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Le Monde Diplomatique (janvier 2014)

Dans le numéro de janvier 2014, Serge Halimi évoque le “ temps des jacqueries ” :

En mars et en mai, des élections municipales puis européennes vont permettre de tester la popularité des socialistes français, deux ans après l’élection de M. François Hollande à l’Elysée. Le verdict s’annonce sévère, tant la situation économique du pays est dégradée et le pouvoir sans ambition.

A première vue, le contraste est absolu. En Allemagne, les deux principales formations politiques, l’Union chrétienne-démocrate (CDU) et le Parti social-démocrate (SPD), viennent de se partager les ministères après s’être (courtoisement) affrontées devant le corps électoral. En France, droite et gauche s’invectivent au point de laisser imaginer que presque tout les oppose : le niveau de la fiscalité, la protection sociale, la politique de l’immigration.

Pourtant, alors que se précise pour l’Elysée la perspective d’un de ces matchs revanches dont les médias préparent déjà la mise en scène, MM. Nicolas Sarkozy et François Hollande pourraient s’inspirer de la franchise de Mme Angela Merkel et de M. Sigmar Gabriel. Et constituer ensemble un gouvernement qui, à quelques détails près, prolongerait les orientations générales prises depuis trente ans.

Benoît Bréville, dans un article passionnant, nous assure qu’aucun d’entre nous n’obtiendra la nationalité chinoise, ce qui n’est pas anecdotique. En revanche, l’inverse est presque un jeu d’enfant :

Mi-octobre, un quotidien sportif relatait les quarts de finale du championnat d’Europe de tennis de table : « Chez les femmes, la double championne d’Europe néerlandaise Li Jiao (2007 et 2011) est tombée face à la Portugaise Fu Yu. Cette dernière retrouvera dans le dernier carré la Suédoise Li Fen, qui a battu la meilleure Européenne, Shen Yanfei (numéro 11 mondiale). L’autre demi-finale sera 100 % allemande, entre Shan Xiaona et Han Ying. » Puis l’auteur étudie l’acquisition de la nationalité à travers le monde, tandis que Warda Mohamed insiste sur les droits bafoués des femmes arabes en la matière.

Olivier Zajec évoque une bataille ignorée dans le Pacifique :
Déclarations menaçantes et escarmouches plus ou moins maîtrisées empoisonnent le climat en mer de Chine orientale. En cause : les îles Senkaku /Diaoyu, revendiquées à la fois par le Japon et par la Chine — avec pour arbitre Washington, pas mécontent de contenir les ambitions de Pékin.

Katsumata Makoto analyse la nouvelle politique économique japonaise :
Quand il a annoncé ce que l’on a appelé les « abenomics », en faisant marcher la planche à billets pour relancer une économie vacillante, le premier ministre japonais Abe Shinzo a été salué de toute part. Enfin, un dirigeant osait défier la doxa de l’austérité ! Mais la question de la destination des fonds déversés, qui avait été négligée, refait surface. Les dépenses militaires, par exemple, vont augmenter de 5 % au cours de la prochaine année. Quant à la croissance…

Anne-Cécile Robert nous dit qu’en Afrique Hollande est un grand président car, selon le proverbe congolais : « La France n’est jamais aussi grande que lorsqu’elle grimpe sur les épaules de l’Afrique ».

Pour Maurice Lemoine, le Paraguay est « dévoré par le soja » :
Asunción espère réintégrer le Marché commun du Sud (Mercosur, dont sont également membres l’Argentine, le Brésil, l’Uruguay et le Venezuela) lors de son sommet du 17 janvier. Le Paraguay en a été expulsé en juin 2012 à la suite du renversement du président Fernando Lugo. Un coup d’État qui a surtout profité aux véritables maîtres du pays : les seigneurs du soja.

Jean-Loup Amselle nous emmène faire du « tourisme chamanique »en Amazonie péruvienne :
Lauréat 2013 du prix de la « meilleure destination gastronomique mondiale », le Pérou entend devenir une puissance reconnue dans le domaine du tourisme. Attirés par le patrimoine culturel et la géographie singulière du pays, les visiteurs recherchent parfois d’autres expériences. Comme la prise d’une substance hallucinogène consommée en Amazonie : l’ayahuasca.

Clara Delpas et Pierre William Johnson nous invitent à protéger les savoirs des peuples autochtones : Acteurs majeurs dans la protection de la biodiversité, les peuples autochtones détiennent des ressources génétiques mais aussi des savoirs traditionnels qui intéressent les industries de l’« économie verte » : pharmacie, cosmétique, agriculture ou encore fabricants d’alicaments. Ces savoirs sont aujourd’hui soumis à une logique de marché appuyée par les offices de brevets, qui soutiennent leur mise en banque.

Sabine Cessou nous parle de l’après-guerre au Congo : Début novembre, les rebelles du M23 annonçaient l’arrêt de leur action militaire. Pourtant, l’est de la République démocratique du Congo n’a pas retrouvé la paix. A Goma, principale ville de la région, la vie s’organise tant bien que mal, alors qu’une quarantaine de groupes armés restent actifs.

A l’entrée de l’Ihusi, un complexe hôtelier quatre étoiles à Goma, six casques bleus indiens, tous armés, veillent à la sécurité. Près de la boutique de l’hôtel, un guichet automatique distribue des billets de 100 dollars : le seul moyen de paiement admis ici. « Le cash en billets verts, c’est la devise non officielle », lance un responsable de l’établissement. Les dollars sont acceptés partout. Ils sont aussi demandés par l’administration de la République démocratique du Congo (RDC) pour payer les taxes et la moindre attestation de vaccination. La monnaie, elle, est rendue en francs congolais, dont le taux de change variable n’inspire pas confiance.

Dans ce même pays, selon Michel Galy, il y aurait eu un véritable génocide : Un « génocide oublié » ? Cinq millions de morts en République démocratique du Congo (RDC) passés inaperçus ? Entretenue par des associations congolaises et internationales, la querelle sur le nombre de victimes des conflits dans la région des Grands Lacs africains depuis 1993 s’envenime. A l’initiative d’une organisation non gouvernementale reconnue, l’International Rescue Committee (IRC), fondée par Albert Einstein en 1933, la polémique porte également sur la qualification des événements. L’IRC n’a pas hésité, dès 2006, à avancer le chiffre de quatre millions de morts et à évoquer un « génocide ». Des associations comme Caritas reprennent le terme, de même qu’un rapport controversé du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme remis le 25 août 2010 au secrétaire général Ban Ki-moon. »

Pour Feurat Alani, on observe les mêmes combats en Irak et en Syrie : En Irak, la violence s’étend chaque jour. Jamais elle n’avait atteint un tel niveau depuis la guerre des milices, entre 2006 et 2008, et le retrait des Etats-Unis, fin 2011. La crise syrienne alimente les antagonismes chez son voisin ; à Bagdad, le premier ministre Nouri Al-Maliki poursuit une politique confessionnelle. Et l’extension du champ de bataille déstabilise toute la région.

Quel est le monde selon Téhéran (Shervin Ahmadi) : Signé en novembre dernier à Genève, l’accord sur le nucléaire iranien marque une étape majeure dans le rapprochement entre Washington et Téhéran, après plus de trois décennies d’affrontements. Certes, les obstacles restent nombreux, mais la République islamique semble déterminée à profiter de la nouvelle donne au Proche-Orient pour développer un dialogue constructif avec les Etats-Unis comme avec ses voisins.

Ces deux pays reviennent de loin. D’un côté, le rôle de la Central Intelligence Agency (CIA) dans le coup d’Etat contre le gouvernement nationaliste de Mohammad Mossadegh en 1953 ; de l’autre, la prise d’otages à l’ambassade américaine en 1979 : en Iran comme aux Etats-Unis, ces épisodes sont encore très présents dans la mémoire collective. Et pourtant, Téhéran semble vouloir tourner la page et accorder pour la première fois sa confiance à un gouvernement américain, celui du président Barack Obama. Une décision aux conséquences incalculables pour la politique régionale.

“ Lune l’envers ”, une bande dessinée de Blutch à découvrir, dans laquelle les personnages « vivent et meurent dans un monde où l’on ne sait pourquoi on travaille, ni même ce qu’il advient du produit de ce travail. Ce monde est celui des animaux humains. »

Fabien Desage et David Guéranger estiment que la gauche a raté son rendez-vous avec la politique locale : Votée en décembre à l’Assemblée nationale, la loi sur les métropoles constitue le dernier avatar des institutions intercommunales apparues dans le sillage des réformes de décentralisation. Censées rapprocher les élus des citoyens, ces structures fonctionnent en fait dans une grande opacité. L’esprit de consensus qui y règne estompe les clivages politiques et permet la confiscation du débat au profit d’une technicisation de l’action publique.

Gorgio Agamben montre comment l’obsession sécuritaire fait muter la démocratie : L’article 20 de la loi de programmation militaire, promulguée le 19 décembre, autorise une surveillance généralisée des données numériques, au point que l’on parle de « Patriot Act à la française ». Erigé en priorité absolue, l’impératif de sécurité change souvent de prétexte (subversion politique, « terrorisme ») mais conserve sa visée : gouverner les populations. Pour comprendre son origine et tenter de le déjouer, il faut remonter au XVIIIe siècle…

Enfin, l’énergie verte serait-elle notre ennemie, demande Philippe Bovet ?

Dans son étude sur « deux siècles de rhétorique réactionnaire », l’économiste américain Albert Hirschman note que, au cours des débats sur la Déclaration universelle des droits de l’homme, l’interdiction du travail des enfants, la journée de huit heures ou encore la sécurité sociale, les forces conservatrices usèrent à chaque fois de trois types d’arguments : l’inanité (le changement proposé ne résoudra pas le problème), la mise en péril (il anéantira les bénéfices liés aux précédents systèmes) et l’effet pervers (« l’action envisagée aura des conséquences désastreuses »). Parce qu’elle retourne l’intention progressiste en son contraire, cette dernière figure s’avère particulièrement ravageuse et démobilisatrice : si agir conduit à régresser, autant ne rien faire.

À lire également un supplément sur la couverture sanitaire universelle.

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En finir avec l’eurolibéralisme - Bernard Cassen (dir.) - Mille et Une Nuits, 2008.
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Il s’agit là d’un court ouvrage collectif, très dense, publié suite à un colloque organisé par Mémoire des luttes et la revue Utopie critique à l’université Paris 8 en juin 2008, sous la direction de Bernard Cassen, fondateur et ancien président d’ATTAC, à qui, on s’en souvient, le "non" au référendum de 2005 doit beaucoup. La thèse centrale de cet ouvrage est que l’« Europe » est, et a toujours été, une machine à libéraliser, au-dessus des peuples, contre les peuples. Dans "La fracture (…)
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Jean-Christophe Defraigne, professeur, Université de Louvain

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