Le Monde Diplomatique, lundi 25 juin 2007.
Même si les médias français ont, cette fois encore, renchéri dans la « sarkomania » (1) pour rendre compte du Conseil européen des 22 et 23 juin dernier - au point de donner à penser qu’il se tenait sous présidence française et non pas allemande -, il faut bien constater que l’activisme du président de la République a contribué à ressusciter le traité constitutionnel européen (TCE) réputé défunt depuis les « non » français et néerlandais.
L’accord des Vingt-Sept obtenu sur un traité « simplifié », « allégé » - ou, pour reprendre la terminologie d’Angela Merkel, « réformateur » -, ne modifie en effet en rien les « fondamentaux » de la construction européenne. Tout au plus, à la marge, tient-il symboliquement compte de ces deux « non ». Mais les symboles comptent beaucoup en politique, surtout lorsqu’ils ont pour fonction de donner le sentiment du « changement », alors que tout reste en place. (...)
Les référendums français du 29 mai et néerlandais du 1er juin 2005 avaient remis en cause les articles de foi sur la forme prise par la construction européenne et provoqué un profond désarroi à Bruxelles et chez tous ceux pour lesquels les mots Europe et libéralisme sont interchangeables. A cet égard, les vrais ou faux naïfs qui pensent que, telle qu’elle est engagée depuis 1957, cette construction peut être autre que libérale devraient méditer ce que Claude Imbert, l’éditorialiste du Point, a écrit avec sa franchise habituelle sur l’antilibéralisme un an après le 29 mai : « Slogan, par excellence, antieuropéen : l’Europe communautaire est en effet libérale ; ses règles sont libérales. Et dans le remue-ménage mondial, la sécurité de cette Europe-là est atlantiste et libérale, comme le sont ses valeurs fondamentales (6) ».(...)
L’intelligence politique de M. Nicolas Sarkozy est d’avoir donné l’impression de « réconcilier la France du oui et la France du non », pour reprendre ses propres termes, mais au seul service de l’essentiel : le renforcement de l’Europe libérale. Grâce aux quelques « concessions » sans pratiquement aucune effectivité qu’il a obtenues, mais dont il se glorifie, il réussit le tour de force de délayer la force propulsive du non antilibéral français dont le fantôme donnait des cauchemars aux européistes.(...)
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