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50ème anniversaire de l’assassinat de John Kennedy

Le complot avorté de la CIA et de l’État-major (Granma)

Le nouveau président Lyndon Johnson échange regards et sourires avec le congressiste Albert Richard Thomas lors de sa prestation de serment devant la juge Sarah Hugues et Jacqueline Kennedy. La veille de l’attentat, il avait déclaré : « À partir de demain, ces maudits Kennedy ne seront plus un problème pour moi ».

Il est ressorti récemment des enregistrements des conversations qui eurent lieu dans l’avion qui transportait à Washington le cadavre du président John Fitzgerald Kennedy qui révèlent que le général Curtis LeMay, chef de l’État-major de l’aviation, était à bord, mais que sa présence avait été occultée. LeMay et un autre général, Lyman Lemnitzer, furent impliqués dans une tentative de coup d’État, en juin 1962, qui fut soigneusement cachée à l’opinion publique. Le putsch fut reporté au 22 novembre 1963.

Ces renseignements furent découverts dans les documents du général Chester Clifton, conseiller militaire de Kennedy. Selon les Archives de sécurité nationale des États-Unis, qui ont diffusé la bande magnétique sur Internet, l’un des assistants avait essayé à tout prix d’interrompre les transmissions de l’avion présidentiel Air Force 1 et d’entrer en communication avec le général LeMay. La première version de cet enregistrement prend soin d’éviter de mentionner le chef de l’aviation, ce qui n’a fait qu’alimenter les soupçons autour de l’attentat et sur le comportement de LeMay, réputé être l’un des adversaires les plus coriaces de JFK.

La confrontation entre les chefs de l’État-major et de la CIA, d’une part, et le président John Kennedy, de l’autre, commença le 18 avril 1961 lorsque l’amiral Burke et le général Lemnitzer firent pression sur JFK pour bombarder Cuba et remédier à la situation difficile dans laquelle se trouvaient les envahisseurs. [1]

Durant la Crise des missiles en 1962, le général LeMay était partisan d’une frappe nucléaire préventive, et il alla pratiquement jusqu’à insinuer au président : « Cela empeste comme la lâcheté de Neville Chamberlain ! Ce serait aussi mauvais que l’apaisement de Munich » [2]

Le chef de l’aviation se référait au père de Kennedy alors qu’il était ambassadeur à Londres, lorsqu’il fut accusé de suggérer au Premier ministre britannique de céder la Tchécoslovaquie à Hitler en 1938 pour apaiser les ambitions du Führer. Discrédité à Londres et à Washington, Joseph Kennedy démissionna de son poste en 1940.

Le général Curtis LeMay arguait que l’URSS ne ferait rien pour empêcher une action militaire directe et immédiate. Il jouissait du soutien de tous les chefs des corps armés, y compris du chef de l’État-major conjoint, le général Maxwell Taylor, nommé par Kennedy en remplacement du général Lemnitzer pour tenter, en vain, de contenir les autres militaires. Malgré tout, le président Kennedy refusa le projet de bombardement et dl’invasion de Cuba, craignant une riposte nucléaire de l’Union soviétique. Le général LeMay décrira cette crise comme la plus grosse défaite de l’Histoire des États-Unis. Quelques jours plus tôt, le général Lyman Lemnitzer et Allan Dulles, alors directeur de la CIA, avaient proposé, lors d’une réunion du Conseil de sécurité, de lancer une attaque nucléaire surprise contre l’URSS. Le président était ressorti en colère de cette réunion, si l’on en croit son conseiller Arthur Schlesinger.

Lemnitzer agissait de connivence avec LeMay depuis son limogeage en juin 1962, soit quatre mois avant la Crise des missiles, pour avoir dirigé un complot contre le gouvernement. Subordonné à Eisenhower pendant la Seconde guerre mondiale et considéré comme un héros, Lemnitzer avait été promu par JFK, lors de sa prise de fonction, de chef de l’armée au rang de chef de l’État-major conjoint.

À 20 h il fut convoqué à une réunion à la Maison-Blanche, car « le président avait fait une découverte choquante : son chef de l’État-major conjoint était impliqué dans un complot pour renverser le gouvernement et le remplacer par une maudite junte militaire ». [3]

La première réaction de Lemnitzer à cette réunion fut d’accuser Kennedy d’avoir perdu le respect de la nation et d’avoir conduit le pays au bord de la catastrophe du fait de ses politiques envers l’Union soviétique. Le New York Times révélait quelques jours plus tard que Kennedy avait donné l’ordre aux agents du FBI d’investir les bureaux des chefs militaires au Pentagone.

Le président opta pour ne pas dénoncer publiquement le complot, en échange de la démission du général Lemnitzer de son poste de chef de l’État-major, qui fut confié au général Maxwell Taylor. En Novembre 1962, Lemnitzer fut nommé commandant des forces US en Europe, et en tant que commandant suprême des forces alliées de l’OTAN. L’affaire fut étouffée, voire niée, soi-disant parce que « le président harcelé ne souhaitait pas éroder davantage la confiance dans son gouvernement ». [4]

La présence du général LeMay à bord de l’avion présidentiel est perçue comme une preuve de sa connivence avec le nouveau président Lyndon B. Johnson. Ce fait est associé aux nombreux différends des frères Kennedy avec Johnson et le lobby militaire et du renseignement, des dissensions qui s’aggravèrent en 1963. Les Kennedy allaient dénoncer les connexions politiques et administratives corrompues du milliardaire Texan Billie Sol Estes, qui fut l’un des financiers de Lyndon Johnson et qui fut sanctionné par les tribunaux à la suite d’une enquête menée lorsque Robert Kennedy était procureur général. Estes avait notamment déclaré que le vice-président Johnson l’avait forcé à taire les affaires louches auxquelles ils se livraient ensemble. Que les deux frères avaient décidé de l’écarter de la candidature aux élections de 1964 en raison des informations que Robert avait collectées sur les affaires de corruption de Johnson.

La maîtresse de Johnson, Madeleine Duncan Brown, a raconté plus tard que le 21 novembre (la veille du crime) le vice-président avait assisté à une soirée privée à Dallas chez le magnat du pétrole Clint Murchinson, où Johnson prononça une phrase assez énigmatique : « À partir de demain, ces maudits Kennedy ne seront plus un problème pour moi ».

Le chercheur Carl Oglesby a toujours considéré Johnson comme le principal bénéficiaire de la mort de Kennedy. Dans son livre The Yankee Cowboy War, Oglesby signale qu’il s’agissait de « la réunion des derniers préparatifs ».

Mme Duncan Brown accorda une interview de 80 minutes au journaliste Robert Gaylon Ross sur sa liaison de 21 ans avec Johnson, mais ses révélations ont été largement ignorées par les médias. Jusqu’à sa mort, en 2002, jamais elle ne montra d’antipathie pour Johnson.

Oglesby signale dans son ouvrage la présence à cette soirée de personnages qui haïssaient les Kennedy où s’opposaient à leur ligne de pensée, tous des commanditaires présumés de l’attentat du 22 novembre, resté impuni depuis bientôt 50 ans !

Le principal étant le patron du FBI, J. Edgar Hoover, que Robert Kennedy accusait d’être un maître chanteur qui entretenait des liens troubles avec Meyer Lansky, et ami du gangster Frank Costello. Selon Oglesby, participaient à la réunion, outre Johnson et Murchinson (partenaire en affaires du mafieux Meyer Lansky) : Allen Dulles, ex-directeur de la CIA, le magnat du pétrole H.L. Hunt, John J. McCloy et John Connally, ex-gouverneur du Texas ; le général Charles Cabell et son frère, le maire de Dallas, Earle Cabell. Ce dernier aurait changé l’itinéraire du cortège présidentiel, ce qui facilita la tâche des tireurs.

Robert était prêt à se servir de cet arsenal lorsqu’il décida de déroger à la tradition de s’abstenir de défier un membre de son propre parti alors qu’il était président, et il annonça sa candidature aux élections primaires de 1968, alors que Johnson briguait la réélection. En fait, Johnson revint sur la décision de JFK de diminuer l’engagement militaire au Vietnam, qu’il renforça. Par ailleurs, il refusa d’améliorer les relations avec Cuba, comme Robert le lui avait demandé lors de son accession à la présidence.

C’est un peu ce que fait Barack Obama de nos jours en insistant pour attaquer la Syrie et en maintenant le siège sur Cuba, ceci en dépit du vœu de JFK, que lui demanda sa fille Caroline, le 27 janvier 2008, aux primaires du Parti démocrate.

Dans une tribune publiée dans le New York Times sous le titre Un président comme mon père, elle signalait : « Je n’ai jamais connu de président qui m’ait inspiré de la façon dont les gens m’ont dit que mon père les avait inspirés. Mais pour la première fois, je pense avoir trouvé l’homme qui pourrait être ce président – pas seulement pour moi mais pour une nouvelle génération d’Américains ». C’est la seule et dernière fois que la fille de Kennedy a manifesté ses sympathies pour un candidat à la présidence. Plus tard, le sénateur Edward Kennedy s’est lui aussi prononcé en faveur d’Obama, afin de faire pencher la balance – jusque-là favorable à Hillary Clinton – en faveur du jeune sénateur Afro-américain plein de promesses.

Mais à présent, son alliance avec certains milieux est applaudie par les forces militaristes et ultraconservatrices cubano-américaines qui, selon les recherches de Robert Kennedy, furent collaboratrices ou complices dans l’attentat, et passèrent à l’acte sans plus attendre, entre autres raisons parce que la CIA avait découvert que son frère s’apprêtait à normaliser les relations avec Cuba.

Les Kennedy refusaient de cautionner la philosophie de guerre qui, à cette époque, se projetait avec plus de force sur Cuba et sur le Vietnam. D’après de récentes révélations, dès qu’il apprit la nouvelle de l’assassinat de son frère, Robert Kennedy soupçonna la CIA, la mafia italo-américaine et les gangsters cubains d’être derrière l’attentat, car il avait suivi de près leurs activités pendant les dernières années, et il était prêt à le prouver mais, conscient d’avoir affaire à un ennemi très puissant, il ne pensait faire ces révélations qu’une fois qu’il serait à la tête du gouvernement. C’est pourquoi il fut assassiné en 1968.

Telle est, en essence, la conclusion à laquelle arriva, en 1978, le Comité du Congrès lorsqu’il ordonna la poursuite de l’enquête. Ce n’est pas un hasard si le groupe de mafieux cubains suspectés d’avoir participé au complot bénéficie toujours du soutien des congressistes cubano-américains Ileana Ros-Lehtinen et Mario Diaz-Balart, entre autres, tous financés avec des fonds versés par le gouvernement au nom de la liberté. Barack Obama semble avoir oublié qu’au lendemain de sa réélection, ces ultras ont refusé de le recevoir. Mme Ros-Lehtinen est même allée plus loin en refusant de lui parler au téléphone. C’est ce groupe appuyé par le lobby israélien et le complexe militaire qui tient en otage la politique US vis-à-vis de Cuba.

Gabriel Molina Franchossi, Granma. 26-4-11.

»» http://www.granma.cu/frances/internationales/17oct-Le%20complot.html

[1James W. Douglas. JFK and the Unspeakable. Simon & Schuster. New York, 2008. p. Xxiv, 21-22.

[2David Talbot. Brothers. Simon & Schuster. New York, 2007 p. 145.

[3Ibid p. 349.

[4William Reymond. Le dernier témoin. Éditions Flammarion. Paris 2003, p 259.


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