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Les biocarburants rattrapés par l’inflation des matières premières agricoles, Dominique Baillard.



Dessin : Pedro Mendez






RFI, 7 octobre 2007.


Si le prix du panier de la ménagère s’envole, c’est essentiellement en raison de la hausse des cours des matières premières agricoles. C’est un message aujourd’hui largement diffusé, notamment par l’industrie agro-alimentaire, mais aussi par la grande distribution. En France c’est même devenu l’argument publicitaire d’une enseigne qui s’engage à se battre pour conserver des bas prix à ses clients. Dans la ligne des vérités désormais universelles, on attribue au développement des biocarburants cette hausse rapide des matières agricoles. A tel point que le débat a pris un tour véhément, avec d’un côté les opposants aux biocarburants accusés d’affamer la planète qui se retrouvent en phase avec l’industrie agro-alimentaire soucieuse de maîtriser ses coûts, et de l’autre, des agriculteurs et leurs partenaires industriels enthousiasmés par ce nouveau débouché.

Un débat « surfait », selon l’analyste Emmanuel Jayet de la BNP Paribas qui a pris soin d’examiner l’évolution de plusieurs graines pour étayer son propos. Aux Etats-Unis où 20% du maïs sont destinés à la fabrication de l’éthanol ou en Europe où 60% du colza alimentent les usines de biodiesel, le lien est évident, en revanche il est inopérant pour le blé. Il a réalisé ces derniers mois la progression la plus stupéfiante sur les marchés américains et européens alors qu’il est très peu employé pour l’éthanol dans le monde. En Europe le blé dévolu à cet usage ne représente que 1% de la consommation totale de l’Union, fait remarquer Emmanuel Jayet. La hausse des marchés du blé ne s’explique pas par la vague des biocarburants, mais plutôt par une météo désastreuse depuis deux ans en Europe et en Australie, deux grandes zones de production.

Par ailleurs, l’industrie naissante des biocarburants présentée comme responsable de l’envolée des matières agricoles aura du mal à survivre si la hausse persiste. Pour concurrencer le pétrole, il lui faut des cours du brut durablement élevés et des matières premières abordables. Or avec l’envolée des céréales et des oléagineux, les alternatives vertes ne sont pas compétitives avec l’énergie fossile. La multiplication des investissements a abouti rapidement à une production surabondante par rapport à la demande. A tel point que de nombreux projets sont suspendus. En Espagne, Abengoa a de nouveau suspendu l’activité de sa grosse unité de production, estimant que le cours de l’éthanol ne reflétait pas l’envolée du prix de l’orge qu’elle utilise. La boucle se referme : l’industrie des biocarburants accusée initialement de faire grimper les matières agricoles se pose volontiers aujourd’hui en victime de cette hausse.

Dominique Baillard


 Source : RFI www.rfi.fr




***La différence est que la croissance de la matière première végétale du « bio » absorbe autant de CO2 que sa combustion n’en dégage. Mais ce bilan, apparemment neutre, est négatif puisqu’il faut impérativement, non pas équilibrer l’absorption et l’émission de CO2, mais la réduire de façon draconienne.

***Les biocarburants peuvent présenter un bilan global en gaz à effet de serre qui n’est pas satisfaisant, car d’une part il faut le plus souvent consommer de l’énergie fossile pour cultiver les plantes (essence du tracteur et fabrication des engrais par l’industrie chimique), ensuite il y a des émissions de protoxyde d’azote lors de l’épandage des engrais, et enfin il peut y avoir des émissions de méthane et d’oxyde d’azote lors de la combustion des biocarburants qui sont supérieurs à celles obtenues en brûlant du pétrole.

*** L’agriculture mondiale me pourra assurer à la fois l’alimentation, la production en carburants et la préservation de la biodiversité. [...] La montée des biocarburants va se traduire par une compétition pour la terre entre cultures alimentaires et cultures énergétiques. La rareté de l’énergie risque de créer une rareté alimentaire.

*** Pour produire un litre de bioéthanol il faut 4560 litres d’eau.
Lire : Biocarburants : pleins d’essence ou ventres pleins ?




Bilans énergétiques et effet de serre des agrocarburants : le rapport complet de l’étude ADEME - DIREM 2002 enfin rendu public.


Les agrocarburants présentent un bilan écologique médiocre, par Hervé Kempf.

Le piège des agrocarburants, par Laura Carisen.






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