Le double discours dans lequel se complaisait le PS
entre social et libéralisme n'a plus lieu d'être. Ce référendum interne nous
fournit une nouvelle grille de lecture.
DITS ET NON DITS
La victoire du «oui» au référendum au sein du PS a probablement d'autres
raisons que la simple adhésion des militants à l'option libérale du texte de la
Constitution. Dans tout parti largement bureaucratisé, les conflits de pouvoir
et les ambitions personnelles ont joué un rôle non négligeable dans la décision
de celles et ceux qui se sont exprimés. Les perspectives de l'élection
présidentielle et le choix à venir du candidat du parti n'étaient certainement
pas absents des esprits... la personnalité du leader du «non», libéral notoire, a
joué à coup sûr un rôle.
La victoire du «oui» au PS ancre, en dépit de tout cela, ce parti dans la
grande mouvance libérale de la construction européenne. Celles et ceux qui
osaient espérer une singularité du PS dans la dérive libérale de la social
démocratie européenne, en sont pour leur frais. Le PS a rejoint cette mouvance
et s'apprête, au côté des partis les plus conservateurs, à nous construire une
Europe du capital dont nous voyons déjà les dégâts.
Le PS va-t-il une nouvelle fois nous rejouer, pour l'Europe, la comédie qu'il
nous a joué pour accéder au pouvoir en France?... il y a tout lieu de le
craindre. Comment va-t-il pouvoir se dépatouiller de la double contradiction
dans laquelle il s'est mis:
- une
grosse minorité de ses militant-e-s s'est prononcé pour le «non»... vont-ils militer
désormais pour le «oui»? La «discipline républicaine» comme ils disent, devrait
l'imposer. Ca promet d'être cocasse.
- mais
surtout comment va-t-il se distinguer de ses soit disant adversaires
politiques, mais désormais alliés, durant la campagne du référendum? Quelle va
être la valeur de la crédibilité de son discours quand il nous parlera de
«danger libéral»?
Les «non dits» auront-ils la même importance que les «dits». Déjà que la
«langue de bois» est la langue la mieux utilisée dans les organisations
politiques, elle risque de s'enrichir de nouveaux concepts dans les mois à
venir.
AVEC QUI SORTS TU CE SOIR?
Ce «oui» du PS va avoir des conséquences sur les alliances politiques
traditionnelles.
La Gauche est la principale concernée et va probablement voler en éclat... si ce
n'est déjà fait il est vrai,....mais tout rabibochage éventuel, ou tentative,
risque d'être problématique.
Le PCF déjà en lambeaux, qui a toutes les peines du monde à exister perd, dans
cette affaire, son principal allié, celui qui lui permet d'exister
électoralement... par les alliances électorales locales et nationales. Va-t-il
pouvoir continuer à pratiquer ce genre d'exercice avec un partenaire qui a si
ouvertement trahi? La question mérite d'être posée. Si oui, il se déconsidère.
Si non il s'affaiblit. A moins qu'il ne cherche d'autres appuis...
Les Verts, complètement divisés sur la question de l'Europe perdent également
leur principal allié.
On peut faire confiance dans les bureaucraties de ces deux partis pour «retomber
sur leurs pieds» et faire en sorte que «compromis politiques» et défense de
leurs intérêts coïncident... Mais que va t-il en être de leurs militant-e-s les
plus conscients? Des forces centrifuges sont déjà à l'oeuvre dans ces
organisations...
La LCR quant à elle attend son heure: l'effondrement de la Gauche, la
déliquescence du PCF et des Verts fait son affaire... Elle est prête à prendre la
place laissée toute chaude... la «nouvelle Gauche» dont elle parle à demi-mots
c'est elle... elle en est convaincue... prête à récupérer les militants déçus et à
nouer de nouvelles alliances.
En dehors de toutes ces magouilles, le mouvement social, et les quelques
organisations qui ont la prétention de le représenter, vont avoir leur
rôle à jouer.
ATTAC, la principale et la plus bruyante, déjà l'objet de toutes les
convoitises va être soumise à forte pression. Les rescapés de la gauche vont
s'y accrocher comme à une bouée de sauvetage (ça a déjà commencé!). Les
dirigeants de cette organisation, qui se prennent déjà pour des «sages», vont
avoir leur «ego» qui va exploser. Réticent à s'engager sur le plan purement
politique, quoique assidûment courtisée et noyautée dans ses instances
dirigeantes par les organisations de la gauche et de l'extrême gauche (mais
chut, faut pas le dire!), elle va être largement sollicitée. En manque de
projets que va-t-elle décider? Va-t-elle constituer bon gré, mal gré, un pôle
de résistance au «oui»? Probablement... mais sous qu'elle forme? Cette nouvelle
fonction ne va-t-elle pas l'entraîner dans une mutation? Affaire à suivre et
attentivement...
PEUT-ON SE FOUTRE DE TOUT CELA?
Ce vote du PS on pourrait parfaitement l'ignorer en considérant que ce
n'est que manoeuvres et magouilles bureaucratiques. Certes, mais ce n'est pas
aussi simple.
Une nouvelle situation s'ouvre: ce qui pouvait paraître comme une alternance
(beaucoup de gens y croient encore,... ben oui, c'est ainsi!), la Gauche, est en
train de disparaître complètement. Autrement dit la disparition d'un espoir
d'alternative va devenir évidente aux yeux du plus grand nombre. Question: que
doit-on faire?
L'Europe qui se met en place va démultiplier les drames sociaux que nous
connaissons, les riches vont devenir de plus en plus riches et les pauvres de
plus en plus pauvres... d'ailleurs les statistiques officielles le confirment
déjà . La répression va prendre le pas sur la prévention et l'Etat va avoir de
moins en moins les moyens de se payer la «paix sociale». Quelle perspective?
L'Histoire du 20e siècle nous
apporte quelques réponses... je ne m'y étendrai pas, elles sont connues.
Imaginez quel peut-être le poids d'un discours populiste dans une société
bloquée, minée par les inégalités, les dérives communautaristes, submergés par
les chômeurs et les exclus,...? Que reste-t-il au citoyen qui n'a comme seul
moyen d'action que le bulletin de vote? A qui va-t-il confier son avenir?...
Dois je en dire plus?...
Les médias nous imposent les mêmes pitoyables marionnettes dont l'horizon n'est
borné que par leurs prétentions électorales, qui nous ressassent les mêmes
discours, dans lesquels ils nous font, sans rire, les mêmes promesses, où ils
nous prodiguent les mêmes flatteries pour s'assurer de nos voix.Fini la solidarité, place à
l'individualisme.
Notre avenir et celui des générations futures n'est certainement pas dans ces
élucubrations ridicules . A nous de mettre en place de nouvelles solidarités,
de nouveaux rapports sociaux, d'organiser de nouvelles alternatives .
On est loin du référendum au PS. Finalement non... il est une étape
supplémentaire vers le chaos social que nous réserve le système marchand et sa
conception libérale. Le défi qui se pose aujourd'hui est moins celui des
politiciens, que le notre... Il y va de notre avenir et de celui de celles et
ceux qui nous succèderont.