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Les enfants en ligne de mire : les leçons de l’affaire Al-Dura (DCI Palestine)

Image du tir sur Muhammad al-Dura (Copie d’écran : France 2)

Le débat qui se poursuit sur l’affaire Al-Dura, depuis près de 13 ans, reflète l’incapacité du gouvernement israélien actuel à mener des enquêtes sérieuses et impartiales sur les violations des droits palestiniens.

Mercredi, Philippe Karsenty, analyste français des médias, a été reconnu coupable de diffamation pour avoir accusé un réseau de télévision français d’orchestrer une séquence vidéo du tir sur Mohammad al-Dura, 12 ans, à Gaza, en septembre 2000. Au cours des 13 années passées, cette fusillade a été au centre des sentiments nationalistes israéliens de victimisation, que ce soit par les médias, la communauté internationale ou tout autre qui critique la politique israélienne envers les Palestiniens.

Alors que le verdict ne peut guère ébrécher l’exceptionnalisme israélien, l’incident qui, au moins en partie, a contribué à intensifier la poursuite d’un débat de près de 13 années sur le tir, met en évidence l’indifférence des responsables israéliens à l’égard de la destruction calculée de la vie à Gaza.

Le mois dernier, le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a reçu un rapport du gouvernement israélien qui non seulement affirme qu’il n’y avait aucune preuve pour laisser penser que les forces israéliennes avaient abattu le garçon, mais prétend encore, de façon éhontée, que le garçon s’en était probablement sorti indemne. Netanyahu avait lancé une enquête l’année dernière parce que, selon lui, l’incident avait été utilisé à maintes reprises pour salir la réputation d’Israël.

Bien qu’un général israélien ait reconnu qu’al-Dura avait été touché par des tirs israéliens, le ministre des Affaires stratégiques internationales et du Renseignement, Yuval Steinitz, a qualifié le tir de « diffamation de sang moderne contre l’État d’Israël ». S’exprimant lors de la publication du rapport, Netanyahu a déclaré que l’affaire al-Dura était un exemple de la « campagne en cours, mensongère, visant à délégitimer Israël » et qu’ « il n’y a qu’une façon de contrer les mensonges, et c’est par la vérité ». Il l’a ensuite répété, « Seule, la vérité peut l’emporter sur le mensonge ».

Mr Netanyahu, voyons donc les faits.

Depuis le déclenchement de la deuxième Intifada, en 2000, les forces israéliennes sont responsables de la mort de 1397 enfants dans les territoires occupés, dont 1031 à Gaza, selon les preuves réunies par Defence for Children International Palestine. Fin 2012, lors de la plus récente offensive contre Gaza, 33 enfants ont été tués. Entre décembre 2008 et janvier 2009, les forces israéliennes ont tué au moins 353 enfants, dont 26 gamins dans, ou près de leurs écoles.

Des enfants marchent à travers les ruines de l’immeuble du Département civil du ministère de l’Intérieur, complètement démoli ce matin, dans le quartier de Tal el Hawa, Gaza ville, le 17 novembre 2012. (Photo : Anne Paq/ACtivestills.org)

Les offensives militaires répétées contre Gaza et un blocus draconien de six années ont conduit à des allégations persistantes de punition collective contre la population civile, en violation du droit humanitaire international.

Ils sont près d’une génération d’enfants palestiniens à Gaza à avoir essuyé des tirs, des bombardements et des attaques depuis la mort d’al-Dura. Leurs maisons et leurs écoles ont été attaquées et les enfants ont été témoins de nombreux évènements atroces et tragiques. Ils ont perdu des parents, des frères et des sœurs, des grands-parents, des tantes, des cousins et des voisins, et aussi leurs propres jambes, leurs bras et d’autres parties de leurs corps.

Ces chiffres ne comprennent pas le nombre incalculable des enfants qui sont morts à cause de la terrible crise humanitaire provoquée par le blocus israélien, avec une effondrement économique et une extrême pauvreté, les interruptions et les fermetures de l’électricité, les insuffisances d’équipements et de fournitures pour la médecine, et l’incapacité à accéder à l’eau potable.

Le rapport sur al-Dura montre que le gouvernement israélien est totalement incapable de conduire des enquêtes sérieuses et impartiales sur les violations des droits palestiniens. Le rapport témoigne au moins de la nécessité d’un mécanisme d’enquête indépendant, comme la Cour pénale internationale, pour lutter contre l’impunité dans les territoires occupés. Malgré cela, le père de Mohammad, Jamal al-Dura, est prêt à exhumer le corps de son fils afin de répondre clairement à la demande du gouvernement israélien. « Si Israël est d’accord, je suis prêt à ouvrir la tombe » a-t-il dit à la publication du rapport, fin mai.

Le rapport est une tentative timide pour étouffer le symbolisme al-Dura en ignorant totalement la réalité de ces 13 dernières années et la réalité de la vie et de la mort de cet enfant. Il ne fait rien pour améliorer l’image d’un gouvernement qui a tué plus de 1000 enfants depuis 2000. Il ne traite pas d’une « campagne mensongère » qui serait critique de la politique israélienne ; il a besoin simplement d’un aperçu des faits, et les faits sont accablants.

La seule façon pour Mr Netanyahu de gérer le « problème de l’image » d’Israël, d’une nation qui tue des enfants, est d’arrêter de tuer des enfants.

Brad Parker

Brad Parker est avocat et conseiller international de Defence for Children International Palestine, une organisation indépendante pour les droits de l’enfance dévouée à la défense et à la promotion des droits des enfants qui vivent dans les territoires palestiniens occupés.

Souce : DCI Palestine http://www.dci-palestine.org/documents/children-crosshairs-lessons-al-dura-affair

traduction : Info-Palestine/JPP

»» http://www.info-palestine.net/spip.php?article13740
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