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La prochaine révolution de la production sociale passera par l’intelligence artificielle : sommes-nous prêts ?

« A mesure que se développent le mode de production capitaliste et, avec lui, le volume de valeur et la durée du capital fixe investi, on voit la vie de l'industrie et du capital industriel se développer également dans chaque affaire particulière jusqu'à se prolonger de longues années, disons en moyenne dix ans. Mais si d'une part cette vie est prolongée par le développement du capital fixe, elle est abrégée, d'autre part, par le bouleversement constant des moyens de production qui s'intensifie constamment, lui aussi, avec le développement du mode de production capitaliste. Il entraîne par l'effet de l'usure morale, le changement des moyens de production, la nécessité de leur remplacement constant, bien avant qu'ils n'aient (pas) fait matériellement leur temps. On peut admettre que dans les branches les plus décisives de la grande industrie, ce cycle de vie s'étend présentement en moyenne sur dix ans. Du reste, la précision du chiffre n'a aucune importance ici. Un point est acquis : avec sa durée de plusieurs années, ce cycle de rotation reliées entre elles, au cours desquelles le capital est captif de son élément fixe, fournit une base matérielle aux crises périodiques, qui font passer les affaires par des phases successives de stagnation, d'animation moyenne, de précipitation, de crise. » K. Marx, Le Capital, T. VI, P61

* * *

1 - Cette « révolution incessante des moyens de production qui s’accroît » est en cours de réalisation avec l’intelligence artificielle

L’intelligence artificielle ou IA est un sujet récurrent ces derniers temps. En effet, dans les médias, au cinéma ou encore dans les livres, les forces sociales dominantes préparent les esprits aux changements sociaux qui s’annoncent. L’intelligence artificielle intégrera tous les secteurs de la vie sociale : dans nos smartphones, nos logiciels, nos foyers, en passant par le processus de production.

Ce dernier point est intéressant, car l’IA va « révolutionner » la production sociale et jeter les bases matérielles d’un nouvel ordre de production dans le cadre du capitalisme. D’ailleurs, des scientifiques très célèbres ont donné leurs avis concernant ces changements imminents. Le grand scientifique Stephen Hawking (qui siège à la place de Newton) affirmait lors d’une de ses déclarations : « Les formes primitives d’intelligence artificielle que nous avons déjà se sont montrés très utiles. Mais je pense que le développement d’une intelligence artificielle complète pourrait mettre fin à l’humanité. Une fois que les hommes auraient développé l’intelligence artificielle, celle-ci décollerait seule, et se redéfinirait de plus en plus vite. Les humains, limités par une lente évolution biologique, ne pourraient pas rivaliser et seraient dépassés ».

Définition :

L’intelligence artificielle forte : elle fait référence à une machine (ce que Marx appelait « machinisme ») capable non seulement de produire un comportement intelligent, mais de donner l’impression d’une réelle conscience de soi, de « vrais sentiments » et d’« une compréhension de ses raisonnements ».

L’intelligence artificielle faible : elle constitue une approche pragmatique de la part des ingénieurs. Chercher à construire des systèmes de plus en plus autonomes, des algorithmes capables de résoudre des problèmes d’une certaine classe, etc.

L’IA se développera dans les différents secteurs de production et ainsi elle bouleversera complétement la production sociale (ce que Marx appelait « la production sociale de nos existences). En d’autres termes, l’IA est agrégée au processus de développement des forces productives : il s’agit d’un capital constant en progression ininterrompue.

Ce développement du machinisme a déjà eu lieu auparavant, au cours des derniers siècles. Il n’engendrera pas, d’une manière nécessaire et automatique, un changement du mode de production lui-même. D’ailleurs, si un tel changement se produisait à chaque révolution des moyens de production, nous aurions accédé depuis longtemps au socialisme !

Le capitalisme a donc besoin de « révolutionner ses moyens de productions et ses instruments de production » sans cesse, car en faisant cela il bouleverse les mœurs, les mentalités, les attentes, les perspectives. Ce bouleversement dans la production sociale de nos existences empêchera le développement des idées révolutionnaires et redonnera du souffle à l’oligarchie financière parasite.

Dans la production sociale de leur existence, les rapports sociaux qu’entretiennent les hommes entre eux sont totalement subordonnés aux monopoles et à la toute-puissance du capital financier. Cette situation devient particulièrement intenable lors de certaines séquences historiques. Des contradictions antagonistes et inconciliables peuvent alors se cristalliser.

Le capital doit alors éviter à tout prix que ne se cristallise la contradiction fondamentale entre le caractère des forces productives (premier aspect) et les rapports de production : car dans ce cas le mode de production serait en danger. Pour empêcher que cela ne survienne, l’oligarchie financière présentera une autre vision de la production à la force de travail exploitée en requérant de celle-ci un temps d’adaptation, de formation, de compréhension : l’intelligence artificielle se situe dans une logique similaire.

En outre, ce développement inégal entre le capital constant et le capital variable a été démontré par Karl Marx dans sa théorie concernant « la baisse tendancielle du taux de profit », concept central du marxisme s’il en est. Dans cette théorie, Karl Marx insistait sur le fait que pour donner suite à ce développement inégal, la force de travail humaine ou capital variable intégrerait « l’armée industrielle de réserve du capital », les chômeurs en d’autres termes.

Mais cela ne signifie pas pour autant que le mode de production capitaliste s’effondrera de lui-même, par la force du Saint-Esprit ou grâce à une baguette magique ! De sorte que la révolution doit se doter d’une force sociale progressiste qui englobe le mouvement de notre société...

La baisse tendancielle du taux de profit entraîne deux conséquences fondamentales : 1- révolte des travailleurs ; 2- baisse du taux de profit. En effet, la force de travail humaine exploitée dans les procès de production réalise le profit à elle seule. Il en résulte une question : si cette force de travail humaine était remplacée par les machines, qui réaliserait alors le profit ?

Résumons en quelques points, et de façon sommaire, cette théorie de Marx démontrant la nécessité pour l’oligarchie au pouvoir de développer ce capital constant qu’est l’intelligence artificielle :

A) Nous avons d’un côté les capitalistes qui sont propriétaires des moyens de production et, de l’autre, les salariés : ces deux bouts de la chaîne permettent de créer des marchandises et de les vendre à un certain prix, ce dernier confirmant la plus-value qui a été réalisée.

B) Le prix de la marchandise doit être supérieur aux coûts de production : sinon la plus-value, et donc le profit, ne se confirmerait pas.

C) L’oligarchie au pouvoir va chercher à augmenter son taux de profit et dans cette logique, elle va réduire les coûts de production. Elle poussera alors à la réduction des salaires et au remplacement des hommes par les machines.

D) Ce remplacement des hommes par les machines va créer une hausse continue de l’armée de réserve des chômeurs.

E) Mais la plus-value, c’est-à-dire le profit, trouve son origine dans la force de travail humaine achetée et exploitée dans les différents procès de production. D’autre part, la force de travail humaine, qui a été intégrée dans l’armée de réserve des chômeurs, consomme nécessairement moins...

F) C’est donc le contraire qui se produit : diminution du profit et révolte des salariés.
La loi générale de cette théorie est simple : la force humaine sera remplacée par les machines. Cette logique se présente différemment selon les séquences de l’histoire au cours desquelles évoluent les sociétés. Ce processus du remplacement de l’homme par les machines, en cours de réalisation, s’inscrit dès à présent dans une histoire marquée par le sceau du développement de l’intelligence artificielle.

2-Exemple concret de projets prenant pour axe central l’IA

A) Libérer la libération de médicaments avec des puces implantées (voir le livre de Ted Sargent « Bienvenue dans le nanomonde » aux éditions Dunod) :

Des chercheurs ont trouvé qu’on pouvait stimuler la libération de médicaments par des signaux électriques issus de micropuces. Un cocktail de substance peut alors être libéré avec une précision extrême. C’est ce qu’ils désignent sous l’appellation de « la pharmacie sur puce ».

B) Imprimer des cellules photovoltaïques (voir livre présenté ci-dessus) :

Des galettes rigides de cristaux de semi-conducteurs sont utilisées dans la confection des panneaux solaires traditionnels. Ces dispositifs en silicium convertissent 20% de la puissance incidente du soleil en énergie électrique. Les cristaux doivent pousser sous vide et à haute température : leur fabrication est d’une grande complexité. Les nanotechnologistes élaborent des structures photosensibles flexibles. Ces matériaux photovoltaïques sont imprimés comme des journaux, en rouleaux ininterrompus. Ils sont faciles à transporter et à déployer : une robe à manches courtes absorberait aujourd’hui assez de lumière du soleil pour alimenter une ampoule ou recharger une pile ! Les Africains rêveraient de porter ce genre de vêtements !

C) Combiner et relayer l’information sensorielle

Le système a besoin de combiner toutes les informations recueillies aussi bien sur un champ de bataille que dans une décharge de produits chimiques, une commune ou un pays. L’objectif est de relier des capteurs et de rapatrier l’information sur un point central où elle serait analysée pour finalement permettre d’agir.

Pour cela, l’université de Californie à Berkeley et la société Intel Corporation ont développé un projet : « les Motes ». Ce sont de mini-ordinateurs autonomes à pile qui utilisent les communications sans fil pour échanger les informations.

Connus aussi sous le nom de « poussières intelligentes », les « Motes » ont été créés pour être petits, bon marché, et interconnectés, de telle sorte que des milliers d’ordinateurs millimétriques pourraient être dispersés dans un champ, un aéroport ou une aire naturelle à protéger, formant un réseau complet de censeurs.

Les « Motes » détectent la présence des autres et forment leur propre réseau AD HOC. Les ingénieurs ont développé un système d’exploitation du nom de TinyOS pour que des programmes puissent y fonctionner. D’ailleurs, les « Motes » ont été utilisés pour surveiller et gérer des fermes, des bâtiments, ou encore contrôler la fabrication industrielle et informer les troupes sur le champ de bataille.

D) Neuralink

C’est une entreprise qui a été créée par Elon Musk (directeur de SpaceX et de Tesla Motors). Cette entreprise a été enregistrée en juillet 2016 en Californie. Sa mission, en tant qu’ « entreprise de recherche médicale », est de travailler « sur l’implantation d’électrodes miniatures dans le cerveau qui pourraient un jour télécharger des pensées ». Avec SpaceX, Elon Musk s’était déjà fait remarquer en commercialisant des Falcon-9. SpaceX est un prestataire de service à qui la NASA a confié un contrat de transport de fret vers la station spatiale internationale ISS. L’intelligence artificielle est un élément clef dans le fonctionnement de ces différents concepts.

3 - Révolution ou révolution ?

Nous pouvons constater que le développement du « machinisme » via l’intelligence artificielle est une nécessité du capital financier (principale caractéristique de l’impérialisme) et donc des monopoles voulant augmenter leur taux de profit, ainsi que le prévoyait la « baisse tendancielle du taux de profit » théorisée par Marx.

Le problème n’est pas le degré de développement de ces forces productives (qu’il est impossible d’endiguer), c’est à dire le progrès en lui-même ! Il serait dommageable que l’humanité retourne à une existence primitive dans laquelle l’arc et la flèche seraient l’arme principale ! Le problème provient du fait que ce progrès est accaparé par une oligarchie au pouvoir qui le détourne à des fins personnelles : profits, pouvoir, etc.

Qu’est-ce qu’une « avant-garde » ?

Prenons un exemple avec une horloge...

Il est midi et la majorité des travailleurs sont donc persuadés qu’il est effectivement midi : c’est l’heure qui est indiquée par l’horloge (donc la réalité). Ces travailleurs s’organisent et leur vie toute entière est déterminée par cette heure qui s’affiche sur l’horloge. L’avant-garde est, quant à elle, douée d’un degré de conscience lui permettant d’analyser et de voir ce qui se trame derrière cette horloge. C’est-à-dire qu’elle connaît l’heure réelle (le mouvement réel) qui est non pas midi, mais midi et demi.

Pour l’avant-garde, une chose prime : le facteur subjectif de conscientisation. En effet, son devoir est de faire comprendre aux masses l’heure réelle. Il en découle que l’avant-garde doit être en mesure d’analyser ce mouvement et d’anticiper les changements à venir afin de préparer les travailleurs exploités au nouvel ordre social.

En France « l’avant-garde » est inexistante et nous pouvons même dire, sans risque de grandement nous tromper, qu’elle est dans une perspective de négation de la réalité objective. Plusieurs changements profonds vont se réaliser de par l’IA, entres autres, mais elle refuse d’accepter son retard et sa décomposition.

Les travailleurs doivent donc se poser deux questions :

1-Dois-je accepter ce nouvel ordre social dans lequel je ne suis qu’un animal producteur de richesse pour autrui ?

2-Le progrès appartient-il à une classe sociale déterminée ou appartient-il à l’humanité dans son entier ?

Jimmy Dalleedoo

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