Et ce, tandis que le pouvoir du premier ministre turc est en train de vaciller [1], ébranlé par un scandale politico-financier de grande ampleur qui a déjà entraîné la démission de trois ministres et un profond remaniement du gouvernement.
En admettant qu’il ne soit pas contraint à remettre sa démission, on voit mal, dans ces conditions, comment M. Erdogan pourrait briguer un mandat présidentiel lors des élections de 2014 d’autant, nous dit-on, que le mouvement religieux de Fethullah Gülen [2] est entré en opposition ouverte contre lui (Gülen avait contribué à la victoire électorale d’Erdogan).
Le scandale ne se limite cependant pas à des affaires strictement turques mais concerne aussi l’action du gouvernement AKP (Parti de la Justice et du Développement) dans la Syrie voisine. En effet, parmi les personnes recherchées par la justice, on compte deux ressortissants Arabes présentés comme membres d’al Qaïda, c’est-à-dire en réalité des services secrets saoudiens.
Ces deux personnages sont actuellement en fuite, une fuite qui a été permise par une police dirigée désormais par des fidèles du gouvernement et qui se permet de ne pas appliquer les ordres des magistrats.
Yusuf Al Qadi et Osama Khoutub ne menaient pas une existence clandestine en Turquie où ils avaient au contraire l’oreille de hauts responsables politiques .
Il fallait bien ça pour organiser le transit de ces milliers de combattants européens vers le champ de bataille syrien.
Des suspects membres d’al Qaïda fuient après le blocage par le gouvernement turc d’une descente de police [3]
Selon des informations, Yusuf Al Qadi et Osama Khoutub qui sont liés à al Qaïda et figurent parmi les suspects dans une importante affaire de corruption, auraient fui la Turquie après que le Parti de la Justice et du Développement (AKP au pouvoir) a bloqué une descente de police mercredi, le police d’Istanbul ayant refusé d’exécuter les ordres donnés par des magistrats afin d’arrêter plusieurs suspects dans le second volet de l’enquête,
Le bureau du procureur d’Istanbul a ordonné l’arrestation de 30 suspects, dont un certain nombre de parlementaires et d’hommes d’affaires. Le département de police d’Istanbul qui a connu une vaste purge au niveau de ses officiers supérieurs la semaine dernière, ne s’est cependant pas conformé aux instructions.
Les informations de presse laissent entendre que quand la liste des 30 suspects a été révélée aux médias mercredi, certains des suspects ont pris des mesures de précaution pour éviter de laisser des éléments à charge contre eux en cas de descente de police chez eux où dans leurs bureaux.
Et certains suspects ont fui la Turquie, dont les agents d’al Qaïda pour la Turquie, Al Qadi et Khoutub, après que le gouvernement a bloqué l’enquête par le truchement de chefs de la police récemment nommés qui ont refusé de se conformer à la décision de justice.
Le procureur Muammer Akkaş, qui conduisait la deuxième phase de l’enquête, a été dessaisi du dossier. « L’ensemble de mes collègues et l’opinion publique devraient savoir qu’on m’a empêché en tant que procureur d’effectuer l’enquête, » a expliqué jeudi le procureur dans une déclaration, ajoutant qu’une entrave à l’action judiciaire a été exercée aussi bien par le bureau du procureur général que par la police, donnant ainsi l’occasion aux suspects de détruire les preuves.
Akkaş a déclaré que malgré la délivrance de mandats d’arrêt et de perquisition à l’encontre des suspects et leur transmission mercredi matin aux services de police d’Istanbul, ces derniers n’ont pas respecté ses ordres :
« En n’appliquant pas les décisions de justice, les chefs de la police ont commis un délit. Une occasion a été offerte aux suspects de prendre des dispositions, de fuir ou d’altérer des éléments à charge. »
Les avoirs en Turquie de l’homme d’affaire saoudien Al Qadi ont été gelés après sa désignation comme financier du terrorisme international. Des articles de presse observent que le suspect d’appartenance à al Qaïda est autorisé à entrer librement en Turquie et a accès à des diplomates et à des responsables sécuritaires de haut niveau, comme le sous-secrétaire des services de renseignements (MİT) Hakan Fidan.
Selon des allégations, l’ancien ministre de la justice Sadullah Fergin, qui a quitté son poste mercredi suite à un important remaniement ministériel, avait demandé au procureur général de fermer le dossier.
Eaman (Turquie), 26 décembre 2013, traduit de l’anglais par Djazaïri