Dans un pays vraiment démocratique, qui aurait donc un souci sincère de la liberté et du droit, cet homme – selon la loi libérable depuis 1999 – serait dans l’heure rendu aux siens. Mais nous sommes en France, état gouverné par un président qui fait la fête avec Netanyahou ; et par Valls qui, chaque matin en se rasant, cherche la bonne idée du jour qui puisse faire plaisir à Israël. Manque de chance : Abdallah a été condamné pour l’assassinat, en 1982 en France, de deux diplomates, un américain et un israélien. Des représentants de pays qui ne comptent que des amis à l’intérieur de l’état PS. Voilà pourquoi Abdallah à la demande de Washington et Tel-Aviv, même sa peine purgée, doit mourir dans sa centrale de Lannemezan. Le 23 septembre son avocat va, à nouveau, déposer une demande de mise en liberté, elle risque d’être une illusion de plus.
L’affaire Abdallah est un double scandale, une vilaine moisissure sur les pages de l’histoire de France. Tout d’abord, le révolutionnaire libanais a été mal jugé, mal condamné. Mais, pour ceux qui ne veulent pas tenir compte de la réalité de ce massacre judiciaire, il existe une ignominie dans l’ignominie : le maintien en prison d’un homme qui a accompli « son » temps derrière les murs. Difficile après cela de dénoncer ces dictatures où les portes des prisons ne s’ouvrent que dans un sens. En sémantique on peut dire qu’aujourd’hui Abdallah est un otage du gouvernement français.
Dans le premiers mois de son emprisonnent le révolutionnaire, marxiste et compagnon de route des Palestiniens et des nationalistes Arabes, a été soumis à un traitement digne du Moyen Age et de la Question. Un exemple. Un week-end une petite équipe de la DST débarque (illégalement) à la Santé et s’installe près de la cellule d’Abdallah. Cette bande barbouzarde, conduite par un policier aujourd’hui en retraite et qui ne cesse d’encombrer les plateaux de télévision, soumet le prisonnier à la torture avec un revolver sur la tempe, et le menace d’être jeté mort dans la Seine... Pour ces flics hors la loi, en 1986, il s’agit de faire avouer au détenu libanais les secrets d’attentats commis ou programmés à Paris. Ces hommes obtus, cowboys incompétents, ignorent que leur malheureuse cible n’a rien à leur avouer. Ces attentats, dont celui de la rue de Rennes, liés aux dossiers Eurodif et Gordji, sont commis à la demande de l’Iran... alors que lui, Abdallah est un militant de la Fraction Armée Libanaise (FARL) qui n’a rien de commun avec les desseins de Khomeiny... Peu importe, Pasqua entend « terroriser les terroristes » donc, on torture. Mais ce n’est pas seulement cela. Pour la gestion d’une justice à sa main, le SDECE, les services spéciaux français (ex-DGSE), parvient à faire nommer un de ses agents comme avocat du révolutionnaire. Dans tout État, simplement normal, les responsables des ces forfaitures auraient été eux même conduits devant un juge...
Arrive le temps du procès. A partir de quelle preuve Abdallah est-il condamné ? A partir du contenu d’une valise retrouvée dans une planque du guérilléro anticolonialiste. Elle contient l’arme utilisée pour assassiner les diplomates et une bouteille de « Corrector » portant les empreintes d’Abdallah. La cause est entendue : voila le coupable. Hélas, l’agent qui a chargé cette valise y a oublié son journal.... Un quotidien qui date d’après l’arrestation de Georges-Ibrahim Abdallah. C’est la preuve que les indices accusateurs ont été manipulés, et qu’on ne peut condamner un homme sur l’ édifice d’une « vérité » scellée avec au vent. Peut importe, le libanais est condamné à perpétuité.
Nous avons reçu le témoignage anonyme d’un membre du cabinet de Taubira, ministre de la Justice : « Pour nous, sans aucun doute, il faut libérer ce prisonnier. Mais, après le blocage imposé par Sarkozy, le relai du « niet » a été pris par Valls dès qu’il a été nommé à l’Intérieur. A cette différence que, dans le passé, ce sont les ambassadeurs des États-Unis et d’Israël qui se rendaient place Beauvau pour y faire part de leur opposition à la libération du perpétuel prisonnier. Alors que, dès sa nomination, c’est Valls qui se rendait lui-même dans les deux chancelleries pour y recevoir les ordres ».
Jacques-Marie BOURGET