A propos du 17 Novembre… (Suite)
Lettre ouverte aux syndicats et partis « de gauche »
et à leurs avatars pseudos- « marxistes-léninistes »,
« marxistes révolutionnaires » et autres « syndicalistes révolutionnaires »…
En forme de rafraîchissement de mémoire historique…
Actuellement, l’unanimité est faite au moins sur un point entre toutes ces « élites » et « avant-gardes » autoproclamées de la « gauche » française : aucune n’apporte son soutien au mouvement du 17 Novembre, hormis Mélenchon et Ruffin, à titre « personnel » et du bout des lèvres, et, naturellement, sans engager leurs « troupes » en voie de déliquescence.
Plusieurs de ces « institutions », la CGT, le journal « l’Humanité », les syndicats « solidaires », le NPA, LO, etc…, se sont même très officiellement fendues d’articles et de communiqués pour condamner, en fait, toute participation « de gauche » à ce mouvement.
Le prétexte affirmé est évidemment la tentative de « récupération » dont ce mouvement est l’objet par la droite nationaliste et l’extrême-droite, DLF, RN(ex FN), et d’autres activistes de ce bord.
En ce qui concerne l’origine réelle de ce mouvement, il n’a clairement, au départ, aucune coloration politique particulière et s’inscrit dans le fil de protestations populaires induites par la réalité de la crise économique et la brutalité des reculs économiques et sociaux imposés par le système capitaliste et son serviteur du moment, le gouvernement Macron.
De sorte que la vague de soutien qu’il semble actuellement soulever pose une question claire à la gauche :
La revendication immédiate qui le sous-tend, contre la hausse du prix des carburants, est-elle justifiée d’un point de vue social ?
Si la réponse est oui, la gauche doit donc reprendre cette revendication à son compte, et, d’une part, manifester son appui à cette initiative, et d’autre part, si elle estime avoir des critiques à formuler sur le mode d’action choisi, ce qui n’est pas forcément illégitime, comme on l’a déjà vu, proposer des actions complémentaires qui prolongeront cette première action d’origine spontanée.
Si elle estime la revendication injuste, et constate donc qu’elle sert uniquement de marche-pied à l’extrême-droite, elle doit non seulement la condamner carrément et ouvertement, mais encore, bien plus, faire également carrément et ouvertement campagne contre cette supposée « manœuvre » de l’extrême-droite…
Elle doit donc fournir un argumentaire convainquant qui puisse arracher ce mouvement populaire des « griffes » de l’extrême-droite.
Faute de quoi, non seulement elle légitimise cette récupération, abandonnant le terrain d’une revendication sociale justifiée à l’extrême-droite, mais elle lui fait carrément la courte échelle en vue de son accession éventuelle au pouvoir.
Le fait que l’extrême-droite ait réussi à prendre ce train en marche au bon moment est indéniable, le fait qu’il y eu un plan préconçu à ce sujet ne semble toujours pas avéré, mais cela ne changerait rien au problème, quant au fond.
Dans la Russie du début du XXème siècle, quant le prolétariat a commencé à s’organiser spontanément, le régime tsariste s’est dépêché d’y infiltrer des indicateurs et des provocateurs. Il est même allé, par ce biais, jusqu’à créer lui-même, via ses agents infiltrés, des organisations ouvrières complètes, sur la base des revendications populaires immédiates, dans le but de les canaliser et de les contrôler !
Pour autant, cela n’enlevait rien à la validité de ces revendications, et encore moins, au soutien populaire massif qu’elles rencontraient, au tournant de l’année 1905, déjà…
C’est là que se place l’épisode célèbre de la grande manifestation organisée par le Pope Gapone, à la fois agent tsariste occulte et leader charismatique du mouvement populaire de l’époque… Compte tenu des mœurs brutales de cette époque farouche l’affaire a évidemment tourné au tragique, mais elle a en fait mis complètement et définitivement à bas la légitimité du Tsar, qui avait en réalité signé là son propre arrêt de mort, en croyant arrêter l’Histoire en marche, littéralement et sans jeu de mots… !
On peut imaginer, à la lueur des « lumières » de la gauche française actuelle, ce qu’aurait été un cours de l’histoire « alternatif » si les bolcheviks, tout nouvellement organisés en parti suite à la rupture avec les mencheviks, s’étaient désolidarisés de ces revendications et de ces luttes !
Non seulement ce n’était pas le cas, mais tout en étant parfaitement conscients des probabilités d’infiltrations policières, qui n’ont été confirmées que par la suite, il faisaient, eux aussi, leur travail d’infiltration pour tenter de renforcer ce mouvement et de promouvoir des revendications de plus en plus radicales.
Sans ce travail, la légitimité politique n’eut point nécessairement changé de camp, ni à cette époque ni plus tard, et l’autocratie guerrière et meurtrière du tsar aurait certainement duré encore beaucoup plus longtemps, sinon encore aujourd’hui…
Bien évidemment, comparaison n’est pas raison, et il n’y a pas lieu de projeter cette situation ancienne sur la nôtre, mais néanmoins la question de légitimité sociale et politique d’une revendication demeure, quel que soit le contexte.
Refuser de légitimer socialement une revendication telle que celle du 17 Novembre, c’est, ipso facto, légitimer la politique de Macron et du système, et, quoi qu’il arrive, échec ou réussite, la main-mise de l’extrême-droite sur le mouvement populaire et prolétarien.
Dans l’état de faiblesse relative où il se trouve, et avec le peu de légitimité populaire qu’il reste à Macron, cela risque fort d’être, pour la « gauche » française, un choix historique dont elle n’est pas près de se remettre, tant il lui reste si peu de légitimité, également.
La pseudo « extrême-gauche », se posant « marxiste-léniniste » ou non, ferait bien de s’en aviser, également.
Luniterre
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https://tribunemlreypa.wordpress.com/2018/11/07/a-propos-du-17-novembre-lettre-ouverte-aux-syndicats-et-partis-de-gauche/
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