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Hébron face à l’escalade de la crise.

La ville d’Hébron est en crise. Toute vie civile est devenue impossible. Les évènements des dix derniers jours dénotent un changement dans la politique israélienne envers cette ville divisée, que les "analystes de sécurité israéliens" appellent "un refuge pour terroristes".

Comment peut-on croire qu’une répression aussi draconienne pourra changer cette ville en un havre de paix florissant ? Le Centre d’Information Alternatif (AIC) basé à Hébron nous donne un résumé chronologique des derniers évènements.

Zone H2 d’Hébron : Le règne de la terreur des colons.

Depuis la mi-novembre, suite à un affrontement avec les militants du Jihad islamique, la zone H2 d’Hébron (où se trouve l’enclave de 450 colons extrémistes) a été soumise à un couvre-feu continu. 42 000 Palestiniens vivent dans cette zone qui relève de la juridiction israélienne d’après les accords de Wye River signés en 1997 par le Premier Ministre Benjamin Netanyahu et le président de l’Autorité Palestinienne Yasser Arafat. Ce couvre-feu, auquel les Palestiniens sont soumis, n’a été levé que pendant quelques heures depuis plus de deux mois afin de permettre à la population de se ravitailler. Les Palestiniens qui se risquent à sortir en de rares occasions sont souvent victimes du harcèlement des colons. Au moindre prétexte, ceux-ci organisent des manifestations violentes dans leur "enclave" comme lors des funérailles du colon Nati Ozeri le 19 janvier.

Un soldat israélien effectuant son service dans la zone H2 a qualifié les colons de "casseurs sans loi". Les 5 000 Palestiniens vivant dans la vieille ville à proximité des quartiers des colons subissent les pires harcèlements. Les colons mettent les magasins à sac, coupent les lignes et détruisent les canalisations d’eau et les voitures et agressent les écoliers. Ils sont sûrs de leur bon droit et convaincus d’accomplir un devoir sacré pour judaïser ce qu’ils appellent "la ville des Patriarches" en référence aux tombeaux d’Abraham et de Sarah qui se trouvent dans la mosquée Ibrahimi (Ma’arat haMakhpela dans la tradition juive) au coeur de la vieille ville. Leur action est soutenue par une politique gouvernementale israélienne généreuse qui a dépêché 4000 militaires pour assurer leur sécurité. Un projet est en cours pour la construction d’un passage sécurisé, une "promenade des colons" qui devrait relier la colonie de Kiryat Arba sur le flanc est d’Hébron à la vieille ville. D’après les plans, il est prévu de confisquer 64 lots de propriété privée palestinienne et de raser au moins 16 maisons (50 maisons d’après d’autres estimations).

Toutefois, la société israélienne, dans son ensemble, considère cette communauté de colons comme une communauté d’extrémistes et de fanatiques. Une coalition de groupes de gauche cherche à limiter le blanc-seing donné par le gouvernement aux colons d’Hébron. Yesh Gvul, l’organisation des objecteurs de conscience, avec le soutien d’autres groupes ainsi que celui de l’ancien membre de la Knesset, Mossi Raz, a fait un recours auprès de la Cour Suprême afin d’empêcher les démolitions prévues pour la construction de la "promenade des colons".

La vieille ville d’Hébron, autrefois un joyau architectural, a vu l’émigration des Palestiniens ayant les moyens de le faire. A l’époque de la signature des accords de Wye River, présentés à la communauté internationale comme un compromis historique, 12 000 Palestiniens résidaient dans la vieille ville. Ils subsistaient grâce au centre économique que représentait le vieux marché dans la Kasbah. Ce marché, avec ces 300 boutiques et étals, est fermé depuis deux ans. Etouffés économiquement et voyant leurs enfants molestés, les Palestiniens sont partis. Aujourd’hui, la population palestinienne ne compte plus que 5 000 âmes. Le Comité pour la réhabilitation d’Hébron (Hebron Rehabilitation Committee) pense que ces résidents reviendraient dans leurs maisons si la situation se calmait. Aujourd’hui la ville ressemble à une ville fantôme.

Dans la nuit du 7 février 2003, un groupe important de colons a envahi environ 45 boutiques de la kasbah dans la vieille ville. Ils ont fracturé les portes et détruit les produits entreposés. Ces boutiques sont la propriété du Waqf Islamique, de l’organisation caritative Ahl el Sonna et de la municipalité d’Hébron.

En novembre, suite à une pétition des commerçants, défendus par l’avocat israélien Shlomo Lecker, la Cour suprême a demandé à l’armée israélienne de parvenir à des accords particuliers avec les commerçants plutôt que d’aller devant les tribunaux. Le porte-parole de l’armée a soutenu sa position selon laquelle la fermeture du marché de la vieille ville était nécessaire pour des questions de sécurité. Sentant manifestement que la justice n’était pas en sa faveur, l’armée a autorisé la réouverture symbolique de trois boutiques la semaine dernière, boutiques appartenant aux familles AlQudsi, Za’tari et Ajaj. Les colons, provoqués par ce "manquement d’Israël à défendre l’héritage juif d’Hébron", ont fait justice eux-mêmes le 7 février, espérant ainsi intimider les commerçants afin que leurs boutiques restent fermées. Les colons sont rarement punis pour de tels excès ; leur violence devient donc un outil au service de l’Etat.

La Christian Peacemaker Team (équipe de chrétiens artisans de la paix), un groupe américain de militants humanitaires, et la Présence internationale temporaire à Hébron essayent de protéger les résidents palestiniens. Ils accompagnent les enfants à l’école (si l’école est ouverte) ainsi que les ambulances et les travailleurs sociaux qui viennent porter assistance à la population assiégée. L’équipe CPT signale que l’armée entreprend fréquemment des recherches dans les maisons pendant la nuit, détruisant parfois les effets personnels des résidents et humiliant ces derniers. La population est complètement terrorisée et la CPT avertit que ces agissements sont un encouragement à l’émigration (ou une expulsion subtile) des Palestiniens de la vieille ville.

Toute résistance palestinienne (d’abord l’attaque du Jihad islamique en novembre qui a coûté la vie à trois militants du Jihad, neuf soldats et trois gardes colons, puis l’assassinat de Nati Ozeri en janvier dans l’avant-poste de sa colonie illégale même d’après les normes israéliennes) est prétexte de durcissement des autorités israéliennes à l’encontre d’une population déjà anéantie.

Zone H1 : 130 000 Palestiniens pris au piège sans explication

Le 29 janvier 2003, un couvre-feu a été imposé sur la zone H1 d’Hébron sans avertissement préalable. La zone H1 est la partie ouest de la ville qui relève de la juridiction de l’Autorité palestinienne suite aux accords de Wye River, à la suite d’Oslo. Les incursions prolongées de l’armée israélienne dans la ville ces deux dernières années ont détruit la plupart des infrastructures de l’Autorité palestinienne et provoquées la disparition des institutions civiles comme la police ou la justice. Ces institutions n’étaient pas vitales ; traditionnellement, les différends étaient réglés par des ententes inter-familiales. Cependant, ces règles traditionnelles sont inefficaces face à des conflits relevant de l’occupation militaire.

Le 29 janvier en question, les soldats ont installé des barrages tous les 200 m environ dans les rues de la capitale du sud de la Cisjordanie, empêchant les voitures de circuler. Des dizaines de tanks et de jeeps ont pris position. Contre qui, peut-on demander ? Pour répondre à cette énigme la fermeture des institutions sociales telles que les bureaux de la municipalité, l’association des jeunes musulmans (Muslim Youth Society), le centre des impôts, le bureau des affaires sociales et le bureau du ministère de la culture fournissent quelques indices. Les portes de ces établissements ont été soudées. Les deux universités d’Hébron ont été fermées de la même manière (voir le rapport précédent de l’AIC). Les organisations caritatives musulmanes qui distribuent de la nourriture aux personnes les plus défavorisées, notamment aux habitants assiégés de la zone H2 ont également été fermées. Des bulldozers ont détruit le marché aux légumes de la place centrale d’alManara ou les commerçants s’étaient installés après avoir été interdits d’accès au marché de la vieille ville dans la zone H2. Environ 100 étals remplis de produits frais ont été détruits.

Une seule conclusion s’impose : on s’attaque à la vie civile. Les Palestiniens redoutent que dans l’ombre de la crise iraquienne, les décideurs israéliens n’ouvrent la voie à des agissements plus terribles encore que les fermetures.

Le couvre-feu de la zone H1 n’a été levé que le 4 février, pour deux heures : de 7 à 9h. Le 5 février, le couvre-feu a été levé au matin mais toutes les routes à l’entrée ou à la sortie d’Hébron étaient bloquées, obligeant les gens à circuler à pieds.

En provenance de l’A.I.C. (Centre d’Information Alternatif à Jérusalem).

Message adressé par l’Association France Palestine Solidarité de Nantes (T Boureau). Si vous le recevez indirectement, il est possible de vous abonner, gratuitement, à sa liste de diffusion. Il suffit d’adresser une demande succincte à l’adresse : FrancePalestineSolidarite44@wanadoo.fr

Traduction : Isabelle Lacamp


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