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Après un an de lutte, les indigné-e-s continuent le combat !

illustration : http://mimp.fr/

« La puissante bombe sociale va exploser à la face du système » |1| avait pourtant prévenu une militante du mouvement 15M au Conseil de l’Europe devant la Commission des Affaires sociales de l’Assemblée parlementaire le 24 janvier dernier. En attendant l’explosion, le feu couve et la colère gronde.

Un an après la naissance d’un mouvement social historique sur les places espagnoles le 15 mai 2011, le rendez-vous était donné. Dans les rues d’Espagne et dans de nombreux pays du monde des milliers de personnes se sont retrouvées pour fêter de manière pacifique et revendicative cet anniversaire.

En Espagne, malgré les multiples arrestations réprimant le droit de manifester, ce fut une belle réussite. Le 12 mai 2012, dans un contexte de crise aiguë et de luttes sociales, la foule a de nouveau envahi les rues, |2| occupé les places de nombreuses villes pour y tenir des assemblées populaires. Le thème de la dette et de l’audit citoyen pour en répudier la partie illégitime y était fortement présent. Alors que beaucoup pensaient le mouvement 15 M espagnol assoupi ou en perte de vitesse, la mobilisation prouve qu’il est toujours là , actif, organisé et prêt à agir.

Les indigné-e-s espagnol-e-s dans la rue pour le premier anniversaire du 15M

A l’occasion de la journée du 12 mai de nombreuses mobilisations ont été massivement suivies pour commémorer l’anniversaire du mouvement des indigné-e-s. Dans différentes villes les manifestant-e-s ont occupé des places centrales avant de se faire déloger par la police comme à Madrid, Séville, Cadiz, Palma de Mallorca ou encore Valencia.

A Barcelone, la Plateforme Unitaire en Défense de l’Université Publique (Plataforma Unità ria en Defensa de la Universitat Pública, PUDUP) avait décidé la grève étudiante le 3 mai contre la décision gouvernementale d’augmenter les frais universitaires, coïncidant ainsi avec le sommet de la Banque centrale européenne (BCE) dans la capitale catalane les 2 et 3 mai pour lequel l’accord de Shengen (qui permet la soi-disant libre circulation des personnes entre les pays de l’Union européenne) avait été suspendu afin de freiner l’arrivée de militants européens. Dès le 12 mai, le mouvement, autorisé à occuper la Place Catalunya sans doute pour effacer la sale image qu’avait donnée le pouvoir local lors d’une précédente occupation, organise des débats et actions. Une « cacerolada » (concert de casseroles) contre la banque Caixa de l’avenue Diagonal dure ainsi plus de 11 heures le jeudi 17 mai, |3| à l’endroit où plusieurs centaines d’indigné-e-s avaient décidé de camper avant d’être délogé-e-s par la police.

A Madrid, l’assemblée populaire a décidé de braver l’interdiction en restant sur l’emblématique place Puerta del Sol au-delà des horaires autorisés. Le 13 mai à l’aube, l’expulsion aura lieu avec une démonstration de force disproportionnée. Rien qu’à Madrid, les manifestations pacifiques entre le 12 et le 15 mai se sont soldées par 29 détentions et plusieurs centaines de contrôles d’identité. Des manifestations se sont déroulées devant la Banque d’Espagne et devant le siège de Bankia alors en pleine dégringolade et récemment sauvée de la faillite par l’État, sur le dos des contribuables, en nationalisant les pertes et les actifs toxiques.

A Valencia, le 12 mai, la municipalité avait décidé d’installer une « mascletà  » (concert de pétards très populaire) sur la place de la mairie rebaptisée « place du 15M » par le mouvement. Les manifestant-e-s ont répondu à cette provocation4 en balayant toute l’installation (barrière et pétards) pour occuper la place et y tenir une assemblée. Non loin de là , des prises de parole ont exposé l’audit citoyen de la dette en cours, dénoncé les expulsions de logements, les coupes immorales et criminelles dans la santé et l’éducation... L’importante présence de lycéens équipés de crayons géants et de pancartes en forme de livre (symboles de leurs seules armes) montre que la révolte de Lluis Vives n’est pas loin. |4| Rappelons que le nouveau gouvernement de Mariano Rajoy, aussitôt après avoir adopté le budget 2012 réduit de 27,3 milliards d’euros par des coupes budgétaires historiques, décida par décret loi de l’amputer de 10 milliards supplémentaires dans l’éducation et la santé.

Le 16 mai marquait donc le début de la deuxième année de ce mouvement puissant, revendicatif, innovant et surprenant. Mais ce fut aussi le début d’une grève des professeurs de la Communauté Valencienne convoquée par cinq syndicats (STEPV, FECCOOPV, CSI·F, ANPE, FETE-UGT PV) et une manifestation de près de 10 000 personnes. La grève de tout l’État espagnol du 22 mai a été très suivie et constitue la 1ère grève unie des professeurs et élèves, du collège à l’université, de la jeune démocratie espagnole convoquée par tous les syndicats dans un secteur de l’éducation plus que malmené par les restrictions budgétaires (3 milliards d’euros de coupes budgétaires dans l’éducation ont récemment été approuvés dans le cadre de ce décret loi cité plus haut).

Un contexte international tout aussi encourageant !

Ailleurs, le mouvement a été également présent dans de nombreux pays. A Londres, en Angleterre, 11 personnes ont été arrêtées lors de l’expulsion d’une assemblée pacifique sur les marche du "Royal Exchange’. En Belgique, plus de 1000 personnes ont défilé dans la capitale, avant de se rassembler en différentes assemblées thématiques pour organiser et coordonner les mobilisations à venir.

Au Québec, confrontée à un mouvement étudiant porteur de nouvelles formes de luttes à l’image du mouvement des indigné-e-s d’une ampleur exceptionnelle, la ministre de l’Éducation et vice-première ministre, Line Beauchamp, a dû démissionner le 14 mai 2012. En grève illimitée, les étudiant-e-s entamaient alors leur 14ème semaine de lutte pour empêcher une hausse de près de 75 % en cinq ans des frais de scolarité universitaire : de près de 2 200 dollars canadiens (environ 1 700 euros) par an à près de 3 800 dollars (3 000 euros) en 2017. Le 22 mai, jour de la grande grève du secteur de l’éducation en Espagne, plusieurs centaines de milliers de personnes manifestaient dans les rues de Montréal et des grandes villes pour marquer les 100 jours de lutte de la plus longue grève étudiante de l’histoire du Québec |5|.

A Francfort, rebaptisé "Bankfurt" à l’occasion d’un rassemblement anti-capitaliste de quatre jours, plus de 20 000 personnes ont manifesté à l’appel du collectif Blockupy le 19 mai pour dénoncer le règne de l’austérité en Europe. Les autorités locales, qui avaient interdit toutes les autres manifestations (jusqu’à certaines conférences prévues depuis longtemps), ont empêché à la dernière minute l’itinéraire proposé par les organisateurs et la manifestation n’a pu se terminer devant le siège de la Banque centrale européenne (BCE), partie intégrante de la Troika. |6|

En Russie, les rues se remplissent aussi ! Vladimir Poutine fait face à une contestation sans précédent depuis les législatives de décembre 2011 entachées de fraudes massives et remportées par le parti au pouvoir Russie unie. Des manifestations anti-Poutine ont rassemblé jusqu’à 100 000 personnes à Moscou et, impensable auparavant, des centaines de jeunes opposant-e-s ont occupé dès le 8 mai le parc de Tchistye Proudy. Ce campement du centre de Moscou s’est établi en réaction à la répression violente d’une manifestation de l’opposition le 6 mai dernier, la veille de l’investiture de Vladimir Poutine. Le camp a été "évacué" une semaine plus tard, plusieurs centaines de manifestant-e-s ont été interpellé-e-s.
De l’autre côté de l’Atlantique, le mouvement Occupy étatsunien a pris les devants en appelant à la grève le 1er mai 2012. Relayé par d’autres villes au Canada, en Australie et en Corée du Sud, cet appel sonne fort. En effet, depuis la fameuse grève générale du 1er mai 1886, |7| la fête des travailleurs était célébrée le 1er lundi de septembre. Au-delà du symbole, le fait d’imposer le 1er mai dans l’agenda social des Etats-Unis est un acte politique qui renoue avec l’histoire des mouvements sociaux, c’est en soit une victoire de la mémoire des luttes.

Enfin, le sommet du G8 initialement prévu à Chicago s’est déplacé à Camp David par peur des manifestations du mouvement Occupy, mouvement qui s’en prend aussi au sommet de l’OTAN le 20 et 21 mai à Chicago où se sont retrouvés les chefs d’Etat ou de gouvernement des 28 pays membres. Cette organisation militaire qui a pris le commandement de la force internationale de sécurité (ISAF) en Afghanistan en 2003, est dirigée depuis sa création par un Etatsunien.

Peu importe d’où on vient, peu importe où on vit, le mouvement des indigné-e-s est partout et compte bien se faire entendre. Les jours qui ont précédé ou suivi la date anniversaire du 15M ont démontré une fois de plus que ce mouvement a une capacité de mobilisation et d’action laissant présager de nouvelles luttes... jusqu’à ce que victoires s’en suivent !

Jérome Duval

http://www.cadtm.org/Apres-un-an-de-lutte-les-indigne-e

Notes

|1| "la potente bomba social va a estallar en la cara del sistema". EFE, 24 janvier 2012.

|2| Photos de manifestations en Espagne : http://www.rtve.es/mediateca/fotos/20120512/marchas-del-12m-imagenes/94215.shtml et ailleurs : http://occupywallst.org/article/watch-live-12m-global-actions-over-30-countries/

|3| http://www.youtube.com/watch?v=prnDJyJ5hMw&feature=player_embedded# !

|4| Espagne. Le mouvement social exige des comptes, http://www.cadtm.org/Espagne-Le-mouvement-social-exige et http://primaveravalenciana.com/

|5| Plus de 700 arrestations ont eu lieu. Une nouvelle loi, dénommée Loi 78, interdit de se couvrir le visage de masques ainsi que toute concentration à moins de 50 mètres des centres universitaires.

|6| On dénomme ainsi la Commission européenne, le FMI et la BCE qui agissent de concert pour appliquer les plans d’austérité en Grèce, en Irlande et au Portugal où ils forment les créanciers principaux.

|7| La grève du 1er mai 1886 est très suivi et particulièrement à Chicago où des centaines de policiers font irruption et chargent les ouvriers rassemblés en lutte pour la journée de huit heures.

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