Ce
projet est né d'un profond sentiment d'indignation. Un sentiment presque
incontrôlable. En décembre 2003, en rédigeant un article sur le scandaleux cas
des cinq prisonniers politiques cubains, a surgi l'impérieuse nécessité de
réaliser un écrit collectif sur le terrorisme des Etats-Unis contre Cuba et sur
l'abjecte condamnation des cinq patriotes cubains.
En
janvier 2004, j'ai contacté plusieurs universitaires, intellectuels, écrivains,
chercheurs et journalistes de renommée internationale et je leur ai fait part
du projet de publier ensemble un ouvrage collectif sur l'un des pans les plus
infâmes de la politique étrangère des Etats-Unis contre Cuba. En moins de deux
semaines, les personnes suivantes ont accepté de participer au projet :
Ricardo Alarcón, président de l'Assemblée nationale du pouvoir populaire de la
République de Cuba ; William Blum, ancien fonctionnaire du département d'Etat
étasunien ; Noam Chomsky, célèbre linguiste étasunien considéré par le New
York Times comme étant « le plus important intellectuel de notre
époque » ; Piero Gleijeses, prestigieux professeur de politique
étrangère étasunienne à l'Université Johns Hopkins ; Nadine Gordimer,
écrivaine sud-africaine et Prix Nobel de littérature ; Saul Landau, ancien
chercheur du département d'Etat nord-américain et universitaire
distingué ; Gianni Miná, sans doute l'un des plus célèbres journalistes
italiens ; Michael Parenti, l'un des penseurs étasuniens les plus
progressistes ; James Petras, prolifique écrivain nord-américain très respecté
pour la justesse de ses analyses ; Michael Steven Smith, avocat et
écrivain très connu aux Nations unies ; Ignacio Ramonet, directeur du
prestigieux journal français Le Monde Diplomatique et l'un des
intellectuels français les plus respectés ; Jitendra Sharma, avocat et
Président de la International
Association of Democratic Lawyers, organisme qui dispose de représentants à l'UNESCO, à l'UNICEF et dans 96
pays; Wayne S. Smith, l'un des spécialistes les plus expérimentés sur les
relations entre Cuba et les Etats-Unis et ancien chef de la Section des
intérêts nord-américains de La Havane de 1979 à 1982; Leonard Weinglass,
célèbre avocat qui a défendu Angela Davis, Jane Fonda, Mumia Abu-Jamal, Amy
Carter (la fille de l'ex-président Carter), et actuellement avocat de Antonio
Guerrero; et Howard Zinn, l'un des plus importants historiens nord-américains.
L'objectif
de cet ouvrage est de faire connaître la vérité au peuple des Etats-Unis et à
la communauté internationale et de révéler les barbaries perpétrées par
Washington contre Cuba. Les Nord-américains ont démontré, à de multiples
reprises, qu'ils étaient capables de défendre des causes généreuses à condition
de pouvoir échapper à la puissante machine de désinformation et
d'endoctrinement que constituent les transnationales de l'information.
L'objectif
de ce livre est aussi de revendiquer le droit du peuple cubain à être maître de
son destin et d'exiger la libération des cinq antiterroristes injustement
incarcérés. L'ouvrage est publié aux Etats-Unis par la maison d'éditions Common
Courage Press. Une traduction au français est prévue pour septembre 2005.
Quelques réflexions sur le cas
des Cinq :
Dans
l'histoire des relations entre Cuba et les Etats-Unis, le cas des Cinq
s'inscrit dans la continuité d'une politique criminelle menée depuis le
triomphe de la Révolution cubaine en 1959. Cette politique prend ses racines
dans les desseins impérialistes élaborés dès le XVIIIe siècle.
L'inique
condamnation prononcée à l'encontre de cinq citoyens cubains qui ont risqué
leur vie pour protéger celle des autres revêt un caractère exceptionnel, non
seulement dans son contenu juridique dans la mesure où des personnes
héroïquement dévouées à la lutte antiterroriste ont été traitées comme de
vulgaires criminels, mais aussi par le traitement réservé à cette scandaleuse
affaire par la presse internationale. Ces deux aspects de la question
illustrent malheureusement non seulement le grave déficit d'éthique qui règne
dans les relations internationales, mais aussi la superficialité intellectuelle
qui gangrène le monde occidental.
Dans
l'histoire du terrorisme international, le cas de Cuba est réellement unique et
devrait être étudié et dénoncé par tout spécialiste du terrorisme digne de ce
nom. Mais, au contraire, les constantes agressions dont souffrent les Cubains
sont occultées et censurées, ou, quand cela n'est plus possible, minimisées par
les transnationales de l'information. Jamais une nation n'a été affrontée à une
campagne terroriste aussi impitoyable et sophistiquée que Cuba. Elle est menée
avec un zèle fanatique par les Etats-Unis, la plus grande puissance que
l'humanité ait jamais connue. Le peuple cubain a été victime de plus de 300
attentats terroristes qui ont coûté la vie à plusieurs milliers d'innocents, parmi
lesquels des personnes âgées, des femmes et des enfants. En plus de l'invasion
militaire mercenaire de Playa Girón en avril 1961, s'ajoute l'incessante guerre
paramilitaire et le terrorisme bactériologique.
Le
terrorisme que l'on a coutume de définir comme étant « l'usage de la
violence ou la menace de l'utilisation de la violence contre une population
civile pour des fins politiques, idéologiques ou religieuses » ne se
limite pas à cet aspect militaire et paramilitaire. Il est également
économique. Les sanctions économiques étasuniennes imposées au peuple cubain
depuis 1960 et condamnées par l'ensemble de la communauté internationale
entrent pleinement dans cette définition.
A cela
pourrait s'ajouter la campagne internationale de désinformation, d'une violence
inouïe, dont souffre la population cubaine. Ce terrorisme médiatique provient
également de Washington et il est scrupuleusement relayé par une grande partie
de la presse internationale. C'est la raison pour laquelle l'autorité morale
dont se prévaut l'actuelle administration Bush dans la « lutte contre
le terrorisme » frise le niveau zéro.
Tant
que Fernando, René, Ramón, Gerardo et Antonio resteront injustement incarcérés,
la « lutte contre le terrorisme » ne sera que le symbole de la
politique fallacieuse et meurtrière destinée à imposer l'hégémonie étasunienne
à l'humanité. Tant que les groupuscules terroristes anti-cubains de Floride
seront érigés en emblème du combat pour la démocratie, la « lutte
contre le terrorisme » restera une expression doctrinale, absurde et
dénuée de sens. Tant que le peuple cubain vivra sous un état de siège
économique permanent, il sera extrêmement difficile de parler de respect du
droit international et de justice dans le monde. L'erreur grave commise par
Washington est de penser que ce harcèlement arbitraire inhibera la capacité de
résistance des Cubains. Les faucons impérialistes de la Maison-Blanche oublient
simplement que, pour reprendre les propos du président cubain, « cette
Ile s'enfoncera dans la mer avant que le peuple cubain ne consente à être
l'esclave de quiconque ».
Notes
1 Salim Lamrani (dir.) Superpower Principles. U.S.
Terrorism Against Cuba (Monroe, Maine : Common Courage Press, 2005). www.commoncouragepress.com ;
www.amazon.fr ; www.amazon.com
Salim
Lamrani (dir.) Terrorismo de Estados Unidos contra Cuba. El caso de los
Cinco (La Havane : Editorial José Martà, 2005).