Monsieur le Président,
Tout d’abord, je tiens à vous rappeler un fait hilarant et tragique : sous votre ère de transition démocratique - comme vous ne cessez de le répéter et dont vous êtes fier -, un jeune tunisien nommé Jabeur Mejri est, injustement, condamné à sept ans et demi de prison ferme et croupit en taule depuis le 28 mars 2012 suite à un procès tenu au tribunal de première instance de Mahdia, sa ville natale.
Monsieur le Président,
Jabeur Mejri est qualifié de prisonnier d’opinion condamné seulement pour son point de vue pacifique par Amnesty International et par tant d’autres organisations et instances, il n’a pas commis de crime pour être aussi sévèrement jugé. Son dossier juridique semble, par contre, assez chargé et assez lourd. Les chefs d’accusation sont, à leur tour, très disproportionnés et démesurés : atteinte à la morale, diffamation et perturbation de l’ordre public. En deux mots, l’accusation paraît si cinglante. Poster des caricatures d’un prophète sur sa page Facebook personnelle par une personne avouant être athée et ne partageant pas les mêmes croyances répandues dans la société constitue-t-il vraiment un crime ? N’est-ce pas plus proche de la liberté d’expression et d’opinion ? Avec toute franchise, êtes-vous, vraiment convaincu du sort de Jabeur Mejri ? Ne trouvez-vous pas cela trop exagéré ?
Il est inutile d’aborder la justesse du procès de Jabeur puisque le jeu a été joué, puisque la condamnation ne sera jamais revisitée.
Monsieur le Président,
Personne ne peut saisir votre position à l’égard de l’affaire Jabeur Mejri. Vous avez déclaré le 26 septembre 2013 lors d’une conférence au Council on Foreign Relations que Jabeur ne peut être libéré pour le moment afin de protéger sa vie menacée par la présence de salafistes. Doit-on alors embastiller toute personne se trouvant menacée ?!
Le 06 novembre 2013, vous avez promis, dans une interview accordée à France Info, de faire libérer Jabeur et que vous n’attendez que de l’accalmie politique pour lui rendre sa liberté. Le temps n’est-il pas encore venu pour libérer le premier prisonnier d’opinion de la Tunisie post-révolutionnaire et pour accomplir ce dont vous avez promis ?
Monsieur le Président,
Vous savez - sans doute - que Jabeur Mejri ne peut être libéré que suite à une grâce présidentielle accordée de votre part. Une fois votre grâce n’est pas accordée, il ne sortira qu’en septembre 2019 !
Veuillez être fidèle à votre passé de militant fervent des droits fondamentaux, d’ex-président de la Ligue Tunisienne des Droits de l’Homme ayant toujours défendu les valeurs universelles et la liberté, dans tous ses aspects, en premier lieu.
Veuillez être en harmonie avec vos convictions et votre conscience.
Veuillez sauver Jabeur en lui accordant cette grâce.
Graciez Jabeur !