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Les SCALP du Grand Sachem

Il y a une sorte de cynisme cruel dans cette manie occidentale qui consiste à baptiser des engins de mort par des noms qui appartiennent au patrimoine culturel amérindien. Des 4x4 Cherokee, des hélicoptères Apache, des missiles Tomahawk, des roquettes Zuni... Mais le pire a été atteint par la France et ses missiles SCALP.

Lorsqu’un Indien frappe son ennemi sur la tempe avec le tomahawk, celui-ci tombe à l’instant. Il saisit alors d’une main les cheveux qu’il entortille ensemble avec force pour séparer la peau de la tête, en lui mettant le genou sur la poitrine, il tire du fourreau, avec l’autre main, le couteau fatal et cerne la peau autour du front, se servant de ses dents pour l’arracher. Comme en général ils sont adroits l’opération ne dure pas plus de deux minutes.

In Voyages and travels of an Indian interpreter and trader, John Long, 1791, p. 80

Le scalp, c’est-à-dire le dépeçage du cuir chevelu, signifiait que l’ennemi vaincu ne pouvait après sa mort aller dans les Prairies Éternelles, car chez les Amérindiens, l’esprit est logé dans la chevelure.

La valeur symbolique du scalp s’explique par le fait qu’il concerne une partie hautement symbolique du corps humain : la tête, aspect le plus reconnaissable de la personnalité. James Axtell a montré qu’il existe un lien entre esprit et scalp, car la chevelure est considérée comme ayant une vie à part et qu’elle continue à croître après la mort, tout comme l’esprit. Le scalp, une fois préparé et décoré, représente donc l’essence spirituelle du vaincu (...) La peau joue un rôle d’interface entre l’individu et la société. Les cheveux, quant à eux, ont un emploi particulier car ils sont vivants sous la peau et morts à l’extérieur. Ils sacralisent donc la frontière entre les forces naturelles à l’intérieur du corps et la sphère externe des relations sociales (Terence Turner, 1980 : 116).

In Le scalp, Un objet interculturel dans le contexte colonial nord-américain, Stéphanie Chaffray

C’était une appropriation du corps de son ennemi, de sa valeur et de sa force rapprochant davantage le scalp du cannibalisme pratiqué chez d’autres peuplades que, par exemple, de la décapitation. Le scalp était un trophée qui avait une valeur symbolique dépassant largement celui du butin de guerre. La valeur d’un guerrier se mesurait au nombre de ses scalps et lui permettait de monter dans la hiérarchie militaire.

Cette pratique incomprise des colons occidentaux justifia la perception que ceux-ci eurent des peuples amérindiens comme sauvages et sanguinaires et donc la nécessaire extermination de ces êtres barbares.

Les motifs culturels ne sont pas les seuls facteurs qui expliquent que les voyageurs européens perçoivent le scalp comme un objet barbare. Pendant la première moitié du XVIIIe siècle, la littérature de voyage s’inscrit dans le cadre de la propagande coloniale. Sous couvert de décrire scientifiquement la réalité américaine, elle fournit à l’idéologie coloniale (ou anti-coloniale) des arguments pour légitimer (ou critiquer) son fondement et ses actions. On ne représente pas la réalité : on représente une relation et un rapport de pouvoir entre soi et l’Autre. On se plaît ainsi parfois à exagérer la brutalité de certaines coutumes comme le prélèvement du scalp pour prouver la barbarie des Amérindiens. En ne reconnaissant au scalp d’autre motif que celui de soulager une pulsion sauvage, on gomme sa signification culturelle et symbolique. (...) Le scalp constitue une nouvelle preuve de l’assertion de la sauvagerie des Amérindiens et du même coup un argument pour légitimer la politique coloniale en excusant, par exemple, le commerce des « chevelures ».

In Le scalp, Un objet interculturel dans le contexte colonial nord-américain, Stéphanie Chaffray

L’homme blanc, malgré sa répulsion pour cette coutume, la récupéra pourtant à son avantage lorsqu’au cours de sa guerre de conquête des territoires amérindiens, il lui fallait monter les tribus les unes contre les autres, en monnayant les scalps obtenus. D’une pratique sporadique et d’un objet ritualisé, le scalp, par sa monétisation, se développe et devient non seulement un moyen d’inciter les tribus à s’entretuer, pour le bénéfice de la colonisation blanche et aux dépens de toute éventualité d’une union de la nation amérindienne, mais aussi une façon de se servir d’elles dans le cadre des rivalités qui opposaient les différentes nations coloniales.

Dans le cas du scalp c’est le corps qui, devenant marchandise, est domestiqué et qui se trouve pris dans des rapports de pouvoir et d’enjeux économiques et stratégiques. L’entrée du scalp dans le circuit commercial lui donne une valeur non plus rituelle mais monétaire, fixée par les Européens, et qui fluctue en fonction de la situation politique et des besoins stratégiques. Le paiement des chevelures symbolise la confrontation des sociétés amérindiennes à l’économie de marché.

In Le scalp, Un objet interculturel dans le contexte colonial nord-américain, Stéphanie Chaffray

Donner aux produits du capitalisme militaro-industriel des noms issus de la culture amérindienne, c’est tenter de les orner d’une patine flatteuse autant que caricaturale, celle de la liberté et de la bravoure de l’Indien, aux antipodes de l’image qu’en avaient les premiers Occidentaux qui entrèrent en contact avec les peuples natifs et des traitements qu’ils leur infligèrent pour les déposséder de leurs terres. Comme une forme de rédemption viciée, de rachat par l’absurde des fautes passées.

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Le SCALP, ou système de croisière conventionnel autonome à longue portée, est un missile produit par une entreprise européenne issue de la fusion de trois entreprises : la française Aérospatiale, la britannique BAE Systems et l’italienne Marconi Systems. Il a servi à de multiples reprises dans les guerres impérialistes que la France et la Grande-Bretagne ont menées en soutien aux donneurs d’ordre de Washington.

Sa version britannique, le Storm Shadow, a déjà été livrée par le gouvernement britannique à l’Ukraine pour l’assister dans le conflit qui l’oppose à la Russie.

Lors du dernier sommet atlantiste de Vilnius, le président-monarque Emmanuel Macron, en vrai démocrate, a décidé en son âme et conscience, dans le for intérieur de son ego boursouflé, sans consulter qui que ce soit et certainement pas le peuple et ses représentants, d’envoyer lui aussi quelques missiles à son « ami » de Kiev, lui donnant de facto la capacité de frapper la Russie sur son sol. Ainsi la France, à son corps défendant, fait un pas de plus vers la dangereuse limite qui fera d’elle une belligérante et a fortiori une cible potentielle de représailles en provenance des forces russes. Cela tout en n’offrant pas la moindre chance supplémentaire à l’Ukraine de pouvoir sortir victorieuse de ce conflit.

Les seuls vainqueurs de ce dangereux jeu de dupe sont les marchands d’armes.

Macron met une fois de plus en danger son peuple, au lieu de se remémorer ce que Poutine a soufflé à l’oreille de son prédécesseur, Nicolas Sarkozy qui, matérialisant à la perfection une fameuse fable de La Fontaine, voulut de toute sa petitesse faire la leçon au président russe sur les droits de l’Homme en Russie. Celui-ci a attendu tranquillement que le porteur de talonnettes ait fini son sermon et lui a répondu : « Alors maintenant de deux choses l’une : ou bien tu continues sur ce ton et je t’écrase, ou alors tu arrêtes de parler comme ça et tu verras, je peux faire de toi le roi de l’Europe. » Légende ou pas, le petit bout d’homme est sorti de cet entretien privé avec l’air de celui qui ne savait plus où il était ni ce qu’il faisait là. On l’a cru ivre alors qu’il était sonné.

Macron aurait grand besoin de cette thérapie puisque la stratégie de la table longue n’a pas suffi.

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À l’été 2022, en raison d’une sécheresse historique imputée au réchauffement climatique, les Landes brûlent. Ce feu de forêt gigantesque menace la vie de milliers de Français et compromet pour des années une économie touristique locale déjà fragilisée par le COVID ? OSEF ! Macron ne trouve rien de mieux à faire qu’à se pavaner au large de Brégançon sur un jet-ski, symbole de l’inutile « bobeauf » et polluant.

À l’été 2023, les banlieues françaises brûlent parce que la police française, désinhibée, a encore assassiné un jeune des quartiers. Des milliers de véhicules, privés et publics, partent en fumée ? Des écoles déjà insalubres sont détruites ? Des commerces sont pillés ? Balec’ ! Macron ne trouve rien de mieux à faire qu’à aller se dandiner au concert d’adieux d’une star de la pop anglaise et à se faire prendre en photo avec elle en compagnie de l’inénarrable Brigitte.

Où croyez-vous qu’il sera quand les villes françaises brûleront sous le feu des missiles russes ? Sûrement pas aux côtés des Français qu’il aura mis en danger par ses décisions aussi idiotes que vaines.

L’État français et ce qui reste de sa diplomatie et de son influence ne devraient-ils pas avoir qu’un seul et unique objectif : la paix ?

Et où est la gauche, bordel de merde ?

Xiao Pignouf

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Cinq Cubains à Miami
Maurice LEMOINE
6 octobre 1976, La Barbade : un attentat détruit en vol un DC-8 de la Cubana de Aviación (soixante-treize morts). 12 avril au 4 septembre 1997 : une série d’explosions frappe les hôtels de La Havane. A l’origine de ces actions terroristes qui, depuis 1959, ont fait plus de 3 400 morts à Cuba : Miami ; la très honorable « Fondation » ; quelques personnages ténébreux : Luis Posaril, Pepper Nández, Jorge Maskano, le docteur Orlando… Une même obsession les habite : en finir avec le régime et (…)
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Même les morts ne peuvent reposer en paix dans un pays opprimé.

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