Les protestations d’étudiants au Nicaragua sont décrites dans les médias occidentaux comme des protestations légitimes de jeunes nicaraguayens qui se sont unis spontanément pour combattre la soi-disant dictature.
Il y a certainement beaucoup de jeunes qui se sont unis à la lutte avec ces idées. Certainement, beaucoup de gens ici, en Suède, s’y sont joints et soutiennent cette lutte. Mais beaucoup de choses indiquent qu’il ne s’agit pas de protestations spontanées. Il y a beaucoup d’indices que des organisations dirigées par les Etats-Unis ont attendu le moment favorable pour créer le chaos, exacerber les contradictions pour déstabiliser le Gouvernement du Nicaragua démocratiquement élu.
Nous avons plus de 2 000 jeunes dirigeants au Nicaragua qui ont de l’influence sur la société civile, dit l’organisation étasunienne Institut National Démocratique (NDI) sur son site.
Diplôme de Direction et d’Administration Politique financé par le NDI au Nicaragua
Une des 3 étudiantes en tournée en Suède en ce moment est Jessica Cisneros, active sur les sujets de l’intégration et de la participation civile dans les processus politiques. Elle est membre du Mouvement Civique des Jeunesses (MCJ). Cette organisation est financée, a été créée par l’Institut National Démocratique et en fait partie. Le NDI est une organisation qui travaille à changer la société dans d’autres pays. La présidente du NDI est Madeleine Albright, ex-Secrétaire d’Etat des Etats-Unis. Le Secrétaire Général du Mouvement Civique des Jeunesses, Davis José Nicaragua López, qui apparaît en tant que fondateur de l’organisation, est aussi coordinateur du NDI au Nicaragua et actif dans une série d’organisations similaires au Nicaragua et au Salvador.
Extrait du site du NDI : « Le Mouvement Civique des Jeunesses (MCJ) a fait partie d’un projet du NDI qui a débuté en 2015 pour étendre l’encadrement des jeunes et l’engagement politique en apportant une formation pratique dans des techniques d’organisation des communautés. Plusieurs des membres du groupe sont diplômés du programme de Certification en Encadrement et Direction Politique (CLPM) que le NDI a soutenu avec les universités nicaraguayennes et des organisations de la société civile. »
Yerling Aguilera vient de l’Université Polytechnique (UPOLI) de Managua et spécialiste en recherches sur la révolution et le mouvement féministe. Elle a aussi été employée et conseillère de l’IEEPP au Nicaragua qui travaille avec le renforcement de la formation des acteurs politiques, d’Etat et sociaux pour un public mieux informé grâce à des services créatifs et innovants. L’IEEPP a reçu 224,162 dollars de la Fondation Nationale pour la Démocratie (NED) entre 2014 et 2017.
Madelaine Caracas participe au dialogue national pour changer la politique du Nicaragua.
De 2015 à aujourd’hui, les Etats-Unis ont élargi leur soutien au Nicaragua, surtout grâce au soutien de cours de direction et d’argent destiné aux jeunes dans les universités, les écoles, les ONG et les partis politiques. Ils ont donné la priorité aux organisations qui travaillent avec les mouvements féministes et les mouvements de femmes, des droits de l’homme et concernant l’environnement. Le NDI écrit sur son site :
« Pour assurer que la prochaine génération de dirigeants sera armée pour gouverner de façon démocratique et transparente, depuis 2010, le NDI s’est associé avec des universités nicaraguayennes et des organisations civiques pour diriger un programme de direction pour les jeunes qui a aidé à préparer plus de 2 000 jeunes dirigeants actuels et futurs dans tout le pays. Le NDI a aussi contribué aux efforts du Nicaragua pour augmenter la participation politique des femmes et les initiatives pour faire diminuer la discrimination contre les personnes LGTB, et a partagé les meilleures pratiques de contrôle des processus électoraux. » L’ingérence étrangère dans la démocratie et dans les élections serait-elle bonne pour le Nicaragua et inacceptable pour les Etats-Unis et la Suède ?
Il est aussi intéressant de comparer ce qui se passe au Nicaragua avec ce qui se passe dans d’autres pays. Le NDI travaille aussi au Venezuela, et là aussi, à des actions subversives. L’activité des Etats-Unis et du NDI en Amérique Latine doit être comparée avec le débat sur l’ingérence de puissances étrangères dans les systèmes électoraux des Etats-Unis de la Suède ou de l’Europe. Par exemple, ces pays accepteraient-ils que la Russie forme et soutienne des organisations qui forment des dirigeants politiques en Suède ou aux Etats-Unis ? Le NDI décrit ainsi ses activités au Venezuela sur son site :
« Le NDI a commencé à travailler au Venezuela au milieu des années 90 en réponse à des demandes d’échange d’expériences internationales sur des points de vue comparés de gouvernance démocratique. Après avoir fermé ses bureaux au Venezuela en 2011, le NDI a continué, à partir de demandes, d’offrir des ressources matérielles aux processus démocratiques, même à visées internationales sur la transparence des élections, le contrôle des processus politiques et l’organisation civique et politique. De plus, l’Institut encourage le dialogue entre les Vénézuéliens et leurs homologues civils et politiques au niveau international sur des sujets d’intérêt mutuel. »
Un budget de plusieurs millions au Venezuela – Expulsés de Bolivie
Des organisations étasuniennes travaillent au développement de la démocratie et de l’ingérence étrangère au Nicaragua. Selon son site, l’’Institut National Démocratique, le NDI, a 2 000 jeunes dirigeants au Nicaragua. La NED, la Fondation Nationale pour la Démocratie, est une autre organisation qui, selon ce qu’elle dit elle-même, s’est consacrée depuis les années 90 à faire le travail que faisait auparavant la CIA en secret. Elle organise la déstabilisation d’autres pays.
La NED travaille avec une série d’autres organisations, des médias, des sites et des ONG au Nicaragua. Officiellement, son soutien au Nicaragua atteignait environ 4,2 millions de dollars entre 2014 et 2017. L’USAID travaille officiellement sur l’aide médicale et l’aide en cas de catastrophes. Mais comme le NDI et la NED, elle soutient une série d’organisations qui travaillent sur le thème des femmes, des enfants, de l’environnement et des droits de l’homme. Sur son site, elle écrit qu’elle veut : « Promouvoir la démocratie en formant de jeunes dirigeants et des dirigeants émergents et en leur apportant une aide technique pour qu’ils renforcent la participation civile et améliorent la conduite locale. » Ils ne disent pas la démocratie de qui ils veulent renforcer, si c’est la vision de la démocratie des Etats-Unis et de la CIA ou celle du peuple du Nicaragua.
Avant, l’USAID travaillait en Bolivie mais elle a été expulsée du pays en 2013 quand on a constaté qu’elle organisait des activités de déstabilisation du pays. Dans le même coup de filet a été expulsée une organisation danoise. Cela ne veut pas dire que cette organisation se consacrait nécessairement à des activités illégales mais qu’elle travaillait avec une organisation qui recevait de l’argent des Etats-Unis. L’USAID travaillait aussi au Venezuela et dit aussi travailler là au renforcement de la « société civile. » Son budget au Venezuela en 2015 était de 4 256 millions de dollars. Ses partenaires au Venezuela étaient, entre autres, Freedom House et le NDI.
Qui fera des changements au Nicaragua ? Et est-ce que ce sera par la violence ou par des élections ?
L’USAID, le NDI et la NED ont une activité importante au Nicaragua, avec des milliers d’actions de formation pour « changer la société, » des centaines d’ONG, d’universités et de partis politiques qui reçoivent de l’argent et du matériel de ces organisations. Les Etats-Unis participent à ce processus et c’est leur intérêt de déstabiliser le Gouvernement sandiniste démocratiquement élu. Croire que les Etats-Unis ne sont pas impliqués dans les troubles au Nicaragua, c’est faire preuve de naïveté.
La situation au Nicaragua est grave et il faut un dialogue pour la paix. Les responsables de la violence doivent répondre des incendies, des troubles, des destructions et des pillages, aussi bien les manifestants que les criminels, les groupes politiques de jeunes et les politiciens. Si comme le disent les dirigeants étudiants, Daniel Ortega a ordonné de tirer pour tuer, alors, qu’on juge le Président. Et s’il y a eu ingérence étrangère dans les affaires intérieures du Nicaragua, que les responsables en répondent, aussi bien les activistes au Nicaragua que les politiciens aux Etats-Unis.
Beaucoup de choses peuvent changer pour être améliorées au Nicaragua mais ce doit être l’œuvre des Nicaraguayens eux-mêmes et pas l’argent et l’ordre du jour des Etats-Unis qui déterminent les changements.
Achim Rödner
traduction Françoise Lopez pour Bolivar Infos