux et les autres fonctionnaires sont-ils protégés du risque de précarisation ?

Ce risque de précarisation constitue un moyen puissant de contrôler les velléités revendicatives des salariés et leur liberté de parole. Il s’agit-là , ne nous leurrons pas, d’un des buts principaux de cette réforme. Le texte de loi le reconnaît à demi-mots, lorsqu’il stipule dans son article 9 que « Le statut général et le Code du travail sont modifiés pour prévoir le recours à l’intérim par des organismes publics, qui pourront dans ce cadre pourvoir rapidement des vacances temporaires d’emploi ou faire face à des besoins occasionnels, saisonniers ou à des surcroîts d’activité ». Oui, vous avez bien lu, il s’agit du recours à l’intérim, pas au CDD ! Le texte de loi avoue plus clairement son but de précarisation lorsqu’il stipule que l’article 44 mentionné plus haut pourrait aussi être modifié de la sorte : « L’administration définit avec le fonctionnaire placé en réorientation professionnelle un projet personnalisé d’évolution professionnelle ayant pour objet : 1- de favoriser sa réaffectation sur un emploi correspondant à son grade dans son service ou dans une autre administration ; 2- d’accéder à un autre corps ou cadre d’emplois de niveau au moins équivalent ; 3- d’accéder à un emploi dans le secteur privé ». Bref deux ans après avoir vu son poste supprimé, pour l’agent du secteur public, ce sera « acceptez ce boulot », « revenez en intérim » ou « rejoignez le secteur privé ! ».

Mais-68, c’était il y a quarante ans, non ? Les anniversaires, cela se fête...

http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=37556

[1] Sur le dossier de l’accord général sur le commerce et les services, voir http://fr.wikipedia.org/

http://www.france.attac.org/spip.php?rubrique25

http://www.voltairenet.org/article9298.html

[2] http://www.marianne2.fr

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