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Ce que les médias ne vous diront pas sur Cuba-épisode 2 : l’éducation

Cuba, plus grande île des Caraïbes, est souvent l’objet de vastes débats entre partisans de la Révolution de 1959 et ceux la rejetant catégoriquement. Depuis des années, ce sont ces derniers qui ont une large audience dans les médias. Ainsi dès lors qu’il est question de Cuba c’est presque uniquement pour entendre des nouvelles négatives ou des critiques sur tel ou tel aspect du pays. Mais, à chaque fois, ces commentaires omettent des données essentielles dont, la première d’entre elles, le blocus imposé par les Etats-Unis qui frappe l’île depuis les années 60 et qui est toujours en vigueur malgré l’opposition de tous les pays du monde à l’ONU (exceptés Israël et les Etats-Unis).

Dans ce combat journalistique des temps modernes il faut que chacun puisse avoir les bonnes informations. Ainsi, sans ignorer les problèmes à Cuba, et sans affirmer que tout est parfait là-bas, quelques vérités doivent être rétablies. Ce sera le but et l’objectif de cette série d’articles qui comportera dix épisodes sur des thèmes bien précis.

Après avoir étudié le système de santé cubain, il est temps de se pencher sur l’éducation à Cuba. Dès 1959 l’éducation fit partie des quatre axes d’action qui devaient rapidement être mis en chantier, selon Fidel Castro. A savoir : la santé, la culture, le sport, et l’éducation.

Les campagnes d’alphabétisation

Après la victoire de la Révolution, l’éducation est immédiatement nationalisée. Dès le mois de mars 1959, une commission nationale d’alphabétisation est créée. Elle recense, entre novembre 1960 et août 1961, près d’un million d’analphabètes. Les sources divergent sur le taux d’alphabétisation du peuple cubain en 1959. Mais on peut effectivement considérer que, sur 6 millions d’habitants à l’époque, il y avait entre 900 000 et 1 million d’analphabètes.

Le 26 septembre 1960, Fidel Castro annonce : « Cuba sera le premier pays d’Amérique qui, dans quelques mois, pourra dire qu’il n’a plus un seul analphabète. [...] Notre peuple se propose de livrer sa grande bataille contre l’analphabétisme avec l’objectif ambitieux d’enseigner à lire et à écrire à tous les analphabètes, jusqu’au dernier, durant la prochaine année ».

270 000 volontaires vont alors sillonner le pays, en allant notamment dans les coins reculés c’est-à-dire dans les campagnes et dans les quartiers populaires. Leur but ? Alphabétiser le peuple à tout prix. Une dizaine d’entre eux perdront d’ailleurs la vie suite à la tentative d’invasion fomentée par les Etats-Unis à la Baie des cochons. En quelques mois, plus de 700 000 personnes apprennent à lire, à écrire, et à compter. Un an plus tard, le 22 décembre 1961, Fidel Castro déclare, lors d’une allocution à La Havane, Cuba territoire libre de l’analphabétisme.

Dans la Constitution cubaine de 1976 le droit à l’éducation est affirmé à l’article 50 : Chacun a droit à l’éducation. Ce droit est garanti par un vaste et gratuit système d’écoles, demi-internats, internats et bourses, dans tous les types et nivaux d’enseignement et par la gratuité du matériel scolaire, ce qui donne à chaque enfant et à chaque jeune, quelle que soit la situation économique de sa famille, la possibilité de suivre des études conformément à ses aptitudes, aux exigences de la société, et aux besoins du développement économique et social.Les hommes et femmes adultes bénéficient aussi de ce droit, dans les mêmes conditions de gratuité et avec les facilités spécifiques prévues par la loi, par l’éducation des adultes, l’enseignement technique et professionnel, la qualification professionnelle obtenue dans les entreprises et les organismes de l’État et les cours d’enseignement supérieur pour les travailleurs.

Durant ces années, le budget alloué à l’éducation est augmenté. De 79 millions de pesos en 1957, il passe à 218 en 1962, 260 en 1965 et 350 en 1970. Le nombre d’enfants scolarisés augmente également durant les premières années de la Révolution. Le milieu rural voit ainsi ses effectifs doublés, tant en nombre d’élèves qu’en nombre d’enseignements pour l’année 1959-1960.

Dans le primaire, pour la promotion 1955-1961, 204 000 élèves étaients inscrits en première année. Contre 458 000 pour la promotion 1961-1967, et 387 000 pour la promotion 1967-1971. En revanche le taux d’élèves ayant obtenu un diplôme au bout des six ans passa de 86,9% pour la promotion 1955-1961, à 74% pour celle de 1961-1976 et à 66,1% pour celle de 1967-1971.

Dans l’enseignement secondaire, le nombre d’enseignants passa de 4 600 pour l’année scolaire 1958-59, à 19 000 pour l’année scolaire 1969-1970, et à 80 000 pour l’année scolaire 1979-1880. Le nombre total d’élèves bondit lui aussi. De 89 000 en 1958-59 il passa à 118 000 en 1960-1961, à 449 000 en 1975-76 et à 1 150 000 en 1979-1980.

Yo si puedo, la méthode cubaine

Comme dans le domaine de la santé, Cuba a ensuite exporter ses moyens humains et intellectuels pour aider à l’alphabétisation dans d’autres pays en Amérique latine, en Asie, en Océanie, et en Afrique. La méthode Yo si puedo (« Oui je peux ») a ainsi été traduite et adaptée en plusieurs langues : espagnol, anglais, portugais, quechua, créole, swahili, guarani, aymara mais aussi en braille pour les personnes aveugles ou sourdes.

En Australie, au Venezuela, au Nicaragua, à Haïti, en Angola, en Espagne etc., grâce à cette méthode, des millions de personnes, dans près d’une trentaine de pays, ont pu être alphabétisées.

Dans la Constitution adoptée en 2019 le droit à l’éducation est réaffirmé à plusieurs reprises, notamment à l’article 73 : L’éducation est un droit de toutes les personnes et une responsabilité de l’État, qui garantit des services d’éducation gratuits, accessibles et de qualité en vue d’une formation intégrale, depuis la prime enfance jusqu’aux hautes études universitaires. L’État, pour rendre ce droit effectif, met en place un vaste système d’institutions éducationnelles dans tous les types et à tous les niveaux d’enseignement, qui offre des possibilités d’études à n’importe quel âge de la vie en fonction des aptitudes, des exigences sociales et des besoins du développement économique et social du pays. La société et les familles ont une responsabilité dans l’éducation. La loi définit la portée du caractère obligatoire des études, la formation générale minimale à acquérir, l’éducation des personnes adultes et les hautes études universitaires ou d’autres études complémentaires qui peuvent, à titre d’exception, entraîner des frais.

En 2006, l’Organisation Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture, présentait une étude sur l’efficacité et la faisabilité de la méthode d’alphabétisation Yo si puedo. On pouvait notamment lire dans le point 7 : « Le programme est fondé sur l’utilisation de 17 vidéos préenregistrées à Cuba et contenant 65 leçons. Le dossier comporte également des cahiers d’exercices destinés à chaque participant et un manuel pour le facilitateur. Les leçons sont découpées en trois blocs : préparation, apprentissage de la lecture et de l’écriture et consolidation de l’apprentissage. L’élève est censé apprendre à lire et à écrire en sept semaines, à raison de cours quotidiens d’environ deux heures, échelonnés des lundis aux vendredis. Pour être considéré comme alphabétisé, il doit être capable, à l’achèvement des cours, de rédiger une lettre lisible présentée selon une forme donnée. » Et dans le point 8 que : » La méthode est fondée sur l’association de chacune des lettres de l’alphabet à un chiffre. L’ordre des lettres (associées aux chiffres) est fonction de la fréquence de leur emploi. La méthode implique la présentation de combinaisons de lettres (associées chacune aux chiffres correspondants) formant des mots et graphèmes qui facilitent la mémorisation. »

Le rapport concluait ainsi : « La méthode Yo, sí puedo est une stratégie de grande valeur pour lutter contre l’analphabétisme dans la région. À cet égard, le soutien horizontal et la solidarité de Cuba sont appréciés. Néanmoins, cette méthode ne saurait être considérée comme la seule applicable à l’exclusion de toute autre. Il est suggéré d’améliorer l’impact de la méthode YSP en s’appuyant sur les recommandations figurant dans ce rapport – surtout en ce qui concerne son cadre conceptuel, l’adaptation culturelle et linguistique, sa viabilité et son appropriation au niveau national, la transparence de l’information et la synergie avec d’autres méthodes et parties prenantes. »

Et aujourd’hui ?

Aujourd’hui le taux d’alphabétisation est de 99,8% (chiffres de 2016). Et le système éducatif cubain est mondialement reconnu par l’Unesco, et par l’Unicef. Le taux de scolarisation est le plus élevé de l’Amérique latine avec 99,7 % des enfants disposant d’une éducation gratuite jusqu’à l’université. Tous les élèves, du primaire et du secondaire, reçoivent, d’ailleurs, chaque midi, un repas gratuit.

L’enseignement est obligatoire à Cuba de 6 a 14 ans. Il y a quatre niveaux d’enseignement : préprimaire de 3 à 5 ans, primaire de 6 à 11 ans, secondaire de 12 à 17 ans, supérieur de 18 à 22 ans. Pour ce qui est de la prise en charge et de l’apprentissage des enfants souffrants d’handicaps physiques ou mentaux, l’île s’est dotée d’un ensemble de plus de 420 écoles capables de répondre aux objectifs de préventions, d’assistance et d’intégration.

Enfin, comme mentionné dans le premier épisode consacré au système de santé, Cuba accueille des milliers d’étudiants étrangers, notamment par le biais de l’ELAM, l’Ecole de médecine latino-américaine. [ LGS : voir témoignage d’un élève ici https://www.legrandsoir.info/sin-embargo-paroles-cubaines-sur-le-blocus-et-le-reste-aussi-11-13-paula-andrea.html ]

»» https://lesnouvelleslibres.com/2020...
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